Guendouz à Beur TV : «Dans le monde, les entraîneurs sont d’anciens footballeurs, mais pas en Algérie»

Guendouz à Beur TV : «Dans le monde, les entraîneurs sont d’anciens footballeurs, mais pas en Algérie»

Beur TV, qui s’est lancé le défi de conquérir le marché algérien, a initié une nouvelle émission spécialisée en football intitulée «La 3e mi-temps». Animée par notre confrère Hammou Bellahmar, assisté de deux consultants qui sont les anciens internationaux Nacer Bouiche et Hadj Adlane, elle se propose d’accueillir chaque semaine un ou plusieurs invités venus de tous horizons afin de traiter divers sujets de l’actualité footballistique.

Pour la première émission, qui a été diffusée cette semaine, l’un des invités a été Mahmoud Guendouz, connu pour son franc-parler. Il en a fait étalage à nouveau, notamment lorsqu’il a expliqué pourquoi son constat sur la sélection nationale allait à contre-courant de l’opinion publique nationale durant la campagne pour la Coupe du monde 2010 : «Un ami m’avait appelé pour me dire que je parlais dans un sens et que l’Algérie allait dans l’autre sens. Je lui ai dit que je parlais dans le sens de ce qui se fait à l’échelle internationale dans le monde du football. En France, les 20 entraîneurs de clubs sont d’anciens footballeurs. En Italie, c’est la même chose. Voilà comment ça se passe dans le monde. En Algérie, ce n’est pas le cas. Donc, ici, ça ne marche pas comme ailleurs dans le monde.»

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5 choses qui ne tournent pas rond dans notre «professionnalisme»

C’est fou de voir comment le vocable «professionnalisme» est galvaudé dans ce qui est convenu d’appeler le monde du football. Il n’y a qu’à voir avec quelle «extase» le lancement du championnat algérien dit professionnel a été lancé et loué pour se rendre compte qu’il y a forcément quelque chose qui ne tourne pas rond. Pourtant, beaucoup d’indices, pour ne pas dire tous les indices, tendent à accréditer l’idée qu’on est encore loin des normes internationale du vrai professionnalisme. Il serait fastidieux d’énumérer tous les facteurs qui font que le football algérien est encore loin d’être professionnel, mais 5 d’entre eux sont flagrants.

Aucun terrain «civil» potable dans la capitale

Bienvenue au pays où il n’y a pas de stade dans la capitale dotée d’une pelouse correcte ! Le constat amer a été fait par le nouveau sélectionneur, Vahid Halilhdozic, qui avait qualifié la pelouse du stade de Rouiba comme étant «en congé» comme le préposé à son entretien. Durant le stage préparation pour le match face à la Tanzanie, les Verts ont été obligés de s’entraîneur sur le terrain gazonné d’une caserne militaire faute d’avoir trouvé un terrain «civil» en bon état. Encore heureux qu’il y ait le terrain de Beni Messous car, autrement, la sélection se serait payé des allers-retours quotidiens vers Blida pour s’entraîneur sur le terrain du stade Mustapha-Tchaker. Là, on parle de la sélection nationale uniquement. Que dire alors d’un club, avec ses différentes catégories, qui partage un terrain avec d’autres clubs ?

Des clubs «professionnels» sans attachés de presse

Les détracteurs de tout poil ont beau jeu d’accuser les médias et leurs représentants de rapporter des informations supposées erronées ou non sources. La critique est aisée, c’est l’art qui est difficile. C’est tout un art, en effet, de parvenir à vérifier et recouper des informations sur un club qui n’a pas de canaux officiels de communication. Des clubs se permettent de critiquer les médias alors qu’ils ne daignent même pas désigner des attachés de presse habilités pour faire office d’interlocuteurs. Seule l’USM Alger possède un attaché de presse mandaté pour répondre aux sollicitations et questions des journalistes. Pour les autres clubs «professionnels», seul le big boss local est considéré comme source officielle. Encore faut-il qu’il daigne parler…

Des présidents qui recrutent à la place des entraîneurs

Dans tous les clubs professionnels qui se respectent, c’est l’entraîneur qui arrête le plan de recrutement, en coordination avec la direction sportive du club. En Algérie, ce sont les présidents qui recrutent les joueurs, réduisant les entraîneurs aux rôles d’animateurs techniques. Il est vrai que dans un championnat où la «ch’kara» (sac d’argent, ndlr) reste encore le mode de paiement le mieux prisé, officieusement parlant, il n’est pas étonnant que les présidents de club soient aussi des DTS, si ce n’est pas des entraîneurs de fait. Dans les grands championnats professionnels dans le monde, on connaît les entraîneurs plutôt que les présidents. Chez nous, ce sont les présidents qui sont les stars. Comme quoi, qu’importe la vérité du terrain, tout est dans le paraître…

La FAF, seule fédération sans DTN

Alors que les pays sont censés avancer, c’est la marche arrière qui prévaut dans le football algérien. Depuis plusieurs années, il n’y a pas de Directeur technique national, encore moins de Direction technique nationale (DTN). Actuellement, Boualem Laroum, qui fait un excellent travail dans la formation des entraîneurs, se voit confier la fonction empoisonnée de DTN par intérim. C’est comme si le football chez nous fonctionnait sans planification, sans schéma évolutif et sans fil conducteur. Si le football algérien a eu, dans les années 80, une équipe qui avait atteint les sommets, c’est parce qu’elle s’est construite sur la durée, à partir des jeunes catégories, suivant un travail planifié par la direction du football à l’époque. A présent, on se retrouve à naviguer à vue, avec des sélections qui percent sporadiquement avant de disparaître de la circulation, comme c’est le cas de la sélection U17 vice-championne d’Afrique il y a deux ans. Aucune fédération de football au monde ne fonctionne sans une DTN, sauf la FAF. Les claques à 5-0, 4-0, 3-0, 2-0 en club comme en sélection ne sont pas tout à fait le fruit du hasard.

Des joueurs locaux «figurants» en sélection

Comment on parle de professionnalisme dans un pays dont la sélection nationale compte juste quelques «figurants» comme joueurs locaux ? Non pas que les professionnels évoluant à l’étranger ne soient pas méritants ou soient moins algériens que ceux évoluant en Algérie, mais il est clair que l’absence du produit local de la sélection est révélateur de sa faible qualité. Le problème n’est pas dans l’absence de talents – il y en a toujours eu en Algérie et il y en aura toujours -, mais dans la formation des talents et leur «modelage» pour les transformer de bons tripoteurs de ballon en excellents footballeurs. Quand on a des présidents qui font entraîner leurs équipes de jeunes sur des terrains anonymes et à des heures impossibles et ne «découvrent» leurs joueurs qu’une fois que ces derniers sont en seniors, il y a très peu à espérer du football local. Lorsque, de surcroît, des jeunes prometteurs sont bloqués en Algérie au lieu d’être envoyés faire exploser leur talent en Europe ou réduits, comme c’est le cas de Abdelmalik Ziaya et Lazhar Hadj Aïssa, à jouer aux chasseurs de primes quitte à s’enterrer à un jeune âge dans les pays du Golfe, c’est à désespérer d’un «professionnalisme» qui nous fait amèrement regretter l’amateurisme avéré et assumé, mais tellement fructueux des années 80.