Le roi de Bahreïn, Hamad bin Issa Al-Khalifa, reste inflexible et refuse tout geste d’apaisement envers l’opposition chiite
Le pouvoir bahreïni est resté inflexible après le GP de Bahreïn et oppose un «niet» à toutes les revendications de l’opposition.
Les opposants chiites de Bahreïn ont profité du Grand Prix de Formule 1 pour attirer l’attention sur leurs demandes de réformes politiques, mais les autorités n’ont montré aucun signe de flexibilité. La course, qui s’est tenue dimanche entourée d’importantes mesures de sécurité et marquée en marge par des manifestations parfois violentes, a été présentée par les autorités comme le signe d’un retour de la confiance au niveau international en Bahreïn. Le Conseil des ministres de ce petit royaume du Golfe peuplé en majorité de chiites et gouverné par une dynastie sunnite a ainsi souligné dimanche, dans un communiqué, que «la tenue du GP reflète la confiance au niveau international en la capacité de Bahreïn d’organiser un évènement de dimension mondiale». Les opposants chiites, qui réclament depuis plus d’un an une véritable monarchie constitutionnelle où le Premier ministre serait choisi parmi les élus de la majorité, ont multiplié les manifestations avant le Grand Prix. «Les jeunes du 14 février» et d’autres manifestants plus radicaux que le principal mouvement chiite du Wefaq, ont organisé «trois jours de colère» coïncidant avec ceux de la course, qui ont été marqués par des violences. Des incidents, avec des routes barrées avec des pneus enflammés, des jets de cocktails Molotov sur les forces de l’ordre et une tentative d’occuper à nouveau la Place de la perle, épicentre de la contestation en 2011, ont émaillé le week-end. Les autorités, nerveuses, ont refusé des visas à plusieurs journalistes et empêché ceux qui cherchaient le contact avec les manifestants de le faire. Ainsi, un journaliste de la chaîne britannique Channel 4 News a été brièvement arrêté dimanche, avec son équipe pendant qu’ils réalisaient un reportage dans un village de Bahreïn. Sur le circuit de Sakhir, au sud de Manama, au moins trois femmes ont été interpellées, selon l’opposition, alors qu’elles tentaient de manifester en faveur d’un militant chiite emprisonné et en grève de la faim. Le roi de Bahreïn, Hamad ben Issa Al-Khalifa, s’est certes dit déterminé à aller de l’avant dans les réformes à l’occasion du Grand prix mais tous les appels en faveur d’une libération de l’opposant en grève, Abdel Hadi al-Khawaja sont restés vains. La Cour de cassation devait statuer hier sur sa condamnation à perpétuité pour complot ainsi que sur les cas de vingt autres opposants condamnés à diverses peines de prison. Elle a repoussé l’examen de l’affaire au 30 avril. Dimanche, le parquet de Manama avait affirmé que M.Khawaja, en grève de la faim depuis le 8 février, était «en bonne santé», assurant qu’il était pris en en charge à l’hôpital militaire et suivi par des médecins.
M.Khawaja, qui est également citoyen danois, a reçu dimanche la visite de l’ambassadeur du Danemark, selon la même source. Mais son épouse, Khadija al-Moussawi, a affirmé dimanche à l’AFP qu’il ne buvait plus d’eau «depuis vendredi soir», et qu’il s’exprimait «avec lenteur» et d’une «voix faible» lors d’une conversation téléphonique samedi.
Pour l’analyste Salman Shaikh, directeur de l’institut Brookings de Doha, le Grand prix a été voulu comme le signe d’une normalisation mais a accentué les divisions à Bahreïn. «La situation peut empirer», a-t-il estimé, soulignant la nécessité de «reprendre les efforts pour une solution politique» de la crise dans ce pays.
Selon une commission indépendante, la répression de la révolte en février/mars 2011 avait fait 35 morts, dont quatre sous la torture. Amnesty International estime pour sa part que 60 personnes ont été tuées depuis le début du mouvement.