De connivence avec des officiers supérieurs en poste, notre journaliste a tenté d’introduire l’arme empruntée à un commissaire… Anecdote illustrant l’extrême vigilance des services de police, dont témoigne ce compte-rendu d’une virée du JI à l’aéroport d’Alger.
En termes de sécurité, la réputation de l’aéroport d’Alger dépasse naturellement les frontières. Les spécialistes du monde entier s’accordent à reconnaître le bon compromis entre liberté d’y circuler et étroite surveillance. Zoom.
Le nombre ne nous sera communiqué qu’en termes de centaines. Cela fait partie du secret. Ils seraient près d’un millier, peut-être plus, des hommes et des femmes en uniformes ou habillés comme des voyageurs. La police nationale, la DGSN, chargée de la sécurité, a mis le paquet à l’aéroport d’Alger.
Les traumatismes d’hier et la hausse de la menace internationale d’aujourd’hui l’exigent. D’abord, il y a ce périmètre long d’environ 27 km à protéger de toutes sortes d’intrusion. La méthode universelle remonte à la nuit des temps. Faire en sorte que le visiteur, le travailleur, et le voyageur bien entendu, passent par une série de filtres avant de se retrouver près de l’enceinte aéroportuaire.
Côté ville, comme on dit dans le jargon des officiers de l’aéroport, plusieurs barrages utilisent différents procédés de contrôle : la fouille des coffres à bagages, le miroir glissé sous le châssis des voitures, la vérification d’identité et la discrète utilisation des brigades canines dont les chiens, experts en repérage d’explosifs ou de drogues, reniflent de loin tout chargement suspect pour leur odorat très développé.
L’HOMME ET L’OUTIL
Il y a le flair des chiens mais aussi les fennecs, ces petites boîtes métalliques à antenne que les policiers ou militaires pointent vers les automobiles franchissant des barrages fixes. Un commissaire de police nous précise, pour l’orgueil national, que ces fennecs sont de fabrication algérienne. Nous sommes donc devant un schéma académique de sécurisation d’un espace stratégique. L’outil est doublé de la vigilance de l’homme.
Des hommes dont la mission consiste aussi à guider les citoyens dans leur parcours vers les deux aérogares, celle réservée aux lignes intérieures et celle consacrée aux vols internationaux. Puis, lorsqu’on approche de l’aérogare, l’usager est contraint de se garer sur le parking, séparé de la façade vitrée par une voie de circulation à double sens, réservée aux services de sécurité et véhicules de service.
Le vaste parking surveillé s’impose comme une zone tampon entre l’extérieur et l’intérieur de l’aéroport. Tandis que le visiteur se déplace en évoluant librement, plusieurs équipes en alerte permanente scrutent le moindre mouvement grâce à un système de surveillance vidéo des plus performants.
SOURIEZ, VOUS ÊTES FILMÉS
Dans cette grande salle ressemblant à un studio de montage du cinéma contemporain, le silence règne. Nous venons perturber un trio de policiers concentrés sur leurs écrans. L’officier, une jeune femme qui cumule déjà quelques années d’expérience et qui est montée en grade en poursuivant des études universitaires sans pour autant interrompre sa carrière, répond à nos questions, et ce tout en restant concentrée sur son travail. Ils sont là pour 1h à 1h30 avant que la relève ne vienne.
La norme internationale étant théoriquement de 30 minutes pour les missions demandant le plus de concentration. Pas une minute de distraction possible. Des centaines de caméras envoient en temps réel des images des quatre coins de l’aéroport. Tarmac, barrages extérieurs, parkings, hall de l’aérogare, zone sous-douane… Rien n’échappe aux yeux de Big Brother.
On nous dit que l’aéroport est couvert à 90 %. Une moyenne de 400 caméras des plus sophistiquées, pilotées par un système informatique zoomant à volonté, enregistrent toutes les données en les gravant sur des supports à conserver pendant une durée de 35 jours, voire plus, en fonction de l’importance des images. 267 caméras sont fixes, les autres sont en mouvement dans un redéploiement constant pour tromper toute tentative d’échapper à leur optique.
Pour l’anecdote, l’équipe qui nous a reçus dans la salle de contrôle vidéo nous a montré le film de notre test au niveau du PIF (poste d’inspection et de fouille), lorsque nous avons essayé d’introduire une arme à feu avec la complicité du commissaire de police qui s’était prêté au jeu.
«Dès l’arrêt du tapis roulant, nous avons été automatiquement avertis, et nos caméras se sont aussitôt braquées sur la scène d’alerte. Nous avons suivi tout le manège en ayant, bien entendu, pris toutes les mesures pour parer à toute situation. Pour cela, il existe un PC radio gérant la communication entre les différentes unités. Nous avons vite compris qu’il s’agissait d’une simulation», nous explique la dame officier en jetant un regard empreint de fierté à son supérieur hiérarchique, le commissaire qui nous accompagnait.
La police au service du citoyen
Nous le disions au sujet des barrages filtrants et de leur disponibilité à renseigner et orienter, Les éléments de la police n’ont pas seulement vocation à surveiller. A l’aéroport d’Alger, l’objectif de la police est aussi de faciliter au maximum les formalités pour une fluidité nécessaire dans un espace accueillant des milliers de voyageurs par jour.
Par exemple, la PAF – la Police de l’air et des frontières – met en moyenne moins d’une minute pour l’examen des titres de voyage tels le passeport, la carte d’accès à bord de l’avion et autres documents. Moins d’une minute, et ce grâce au système de fichier informatique national intitulé SIRPAL, (Système informatique de recherche de la police algérienne). Nous avons aussi testé ce système en introduisant les données de notre passeport.
En quelques secondes, l’ordinateur peut indiquer si le titulaire est recherché par les autorités du pays ou encore afficher l’historique de ses derniers passages aux postes frontières. En tout, 64 guichets, 24 au départ et 40 à l’arrivée, sont répartis sur les deux aérogares pour garantir la célérité du traitement de la PAF. Un effort qui place l’aéroport d’Alger parmi les plus performants en la matière à l’échelle mondiale.
DU NEZ AU NIVEAU DES PIF !
Notre test d’efficacité a voulu défier la vigilance des policiers opérationnels sur les PIF. Test probant et rassurant, mais pas par hasard. Ces postes de contrôle en charge de l’inspection et de la fouille ont une lourde responsabilité.
En fins limiers, les agents en poste ne prennent aucun risque. Qu’il y ait foule ou que le trafic soit plutôt calme, le contrôle garde sa procédure constante. Sur quatre PIF qu’il faut franchir pour pénétrer dans l’avion, trois sont dotés de scanners pour le visionnage des bagages. Le dernier, situé à la porte de l’avion, engage les policiers à une dernière fouille manuelle minutieuse, où sacs et bagages à main, sacoches, ordinateurs portables, etc. sont inspectés.
Les policiers procèdent une dernière fois à une fouille au corps des passagers, et ce pour leur sécurité. Par ailleurs, un système international d’identification automatique des bagages, le SRTB, (système de reconnaissance et de traçabilité des bagages), permet de constater, lors du dernier PIF situé en salle d’embarquement que le propriétaire du bagage embarque effectivement.
C’est un codage figurant sur le coupon de la carte d’embarquement, que lit la machine de validation dudit coupon. C’est à ce moment là que la synchronisation des machines peut accepter le bagage en soute. En résumé, si le passager ne part pas, son bagage n’est pas envoyé non plus. Seuls les vols charter du terminal 3 continuent à exiger la reconnaissance manuelle du bagage par les passagers.
N. M.