Halilhodzic : un bilan largement positif

Halilhodzic : un bilan largement positif

Le 4 juin 2011 à Marrakech, les Marocains, que nous ne remercions jamais assez pour avoir mis à nu les carences criantes d’une équipe moribonde, signent par quatre buts le Waterloo du football algérien, conséquence d’une gestion post Coupe du monde des plus catastrophiques  et d’un parcours, en éliminatoires de la CAN 2012, globalement médiocre.  Tous les feux sont au rouge et la responsabilité d’hommes dont l’incompétence est visible comme le nez rouge sur la face d’un clown est sérieusement engagée. Dans la ville impériale de  Marrakech, notre honneur est bafoué, et cela devient une affaire d’Etat. Un mois après, le 2 juillet 2011, Vahid Halilhodzic est nommé sélectionneur national en remplacement d’Abdelhak Benchikha qui a eu l’extrême délicatesse de rendre le tablier. Le Bosnien s’engage pour trois ans à la tête des Verts, avec deux principaux objectifs : la qualification à la CAN 2013 et au Mondial 2014. Après avoir dirigé le match de la Gambie de vendredi passé,  VH boucle, à deux semaines près, une année sur le banc de l’EN. Les Verts ne reprendront du service qu’en septembre prochain. Une halte s’impose pour faire le bilan d’une année de travail à la tête de la sélection.

A Dar Essalem, son empreinte   était déjà là

Le Bosnien hérite, donc, d’une situation alarmante au lendemain de la débâcle de Marrakech avec des chances quasi nulles pour la qualification à la CAN 2012, même si, mathématiquement, il restait encore une chance. Réaliste et conscient de la situation, Halilhodzic tient un discours complètement différent de celui de son prédécesseur. «Faut plus rêver, nous n’avons aucune chance de passer. Il faut préparer dès maintenant les prochaines échéances», lance-t-il d’emblée. En effet, les dégâts étaient très lourds pour pouvoir les réparer en si peu de temps. N’empêche, il va à Dar Essalem et fait match nul contre la Tanzanie (1-1), avant de battre la République centrafricaine au 5-Juillet (2-0). En deux matchs, il fait mieux que son prédécesseur en quatre matchs. Mieux encore, son empreinte est déjà là. C’est une nouvelle équipe qu’on a vue lors de ces deux rencontres, une équipe conquérante, orientée vers l’avant. Trois buts marqués et un seul encaissé en deux matchs, contre six buts encaissés et un seul inscrit (sur penalty) en quatre matchs pour Benchikha.

8 matchs, 6 victoires, 1 nul et 18 buts marqués

Le bilan chiffré est sans appel. Halilhodzic a dirigé, avant-hier, son huitième match à la tête des Verts, six en compétitions officielles et deux en amical. Bilan : six victoires, un match nul et une défaite qui a, malheureusement, entaché un parcours presque sans faute du Bosnien. Pourquoi l’EN ne gagnait-elle plus avant son arrivée ? VH n’a pas de recette magique. Pour lui, le football est simple. Pour gagner, il faut marquer plus de buts que son adversaire. Et pour ce faire, il faut orienter le jeu de son équipe vers l’avant ; c’est aussi simple que ça. En tout cas, le résultat est accablant. Entre le parcours combiné des deux sélectionneurs qui l’ont précédé, Saâdane et Benchikha, depuis le fameux match d’Oum Dourmane, le contraste est saisissant. En 16 rencontres (12 pour Saâdane et 4 pour Benchikha), les Verts n’ont marqué que 7 buts. En huit matchs sous l’ère Halilhodzic, ils ont réussi à marquer 18 buts, soit presque trois fois plus en deux fois moins de rencontres.

Un seul but encaissé à domicile en un an

Si l’attaque des Verts a été ressuscitée au lendemain de la venue de l’ex-sélectionneur de la Côte d’Ivoire, la défense a  connu à son tour une nette amélioration, même si elle reste le maillon faible de la chaîne, surtout après la retraite internationale d’Antar Yahia, qui a créé un réel déséquilibre derrière. Cinq buts encaissés en huit rencontres alors que l’équipe avait concédé six buts en quatre matchs sous l’ère Benchikha. Ce qu’il y a lieu de souligner, toutefois, c’est que la réalisation gambienne de vendredi passé, signée Gassama, est l’unique but encaissé à domicile en un an. Malgré cela, Halilhodzic est loin d’être satisfait du comportement de sa défense. Récemment, il a même remis en cause le niveau de certains éléments. «Je n’ai pas d’autres solutions», disait-il après la défaite contre le Mali. Il est sûr que c’est le compartiment sur lequel il va se pencher le plus à la rentrée.

Il instaure l’esprit de la gagne

Loin du bilan chiffré, qui est plus que positif, l’état d’esprit au sein de la sélection a changé. On est vite passé d’une équipe déliquescente, sans hargne et sans ambition, et aux prétentions modestes, à un groupe solidaire, plus motivé et plus déterminé, avec un esprit de gagneur. C’est ce que Halilhodzic a essayé d’inculquer en premier lieu à ses joueurs qui, à un moment, avaient perdu toute confiance en eux-mêmes. Le  Bosnien, qui a vu et revu les matchs de l’EN avant qu’il ne prenne officiellement ses fonctions sur son bac, s’est bien rendu compte, au-delà des carences techniques et tactiques, que cette sélection était blessée mentalement et qu’un grand travail psychologique s’imposait. C’est un aspect auquel il va donner une grande importance, et dès le premier match à Dar Essalem, on avait bien l’impression que les choses ont changé. Quelques jours plus tard, le 8 octobre 2011, l’EN bat la RCA au 5-Juillet (2-0), l’équipe qui nous avait malmenés à Bangui. C’était le nouveau départ d’une nouvelle équipe sous une nouvelle ère. Le chantier est lancé.

Ziani et Belhadj écartés, Halliche, Yebda et Meghni laissés sur le quai

Sur le plan effectif, le nouveau sélectionneur va s’attaquer à quelques icônes de la sélection en prenant le risque de se faire taper dessus. Il décide d’écarter Karim Ziani de la sélection avant de faire de même avec Nadir Belhadj. Son message était clair : l’Equipe nationale n’est pas un acquis. Pour avoir décidé d’aller jouer dans les pays du Golfe, les deux joueurs vont payer le prix fort de ce choix. «Qu’ils assument leurs responsabilités», dira le Bosnien, et contre vents et marées, il ne reviendra pas sur sa décision. A vrai dire, Ziani et Belhadj n’entraient plus dans ses plans, et il avait d’autres projets pour son équipe. Ayant entamé son chantier avec un rajeunissement partiel de l’effectif, il n’était plus question de revenir en arrière ; la page est tournée. En même temps, Halliche, Yebda et autre Meghni, tous blessés, seront laissés sur le quai. Pas de sentiment, et celui qui ne joue pas régulièrement avec son équipe ne sera pas appelé en sélection. Le temps où les joueurs convalescents peuplaient l’effectif des Verts est révolu. Un peu plus tard, Ghezzal et Djebour reçoivent à leur tour des signes du sélectionneur : nul n’est indispensable. Le temps a fini par donner raison à Halilhodzic, et les résultats sont là.

Il ressuscite le joueur local

En  décidant de se passer des services de quelques cadres, jusque-là intouchables, Vahid avait bien évidemment d’autres cartes à faire valoir. Une nouvelle génération frappait au portillon et il était temps de lui défricher le terrain et de la responsabiliser davantage. Après Mesbah, qui s’est imposé en défense, il était temps de faire davantage de confiance aux Kadir, Feghouli et autre Boudebouz. Certes, ils ne sont pas encore bien taillés pour prendre les rênes, mais cela ne saurait tarder. Mais la grande nouveauté sous l’ère Halilhodzic est certainement le retour au grand plan du joueur local. Banni sous la houlette de Saâdane, puis méprisé par Benchikha, le joueur local est reconsidéré par Halilhodzic qui lui redonne de l’espoir. A un moment, on a pu dénombrer pas moins de sept joueurs issus du championnat local sur le terrain dans un même match, comme ce fut le cas contre le Niger. Et c’est même le championnat local qui va apporter des solutions en attaque au moment où les grands championnats d’Europe ont été incapables de nous en fournir. Slimani et Soudani (que l’on considère encore comme un produit local), en sont la preuve. En trois matchs, l’attaquant du CRB a réussi à marquer quatre buts dont un doublé face à la Gambie, ce que Djebour et Ghezzal n’ont pu faire en trois ans. De son côté, l’ex-Chélifien en a marqué deux pour ses débuts, et déjà deux passes décisives à son actif. L’autre satisfaction s’appelle Hachoud, en attendant d’autres comme Benmoussa, Belkalem ou autre Benlamri.

Le jeu de l’équi pas encore au point

Sur le plan du jeu, les choses ne  sont pas encore au point, faut-il le dire. L’équipe enchaîne le bon et le moins bon et n’arrive pas à maintenir une certaine régularité. Les  automatismes ne sont pas encore là et des joueurs, sur lesquels Vahid comptait beaucoup, à l’image de Feghouli et de Boudebouz, tardent à s’affirmer. Ils ne sont pas encore en mesure de donner le tempo, mais cela pourrait s’expliquer par le fait qu’ils sortent tous les deux d’une longue saison harassante. Physiquement, ils accusent le coup. Ils seront certainement dans une meilleure forme à la rentrée, et c’est ce que espère le coach national. En attaque, on ne va certainement pas faire la fine bouche. Avec les deux petites merveilles, Slimani et Soudani, ça cogne quand même. Des scores tels que (4-0, 3-0, 4-1), il faut revenir loin en arrière pour trouver une attaque aussi percutante. Si on fait une comparaison avec ce qui se faisait avant l’arrivée du Bosnien, on dira qu’il y a une nette amélioration à ce niveau. L’Algérie joue, désormais, avec un système clair et avec une stratégie bien définie. Son jeu est plus fluide, et on arrive, par moments, à enchaîner plus de dix passes alors qu’il n’y a pas longtemps, on éprouvait les pires difficultés à en faire trois. Ça va plus vite et vers l’avant, mais il reste encore beaucoup à faire.

Rendez-vous en septembre pour le premier objectif

C’est, donc, globalement un bilan positif, avec les témoignages de Mohamed Raouraoua  qui a tenu, vendredi à l’issue du match face à la Gambie, de remercier Vahid Halilhodzic pour le travail qu’il a fait jusque-là. Cela  dit, après une année à la tête de l’EN, aucun objectif n’est encore atteint. Il faudra attendre jusqu’au mois de septembre pour voir si le sélectionneur national pourra atteindre le premier objectif qui lui a été fixé : la qualification à la CAN 2013. Il ne lui reste qu’un seul tour pour l’atteindre, mais cela ne va pas être facile pour autant. Il pourrait, en effet, avoir affaire à un gros calibre du continent. Pour le second objectif, le chemin est encore long. Ce n’est qu’en mars prochain qu’on remettra les crampons.