Grèves, marches, mésententes politiques et menaces sécuritaires, Le malaise

Grèves, marches, mésententes politiques et menaces sécuritaires, Le malaise

Les ingrédients d’une forte perturbation sociale sont perceptibles

Aussi bien sur le plan social, politique, économique que sécuritaire, les signaux ne sont pas au vert.

L’entame de l’année 2015 n’est pas de tout repos pour l’Algérie. A la veille de la date historique du 24 février, la situation est explosive sur tous les plans. Les ingrédients d’une forte perturbation sociale sont perceptibles et prennent de l’ampleur chaque jour. Aussi bien sur le plan social, politique, économique que sécuritaire, les signaux ne sont pas au vert. Sur le plan social, plusieurs grèves s’annoncent, notamment dans le secteur de l’éducation qui est préjudiciable non seulement pour l’école mais pour toute la société. Après l’échec des négociations avec la tutelle, l’Intersyndicale, composée de sept syndicats, a décidé de reconduire ses mouvements de grève cyclique. Les écoles, tous cycles confondus, seront paralysées les 9, 10 et 11 mars prochain. La grève est reconductible les lundi, mardi et mercredi de chaque semaine.

Imaginons quelle sera la situation, si à la veille des examens du bac, les lycéens, exaspérés avec des retards de plusieurs semaines sur les programmes, décideraient de descendre dans la rue pour manifester leur colère. Le mouvement n’échappera certainement pas à la manipulation et le risque de dérapage sera grand. La situation est d’autant plus grave que le pouvoir ne peut plus se permettre l’achat de la paix sociale en raison de la chute drastique des prix du pétrole qui a eu des effets foudroyants sur le gouvernement.

Le constat devient plus accablant si l’on ajoute la contestation contre le gaz de schiste au sud du pays et les risques de dérapage qu’elle fait peser. En effet, la décision de l’Exécutif d’exploiter cette ressource énergétique non conventionnelle, avec le recours obligatoire à la technique de fracture hydraulique, a soulevé toute la population du Sud, mettant le gouvernement dans une véritable impasse. Depuis début janvier, la population de In Salah, à l’extrême sud de Tamanrasset, et d’autres villes du Sud, n’ont cessé de dénoncer la décision, exigeant l’arrêt immédiat des travaux de forage. Des marches, rassemblements et autres formes de protestation font le quotidien des population du Sud.

Pouvoir-opposition: le face-à-face

Cela a débouché sur une crise sur le plan politique. Nous assistons présentement à une véritable confrontation sur le terrain entre le pouvoir, à travers ses partis, et l’opposition. Cette confrontation sera matérialisée demain, 24 février, anniversaire de la nationalisation des hydrocarbures. Les partis de l’opposition, structurés autour de l’Instance de suivi et de concertation, qui regroupe les membres de la Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique (Cnltd) et le Pôle des forces de changement, ont appelé à des manifestations dans les 48 wilayas du pays. Objectif apparent: protester contre l’exploitation du gaz de schiste et soutenir les populations du Sud. Mais en réalité, ces partis cherchent à faire une démonstration de force dans l’espoir d’amener le pouvoir à négocier une issue à la crise. Pour contrer ces manifestations, les partis au pouvoir ont accusé l’opposition de vouloir semer le chaos et le désordre. Du FLN jusqu’au TAJ, en passant par le RND et le MPA et des partis qui rôdent dans la périphérie du pouvoir, et même le FFS, ont accusé l’opposition de vouloir instrumentaliser la date du 24 février pour déstabiliser le pays. Les partisans des manifestations ont été dès lors qualifiés d’aventuriers. Ils préparent la riposte en invitant les citoyens à ne pas répondre aux appels de l’opposition et en organisant des contre-manifestations.

Le fait d’en arriver là veut dire que tout le processus et les initiatives politiques ont échoué. Le projet du pouvoir (révision de la Constitution) est catégoriquement rejeté par l’opposition, celui de la Cnltd (transition démocratique) est complètement stigmatisé par le pouvoir. L’initiative du FFS (consensus national) qui veut jouer le rôle de facilitateur entre les deux est rejetée par les uns, conjuguée au conditionnel par les autres. Quelle issue?

La menace des frontières

Certains observateurs redoutent les conséquences des actions de demain qui risquent de marquer une rupture définitive entre le pouvoir et l’opposition. Le risque de dérapage n’est pas exclu, surtout si l’opposition réussit le coup de la mobilisation et que le pouvoir recourt, comme à son habitude, à la répression. Sur le plan sécuritaire, la situation n’est guère reluisante. La menace vient des frontières avec cette ceinture explosive qui entoure l’Algérie sur ses frontières Sud-Est et Sud. La Libye est devenue un véritable champ de terrorisme, y compris des éléments de Daesh qui constituent un danger pour le pays. Pour s’en prémunir, l’Algérie déploie à la fois des efforts diplomatiques, en cherchant une sortie politique négociée entre les différentes parties en Libye, et sécuritaires en renforçant le dispositif au niveau des frontières. Devant les folles informations qui ont circulé à propos des conséquences de la guerre en Libye sur l’Algérie, et les probables incursions terroristes, l’APN a rassuré quant à la sécurisation totale des frontières du pays. Le danger venant du nord du Mali où pullulent les groupes terroristes est aussi à prendre au sérieux. Consciente que la sécurité intérieure commence par la sécurité des pays voisins, Alger a mené une médiation entre le gouvernement malien et les groupes armés du Nord. Cette médiation a abouti à la signature d’une déclaration de paix. L’armée agit également sur le terrain pour sécuriser la bande frontalière.