Le ministre du Commerce
Rien que pour les produits alimentaires, l’Algérie a importé pour une valeur de 11 milliards de dollars.
Nos responsables nous ont habitués aux grands discours. Aux promesses sans lendemain. Amara Benyounès ne dérogera donc pas à la règle. Son prédécesseur, Mustapha Benbada, avait juré sur tous les saints de juguler la flambée des prix, surtout en plein mois de Ramadhan, de sortir l’économie nationale des griffes de l’informel. Sans succès. L’ancien ministre de l’Industrie et de la Promotion des investissements, Abdelhamid Temmar, avait initié les assises de la stratégie industrielle qui devait sortir l’économie nationale de sa dépendance par rapport au secteur des hydrocarbures. Un flop. Chérif Rahmani, ex-ministre de l’Aménagement du territoire, de l’Environnement et du Tourisme avait promis de ramener 2,5 millions de touristes d’ici l’horizon 2015, son collègue de la Pêche le kilogramme de sardines à 50 dinars algériens… Des promesses, toujours des promesses. Et cela dure depuis l’Indépendance. On en est encore là aujourd’hui. La dépendance par rapport aux exportations de pétrole et de gaz est toujours aussi accrue. Elles représentent plus de 95% des recettes en devises.
Le reste? Des clopinettes Pas d’autre alternative en vue. En signant l’Accord d’association avec l’Union européenne, en 2003, le gouvernement a pris des engagements auxquels il ne peut aisément déroger des années plus tard. Parmi ces engagements, celui qui conditionne la liberté d’importer même au détriment de l’économie du pays. Là est le non-dit de la déclaration du ministre du Commerce qui a, pourtant, émis des critiques, récemment, sur l’impact de cet Accord d’association, en relevant le fait que l’Algérie n’en a pas tiré les avantages attendus, loin s’en faut. Pour satisfaire les besoins de la population, le pays a recours aux importations tous azimuts. Une facture salée et historiquement élevée. Elle oscillera autour des 60 milliards de dollars en 2014. Celle des produits alimentaires s’élèvera à 9,5 milliards de dollars. Du jamais-vu depuis 1962. L’Algérie a les deux pieds dans le marigot. Elle donne l’impression de ne pas pouvoir s’en sortir. L’attelage qui est chargé de l’opération de sauvetage patauge lui-même dans la boue. Tout indique pourtant que l’année 2015 sera l’année de la récession sauf si par miracle, les prix du pétrole venaient à rebondir. Ce qui n’est apparemment pas le cas.
Le baril poursuit sa dégringolade. Les membres du gouvernement leurs palabres. Alors que les cours de l’or noir ont plongé sous les 50 dollars, le ministre du Commerce tergiverse sur les décisions à prendre pour limiter leur impact sur l’économie nationale minée par une facture des importations qui avoisinera les 60 milliards de dollars. «Il est impossible de donner en 2015, des réponses administratives à des problèmes d’ordre économique et il est par conséquent, important de trouver des solutions purement économiques et de mettre en place des mécanismes pour améliorer la production nationale», a déclaré lundi à Alger Amara Benyounès lors d’une rencontre de concertation avec le président du Forum des chefs d’entreprises (FCE), Ali Haddad. Au moment où tous les experts s’accordent sur l’imminence de la mise en oeuvre d’une politique de limitation des exportations, le successeur de Benbada n’en voit pas l’urgence. Et toc! Où est donc le problème? «La problématique pour l’Algérie ne résidait pas dans l’augmentation des importations mais dans le confinement de l’exportation aux seuls produits énergétiques, d’où l’impératif de diversifier l’économie nationale à travers la facilitation de l’investissement et l’attrait des investissements étrangers». diagnostique Amara Benyounès cité par une dépêche de l’APS datée de lundi. Il ne faut pas rêver, seronsnous tentés de lui répondre. L’entreprise est de longue haleine et pas de tout repos. Il faut regarder la réalité en face.
Les investisseurs étrangers ne se bousculent pas au portillon alors que nous importons des produits de première nécessité (poudre de lait, médicaments, légumes secs…), Mais aussi des kiwis, des avocats, du raisin et même des cerises en plein hiver! Et par containers, des produits pyrotechniques…qui handicapent à vie nos enfants. De l’argent parti en fumée. Arrêtons ce gaspillage! L’heure est à la prise de décisions rapides même douloureuses. Les Algériens connaissent le prix du sacrifice, il a jalonné toute leur histoire. La chute des prix du pétrole c’est comme un rapace qui fond sur nous, sa proie. Plus elle se poursuit, plus nos chances de nous en sortir s’amenuisent. Il y a certes cette manne fabuleuse de réserves en devises engrangée lorsque le baril planait largement au-dessus des 10 dollars. Un bas de laine qui a fondu de 8 milliards de dollars en trois mois. Les réserves de change se sont établies à 185,273 milliards de dollars à fin septembre 2014 alors qu’elles étaient à 193,269 milliards de dollars à la fin du mois de juin 2014, indiquent les chiffres de la Banque d’Algérie. A ce rythme-là et d’ici la fin de l’année 2015, ce pare-feu aura été laminé. Faute d’avoir trop parlé et de ne pas avoir agi, ce sera le temps des regrets et des rendez-vous ratés de l’Algérie avec son destin…