Conçue pour être une oeuvre historique symbolisant et marquant notre époque, le projet de la Grande Mosquée d’Alger devient un objet de polémique à cause du choix du terrain d’assiette, de son implantation et des experts.
La dernière déclaration du ministre des Affaires religieuses, Bouabdallah Ghlamallah, selon laquelle l’Algérie «a fait appel à des spécialistes issus de pays à forte activité sismique, notamment du Japon et des Etats-Unis», a soulevé l’ire des architectes et experts algériens.
«Des personnes qui ne sont pas habilitées s’expriment sur le choix du terrain, alors que nous avons fait appel à des spécialistes issus de pays à forte activité sismique, notamment du Japon et des Etats-Unis (Los Angeles), qui ont tous conclu que la qualité du sol est tout à fait appropriée et sa résistance formidable», a indiqué le ministre le 26 août dernier lors de l’entame du coulage de béton des fondations de la Grande Mosquée d’Alger, une surface initiale représentant 800 m2 pour 1000 m3 de béton.
Cette déclaration n’a pas été du goût des spécialistes algériens. Abdelhamid Boudaoud, président du Collège national des experts architectes, voit en cette déclaration une «exclusion, un mépris et un manque de confiance en les experts algériens». «L’Algérie construit des universités et forme des experts et spécialistes depuis 1962.
Cette attitude de ne pas les impliquer dans ce projet veut dire qu’ils doutent des compétences des enfants du pays», déplore notre interlocuteur, souhaitant l’implication des compétences algériennes dans ce genre de projet, ne serait-ce que par respect à l’Université algérienne. M.Boudaoud a indiqué qu’il y a une assiette plus apte à abriter le projet, située à Bordj El Bahri. «Un terrain qui est antisismique», a-t-il précisé.
Sauf qu’une volonté politique a voulu que le projet soit implanté dans la commune de Mohammadia, à quelques encablures de la mer, ce qui a fait dire à certains observateurs que le projet sera érigé sur un terrain marécageux.
Mais le problème n’est pas là, puisque, explique notre interlocuteur, il y a des prouesses techniques pour faire face à cette situation. Il insiste pour dénoncer cette politique consistant à écraser les techniciens algériens, sous-estimés dans leur pays et regrettés une fois qu’ils font des miracles à l’étranger.
M.Boudaoud regrette, en outre, qu’aucun architecte ou expert algérien n’ait assisté à l’entame du coulage de béton des fondations. Ont assisté à la cérémonie le ministre des Affaires religieuses, l’ambassadeur de Chine à Alger, le directeur général de l’Agence nationale de réalisation de la Grande Mosquée d’Alger (Anagerma) et le P-DG de la société adjoint chinoise publique de réalisation de la Grande Mosquée d’Alger «China State Construction Engineering Corporation» (Cscec).
A cette occasion, le ministre a fait aussi savoir que «même si un séisme de 9 sur l’échelle de Richter survenait, la construction ne subirait le choc que d’un niveau 3 sur la même échelle, grâce à un système parasismique».
Une affirmation qualifiée par les spécialistes de «ridicule» et assimilée à de la «fiction dans un pays soumis régulièrement, en l’occurrence, à au moins 10 risques majeurs sur les 14 identifiés par l’ONU à travers le monde».
Karim Aimeur