Gouvernance des entreprises publiques, Les experts relèvent l’enchevêtrement des prérogatives

Gouvernance des entreprises publiques, Les experts relèvent l’enchevêtrement des prérogatives

En 2009, le Forum des chefs d’entreprises(FCE), l’Association des producteurs algériens de boissons (APAB) et le Cercle d’action et de réflexion autour de l’entreprise (CARE) avec le parrainage de ce qui était à l’époque le ministère de la Promotion des investissements, ont élaboré un code de bonne gouvernance pour l’Algérie (GOAL). Un code auquel les entreprises privées devaient y adhérer, partant du postulat que seule la bonne gouvernance pouvait apporter de la valeur à l’entreprise.

Cette bonne gouvernance s’avère aujourd’hui d’une actualité brûlante, mais elle devrait aussi être généralisée aux entreprises publiques. Cette fois-ci en partant du principe que les EPE détiennent des infrastructures et un patrimoine considérable, qui est la propriété de la collectivité. Par conséquent, il s’agit de trouver les outils pour créer les conditions de création de la valeur pour ces entités et non pas les détruire. Ce d’autant que la politique de privatisation a totalement échoué, de l’aveu même du chef de l’Etat dans l’un de ses discours en 2008 en raison de l’absence de rationalisation.

C’est de cette gouvernance qu’il s’agit aujourd’hui dans les matinales qu’organise régulièrement le Cercle d’action et de réflexion autour de l’entreprise (CARE) qui avait pour thème « la gouvernance des entreprises publiques dans le contexte du développement du marché financier en Algérie. » Un thème qui a suscité un engouement, quasiment jamais égalé dans les matinales de CARE, de la part d’hommes d’affaires, de chefs d’entreprises publiques et privées, mais aussi d’enseignants universitaires et autres consultants.

Une thématique qui a été débattue sur la base des recommandations de l’OCDE, dont l’Algérie est membre associé qui se déclinent en six sections. Dont la garantie d’un cadre juridique et règlementaire efficace pour les entreprises publiques économiques qui les protège et assure les conditions de la concurrence entre le public et le privé, la définition du rôle de l’Etat actionnaire actif qui détermine une stratégie publique, l’égalité de traitement entre les actionnaires pour les entreprises cotées en bourse, la transparence et la diffusion de l’information. Mais aussi assurer la responsabilité du conseil d’administration, dont le rôle est passif et qui ne fait qu’entériner les décisions de la tutelle, créant ainsi un décalage par rapport au mangement et l’instauration de la culture du rendre compte.

Naceur Bourenane, ce socio-économiste et expert financier, et ex-membre d’un des fonds de participations de l’Etat créé à la faveur des réformes dites hamrouchiennes a indiqué que le problème de la bonne gestion des entreprises publiques économiques n’est pas spécifique à l’Algérie. « Il y a certes des progrès qui ont été faits dans ce sens, mais aucun pays n’a trouvé la solution idoine. » Il ajoutera que la politique de privatisation a mis les pouvoirs publics dans l’impasse. Ce n’est pas pour autant qu’il faut détruire les entreprises. M. Bourenane en veut pour preuve que les actifs des entreprises publiques à l’échelle mondiale équivalent au Produit intérieur brut mondial. Le communicant n’a pas manqué de proposer des solutions.

A l’interne d’abord, à travers l’instauration la bonne gouvernance à travers la séparation du propriétaire et de l’actionnaire. L’Etat propriétaire devra se dessaisir au profit des actionnaires auxquels échoit la mission de trouver les voies et moyens de développer l’entreprise, à charge pour eux de rendre des comptes. Il citera des expériences menées dans certains pays et qui ont réussi, à l’image de l’Afrique du Sud qui s’est contenté d’une simple lettre d’intention aux entreprises publiques (Global compact). A elles de rendre des comptes, c’est-à-dire avec obligation de résultats sous peine de sanctions, voire de poursuite pénale. Mieux, dans le pays de Nelson Mandela, les rapports des entreprises publiques économiques atterrissent sur le bureau du Parlement auquel revient toute décision. De plus, le mode de sélection des administrateurs est de moins en moins discrétionnaire. Elle se fait sur la base de la compétence et du mérite.

La parole fut ensuite donnée au président directeur général du groupe Saïdal, aujourd’hui côté en bourse, qui a fait part de l’expérience de son entreprise en matière de bonne gouvernance. Boumdiène Derkaoui a affirmé qu’à aucun moment, l’entreprise qu’il dirige n’y avait pensé, avant l’arrivée du partenaire danois Novo-Nordisk avec lequel un contrat devait être signé pour la production de l’insuline. Et c’est ce groupe qui a exigé que Saïdal lui fournisse une charte de l’éthique avant toute conclusion. Un travail qui a pris une année (mars 2014) et qui a été par la suite distribué à l’ensemble des 4.000 employés que compte le groupe.

Les débats étaient essentiellement axés sur les dysfonctionnements au sein des EPE algérienne. En ce sens qu’il y a chevauchement entre le conseil d’administration et la tutelle que sont et les SGP et les ministères de tutelle. Cela, en plus du fait que la plupart des entreprises ne publient pas leurs comptes sociaux. Et lorsqu’elles les publient, ils sont incomplets. Ce qui fera dire à l’un des intervenants : « Nous avons des entreprises croyantes mais non pratiquantes ».

Faouzia Ababsa