À propos de la prochaine élection présidentielle, Hamrouche rappelle que cette échéance comporte un risque et une opportunité, mais il laisse entendre que si l’Algérie rate la voie de la construction d’une vraie démocratie et d’un véritable État de droit, elle sera exposée au risque d’“embrasement des conflits du sommet”.
Mouloud Hamrouche a de nouveau parlé. Après son appel du 17 février, puis la conférence de presse qu’il avait animée le 27 du même mois, l’ancien chef de gouvernement, dans une interview accordée à El Watan et à El Khabar, a décidé d’en dire plus sur la situation complexe du pays et sur les “menaces” du maintien du statu quo. L’entretien du chef de file des réformateurs, publié hier par nos deux confrères, fait ressortir trois idées maîtresses : les carences en matière de “la gouvernance” en liaison avec “l’obsolescence” du pouvoir algérien, les risques d’“embrasement” et l’après-17 avril dans “la démarche de changement”. Sans aller jusqu’à affirmer l’existence d’un lien entre les violences qui déchirent la vallée du M’zab et “les problèmes au sommet” de l’État, l’interviewé considère que les émeutes explosent “partout”, qu’elles sont devenues “une caractéristique de l’Algérie presque au quotidien”.
Plus loin, Hamrouche parlera de la volonté du pouvoir d’écarter l’armée du champ politique, dénonçant les “centres et groupes”, qui incarnent les milieux d’affaires maffieux et qui convoitent le pouvoir “sans la surveillance de l’armée et sans partage, par le maintien des lois d’exception”. À propos de la prochaine élection présidentielle, il rappelle que cette échéance comporte un risque et une opportunité, mais il laisse entendre que si l’Algérie rate la voie de la construction d’une vraie démocratie et d’un véritable État de droit, elle sera exposée au risque d’“embrasement des conflits du sommet”. D’ailleurs, relèvera-t-il, le pouvoir actuel “a atteint ses limites, ne peut plus se renouveler et ne peut plus gouverner dans la cohérence et la cohésion”, sans afficher “encore” la volonté à prendre en compte la “forte demande de la société” en termes de rénovation du système politique, d’ouverture et de protection des droits des citoyens. Pis, le système politique actuel “ne peut plus choisir et décider”, rendant réelle la menace contre l’État et le gouvernement “dans leurs fondements”.
Hamrouche reconnaît indirectement que son appel du 17 février a rapproché la Présidence et le DRS, sans toutefois faire cas d’alliance comme le lui suggéraient les journalistes. Il n’empêche, “les conditions objectives” sont réunies pour la chute du système politique, témoigne-t-il, en alertant sur l’impossibilité de construire “un consensus derrière l’armée autour de tel ou tel candidat”.
Plus grave pour l’ex-lieutenant-colonel de l’ANP, c’est que “le lieu de naissance (du candidat du consensus, ndlr) risque à l’avenir de devenir source de problème” et que l’armée “a été forcée de maintenir le statu quo”, compte tenu de “l’apparition, pour la première fois, de divergences sur les choix des candidats”.
“Notre crise (…) est sur le point de devenir insoluble par les moyens pacifiques”, énonce-t-il, sans écarter l’éventualité d’une “nouvelle liste de victimes” en raison de “l’impasse” présente, mais aussi de l’“abstraction du projet national”. Hamrouche exclut d’emblée la question du “pour ou contre une 4e mandature” et s’en tient à l’état des lieux du système politique en place. Justement, il inscrit sa contribution personnelle “en termes de réflexion et d’implication”, dans le cadre de la réforme du système qui, avisera-t-il, doit apporter la “transformation” souhaitée, se traduisant par “une série de réponses et d’actions concrètes”.
En plus clair, Hamrouche offre ses services pour une démarche de changement, “qui ne se fera pas par un retour au passé”, mais qui reste attachée à “la sauvegarde des fondamentaux de notre mouvement de libération nationale” et fidèle à “l’identité algérienne, la sécurité nationale et le projet national, qui consiste en un État de droit et un pays fort dans son économie, une université performante, une école qui produit des élites”. Mouloud Hamrouche a-t-il vraiment tout devisé ? Les jours prochains nous le diront.
H A