Même le service minimum risque de ne pas être assuré, si la tutelle ne daigne pas le demander aux praticiens comme le stipule la réglementation.
Les citoyens n’ayant pas de quoi payer des soins chez le privé seront réduits à mendier ou mourir en silence. A partir de demain, les infrastructures de la santé publique seront toutes bloquées. Même le service minimum risque de ne pas être assuré, si la tutelle ne daigne pas le demander aux praticiens comme le stipule la réglementation. Depuis plusieurs semaines, des milliers de malades ne savent plus à quel saint se vouer.
La grève des médecins résidents n’ayant pas encore pris fin, voilà que les praticiens généralistes et les spécialistes entameront une grève illimitée. Sans exagération aucune, plusieurs citoyens sont pris de panique et se disent pris en otage, dans cet interminable conflit, opposant le département de Djamel Ould Abbès aux syndicats autonomes de la santé.
«Je devrais me faire opérer d’une hernie discale en urgence, mais suite aux perturbations du service, je suis obligé de m’orienter vers le privé» raconte un patient. «Une clinique de la capitale m’a demandé 65 000 DA, sincèrement je ne dispose pas de cette somme…» se plaint cet employé d’une société privée. Des milliers de cas similaires devraient exister à travers le territoire national. Au grand bonheur des patrons des cliniques privés, qui semblent seuls gagnants de ce bras de fer. Unanime, un groupe de citoyens rencontré hier dans une polyclinique du centre d’Alger a soutenu que «lorsque les hôpitaux fonctionnent d’une manière ordinaire, les prestations étaient déjà mauvaises et les services saturés», avec ces mouvements de grève «la situation s’annonce catastrophique» se désole-t-il. Nos interlocuteurs soutiennent par ailleurs qu’ils ne comprennent rien au jeu du chat et de la souris que se livrent la tutelle et les travailleurs. «C’est scandaleux, aussitôt le ministre a annoncé triomphalement des augmentations conséquentes des salaires, les médecins rétorquent et dénoncent le mensonge, je ne comprends rien à tout ça…» s’exclame un autre citoyen. Mais ce qui intéresse les malades, plutôt désarçonnés par tant de grèves, est de pouvoir accéder à des soins de bonne qualité, dans des délais acceptables. Hélas, ce qui n’est plus le cas et risque de ne pas l’être indéfiniment
. En fait, faut-il rappeler que la grève des résidents a sérieusement perturbé les hôpitaux et le service minimum assuré n’a pas été en mesure de réponde aux flux des malades. L’entrée en scène des praticiens spécialistes signera l’arrêt des soins chez le public et le risque de voir des milliers de rendez-vous et d’interventions chirurgicales reportées sine die. Les praticiens justifient leur décision d’aller vers une grève illimitée par l’absence de mesures «concrètes» susceptibles de satisfaire leurs revendications.
Alors que le ministère, lui, déclare qu’il tient toujours au dialogue et à la concertation avec le partenaire social, comme moyen de règlement des problèmes. Des problèmes qui n’ont que trop duré ! En fait, bizarrement, c’est une grande partie du personnel de la santé, tous corps confondus, qui se trouve simultanément en grève. Ce qui renseigne sur la gestion hasardeuse du secteur.
Par Aomar Fekrache