Guerre d’Algérie, la déchirure,Un traitement sélectif de l’histoire

Guerre d’Algérie, la déchirure,Un traitement sélectif de l’histoire

La télévision française France 2 a diffusé, dans la soirée de dimanche un long documentaire sur la Guerre d’Algérie suivi d’un débat en direct sur le plateau de la chaîne publique. Le documentaire, intitulé Guerre d’Algérie, la déchirure, et interdit aux moins de 10 ans, a été réalisé par Gabriel Le Bomin avec l’historien Benjamin Stora.

Le “film”, annoncé en grande pompes, a surtout traité des difficultés des politiciens français à faire face à la révolution nationale. Sur un ton docte et emprunté, qui se voulait neutre, il s’est surtout agi, à peu de frais, d’une catharsis franco-française. Même dans ce documentaire, l’algérien, rarement désigné avec cette appelation identitaire, a encore une fois été un objet, destiné à soutenir la démonstration qui a toujours été en filigrane.

Il a été plus question des diverses successions des hommes au pouvoir en France et des responsables nommés en Algérie et leur incapacité de gérer la question de la révolution armée que la France considérait comme une jacquerie sans lendemain, confinée d’ailleurs tout au long du documentaire à une petite insurrection limitée à une certaine région. Les différends de la classe politique française sur cette question étaient largement mis en relief dans le documentaire, lequel s’est permis des petites vérités mais aussi un traitement très sélectif des événements à montrer.

Si le réalisateur a laissé passer certaines scènes de tueries de “musulmans” isolés sans défense, tués à bout portant par des soldats, il a aussi occulté plusieurs vérités en stigmatisant le mission réelle des combattants de l’ALN, en montrant leurs actions les plus «violentes», comme les attentats à la bombe durant la Bataille d’Alger ou le massacre de Melouza, mais à aucun moment il n’a voulu mettre en avant les massacres de civils algériens, les ratonnades, les bombardements au napalm ou encore l’assassinat et la torture des militants du FLN durant la guerre.

Un traitement qui a accordé de longs développements larmoyants sur une population européenne prise en étau par la violence des “rebelles” et la “riposte” de l’armée française. Car c’est là la substance de ce documentaire, mettre sur le même pied ‘loccupant et l’occcupé, le bourreau et la victime, chose que du reste, l’animateur s’est obstiné à rappeler dans chacune de ses fausses orientations du débat.

Car il ya eu débat, avec un historien qui avance sans la rigueur du chercheur des assertions indémonstrables, et des parallèles injustifiés, et une fille de harki qui a renvoyé la France à sa propre histoire, car si les harkis ont trahi leur patrie, c’est la France qui les a trahis en prime de leur engagement.

Un ancien soldat du contingent et curé a donné un coup de pied dans la foumillière en racontant les atrocités qu’il a vues, tandis qu’une victime de l’attentat du milk-bar, pudique et émouvante, a refusé que son témoignage soit instrumentalisé. Ali Haroun, esseulé sur ce plateau, résume l’esprit qui a présidé à cette émission. Le rapport de force, sur le plateau, comme sur le terrain que racontait le documentaire, a bacsulé en sa faveur, car ses mots justes, vrais et vérifiables, étaient ceux de la justice, comme était juste révolution qui a triomphé de la nuit coloniale et de l’oppression.

Si le documentaire avait été muet, et même si les images ont du être méticuleusement sélectionnées, elles mettent à nu la violence d’enfants innocents, terrorisés, levant les mains dans un covoi d’adultes, alors que côté français, on présente par deux fois Maurice Papon comme cateur central des “événements” qui n’ont été qualifiés de guerre qu’en 1999. Voilà la substance, et les déclarations de foi de certains auront un fond de sincérité lorsque la France assumera son passé, et ne continuera plus à considérer l’Algérie comme un trésor qui lui a été ravi par “des bandes, groupes, fellaghas”…

M. Z.