Alors que la grippe porcine ne cesse de faire des ravages en se propageant à une allure vertigineuse, les autorités religieuses de certains pays campent sur leurs positions en maintenant les rites de la Omra et du Hadj.
L’Arabie Saoudite, pays hôte des pèlerins, a tenu à rassurer les centaines de milliers de musulmans attendus fin novembre à La Mecque.
Cela se fait, paradoxalement, au moment où le virus H1N1 de la grippe porcine a tué 26 personnes dans ce pays et en a contaminé des centaines.
L’Algérie maintient ces rites religieux et considère comme une injustice toute restriction des voyages aux Lieux Saints de l’Islam.
Selon les responsables du secteur de la santé, l’Algérie attend une décision de l’Organisation de la Conférence islamique (OCI) pour pouvoir se prononcer en faveur ou non d’une interdiction du cinquième pilier de l’Islam.
Les observateurs de la scène politique algérienne perçoivent cela comme un manque de courage politique à prendre une décision qui revient, en principe, aux spécialistes de la santé.
Cela au moment, également, où beaucoup de pays musulmans abordent la question avec une prudence prononcée et un certain scepticisme.
Ainsi, l’Egypte a mis en garde ses ressortissants sur une possible interdiction du Hadj pour cette saison.
Dans une déclaration faite récemment par Hatem Al-Jabali, ministre égyptien de la Santé, dans le quotidien gouvernemental Al-Ahram, «une décision pourrait être prise à tout moment pour interdire le Hadj cette année».
Un dignitaire religieux égyptien, Mahmoud Achour, a aussi rappelé cette semaine que le Hadj avait été interdit aux Egyptiens en 1947 en raison d’une épidémie de choléra.
La Tunisie, de son côté, après avoir interdit la Omra, a invité les fidèles à «faire preuve de raison et de responsabilité avant de prendre une décision définitive, et de reporter à l’année prochaine l’accomplissement du rite du pèlerinage».
D’autres pays encore, non moins musulmans, tels que l’Iran, l’Irak, la Syrie et la Jordanie, ont émis des restrictions sur les voyages vers La Mecque et Médine.
Ils ont même interdit le Hadj et la Omra aux malades chroniques, aux femmes enceintes, aux personnes de moins de 12 ans et à celles de plus de 65 ans.
A contrario, les scientifiques ont observé que la majorité des cas mortels de grippe porcine ont surtout concerné des personnes jeunes et bien portantes.
Selon les spécialistes de la santé, cela s’explique. En effet, les personnes âgées et les malades chroniques sont soumis chaque année à une vaccination obligatoire contre les virus de la grippe saisonnière, ce qui implique que leur système immunitaire est déjà considérablement renforcé.
Dans ce décor de doute et de panique, les autorités saoudiennes se déclarent confiantes quant à leurs capacités à accueillir les pèlerins pour le Hadj, qui réunit chaque année entre trois et quatre millions de fidèles venus toutes les régions du globe.
Leur logique est des plus déroutantes. Jugez-en. Selon le Comité saoudien pour les maladies contagieuses, «aucun décès n’a été enregistré parmi les fidèles ayant effectué la Omra depuis le début du mois de Ramadhan». A croire qu’il faut des morts pour décréter une interdiction du Hadj.
Dans un communiqué publié mardi à Ryad, le Comité a usé de la langue de bois en annonçant que «tous les malades parmi les fidèles et les visiteurs sont guéris, ce qui confirme l’absence de pandémie», et d’ajouter que la situation est totalement rassurante.
Entre-temps, la grippe A/H1N1 continue à faire des victimes dans les monarchies voisines du Golfe.
Oman a annoncé mardi deux nouveaux cas mortels, portant ainsi à 18 le nombre de décès dans ce pays.
Au total, 61 personnes sont décédées des suites de cette grippe dans les six monarchies du Golfe, à savoir les Emirats arabes unis, l’Arabie Saoudite, le Qatar, Oman, le Koweït et Bahreïn, qui comptent quelque 36 millions d’habitants, en majorité des étrangers.
Par ailleurs, rappelons que le dernier bilan de l’OMS, rendu public vendredi dernier, a fait état du décès d’au moins 3 205 personnes des suites de la grippe porcine.
Meriam SADAT