Les usagers « excédés » se demandent pourquoi les grévistes n’ont pas assuré le service minimum, comme cela se passe partout ailleurs
«Ce n’est pas normal qu’une fois de plus, on prenne les voyageurs en otage, une situation dans laquelle nous n’avons rien à y voir », déclare des étudiants rencontrés hier sur les quais de la gare centrale d’Alger, excédés de n’avoir pu, depuis trois jours, rejoindre les bancs des universités et instituts de Bab Ezzouar et de Boumerdès.
Des étudiants qui ne comprennent pas par ailleurs qu’aucun service minimum n’est assuré, comme cela se passe partout dans les autres pays. Et ce ne sont pas les seuls, puisque des centaines de travailleurs de la zone industrielle de Rouiba et des environs, sans compter les voyageurs qui devaient se rendre tant aux villes de l’Est que de l’Ouest, se retrouvent coincés, pour la quatrième journée consécutive, sans avoir d’autre choix que d’attendre, ou bien sûr, se rabattre sur d’autres moyens de déplacement. Conséquence : routes et autoroutes sont depuis quelques jours submergées par un trafic routier sans précédent, occasionnant des heures d’attente. Pour leur part, les représentants du syndicat des cheminots n’en démordent pas. « Nous maintenons notre mouvement de grève. Aucun train ne bougera. Il n’est pas question de s’arrêter à mi-chemin, jusqu’à ce que notre revendication soit satisfaite, à savoir l’obtention d’un rappel d’une augmentation de salaires octroyée en septembre 2009 », ne cesse de tonner le représentant des travailleurs, M. Abdelhak Benmansour. A la question de savoir pourquoi un service minimum n’avait pas été assuré, le syndicaliste a précisé que même la « paralysie totale » n’a pas fait bouger la situation, « alors vous imaginez, si l’on avait laissé un train sur trois, les négociations prendraient des semaines, voire des mois », a-t-il clamé. Il a ajouté que le mouvement de protestation s’est élargi jusqu’aux régions de l’est et de l’ouest où les travailleurs « ont décidé de se joindre à notre juste cause ». En effet, en plus de tout l’axe qui mène jusqu’à l’Oranie, toutes les gares ferroviaires, de Souk-Ahras jusqu’à Constantine en passant par Tébessa et les mines de phosphate de Djebel Onk et de fer de Boukhadra et de Ouenza, sont à l’arrêt depuis mardi, ce qui a débouché sur la suspension des approvisionnements en phosphate de la société Fertial, et en minerai de fer du complexe sidérurgique El-Hadjar. L’acheminement par train d’autres produits miniers destinés à l’exportation via le port d’Annaba est également suspendu. Il y a lieu de rappeler que les travailleurs de la SNTF ont entamé depuis dimanche une grève « illimitée » suite au refus de la direction générale de répondre favorablement à leur doléance portant rappel, déposée le 4 octobre dernier.
Parti d’Alger, le mouvement de protestation a gagné l’est et l’ouest du pays. « La grève est maintenant suivie à l’est et à l’ouest du pays. Les taux de suivi enregistrés atteignent parfois 100 % », a expliqué M. Hamadache, responsable syndical au dépôt d’Alger, joint au téléphone. Les cheminots réclament, notamment le versement des rappels de salaires depuis 2009. De son côté, le directeur des ressources humaines (DRH) de la SNTF, Noureddine Dakhli, a déclaré que la direction générale avait négocié, début 2011, différentes plates-formes de revendications qui ont abouti, par la suite, à un protocole d’accord signé entre la direction générale et la Fédération nationale des cheminots, le 16 juin 2011. Il s’agissait d’une « augmentation de salaires de 5% avec un rappel à partir de janvier 2011 ». « Cependant, la direction générale a été surprise, le 3 octobre, par une autre revendication exigeant un rappel non pas depuis janvier 2011, mais de septembre 2009 », a-t-il relevé. Il évoque dans ce contexte les problèmes financiers de l’entreprise qui l’empêchent d’accéder à la requête des grévistes. Justificatif qui n’a apparemment pas convaincu les cheminots. M. Dakhli a toutefois indiqué que des négociations ont toujours lieu avec la Fédération nationale des cheminots pour parvenir à un accord avant la fin de la semaine.

Amel Z.
Sérieuses perturbations à l’Est
Circonscrit au début de l’appel du syndicat au Centre et à l’Ouest, le mouvement de grève des cheminots a fait tache d’huile à l’Est où la grande majorité des travailleurs a souscrit au mot d’ordre. Ce sont toutes les lignes, commerciales et minières, qui sont paralysées, causant l’arrêt de l’approvisionnement, notamment le complexe sidérurgique d’El-Hadjar. Les perturbations sont d’autant plus pesantes que les produits transportés par le biais de la ligne Tébessa-Annaba sont estimés à1,5 million de tonnes par an de phosphate et de 4,5 tonnes/an de minerai de fer. Forte de 340 km, la ligne Djebel Onk transporte à elle seule 55% du volume transporté par le réseau SNTF. Le minerai de fer est transporté depuis le gisement sur une distance de 120 km par des trains de 25 wagons de 60 tonnes chacun à raison de 5 voyages/jour.
S. L.