Abdallah Ghoulam est l’ancien président du Raja Casablanca. C’est lui qui a nommé, en 1997, le nouveau sélectionneur national, Vahid Halilhodzic, à la tête de son club, alors qu’il était en pleine période de chômage. Un choix qui a porté rapidement ses fruits, puisque le mythique club de la capitale économique du royaume chérifien a réussi à remporter, quelques mois plus tard seulement, la prestigieuse compétition de la Ligue des champions d’Afrique dans sa nouvelle version et de survoler littéralement le championnat national. Contacté par nos soins, Abdallah a bien voulu répondre à nos questions au sujet du coach bosniaque qu’il connaît parfaitement.
Bonjour M. Abdellah, on vous sollicite pour une interview au sujet de l’entraîneur Vahid Halilhodzic, vous qui le connaissez depuis 1997…
Il n’y a pas de problème. J’ai connu Vahid dans les années 1990 et je peux vous dire que c’est un excellent entraîneur. C’est un homme qui a des principes et qui sait se faire respecter. Il sait gérer un groupe et personne ne peut s’immiscer dans son travail. Il est venu chez nous, au Raja, en 1997, alors qu’il entraînait auparavant une équipe française de seconde division. Il a beaucoup contribué au sacre de notre club en 1997 en Ligue des champions d’Afrique. C’est un bosseur né qui sait fixer ses limites avec les joueurs, les dirigeants y compris. J’ai toujours eu de bonnes relations avec lui, et ce, jusqu’à ce jour.
A vous entendre, c’est le meilleur entraîneur avec lequel vous ayez travaillé durant votre présidence du Raja…
Sincèrement, je dirai oui. C’est un entraîneur qui a fait du bon boulot. Même sur le plan personnel, il est irréprochable.
Est-il vrai qu’il s’immisçait dans les affaires personnelles de ses joueurs, genre vérifier leurs habits ou leurs coupes de cheveux ?
Effectivement. Il sermonnait souvent les joueurs, notamment les plus jeunes, quand il voyait qu’ils s’accoutraient d’une manière peu recommandables ou bien qu’ils se coupaient les cheveux avec trop d’extravagance. Cependant, il ne leur faisait pas la réflexion devant leurs coéquipiers, histoire de ne pas les mettre dans la gêne. Vahid aime beaucoup les joueurs calmes qui ne font pas de problèmes. Je me rappelle qu’il insistait auprès des joueurs pour que ces derniers portent toujours la même tenue lorsqu’ils sont ensemble. Il n’aime pas les joueurs qui se la «jouent» trop et qui se prennent pour des soi-disant stars. Avec lui, seul le rendement sur le terrain compte.
Donc, selon vous, c’est un entraîneur qui fait confiance beaucoup plus aux jeunes…
Vahid ne croit qu’à une seule chose, le travail. Il n’alignera dans son onze titulaire que les joueurs qui l’ont convaincu durant la semaine aux séances d’entraînement. Il ne fera jouer que ceux qui se défoncent et qui lui prouvent qu’ils sont en forme. C’est grâce à cela que le Raja a pu devenir le meilleur club en Afrique en 1997 et que certains joueurs sont devenus quelques années plus tard des icônes du football marocain.
D’après nos informations, c’est l’entraîneur Henri Michel qui vous a proposé de ramener Halilhodzic. Vous confirmez ?
Oui, c’est exactement ça. Henri Michel, qui était à cette époque le sélectionneur du Maroc, nous avait proposé Halilhodzic, en nous assurant que c’était un bon entraîneur. Personnellement, je lui ai fait confiance et ça a bien marché. Au début, le club ne tournait pas bien et il était classé dans le ventre mou du tableau, mais après l’arrivée de Coach Vahid, la situation s’est nettement améliorée et on a réussi, en plus de la Coupe d’Afrique, à remporter le championnat national. Je dois reconnaître, cela dit, qu’avant qu’on le désigne entraîneur en chef du Raja, beaucoup de nos dirigeants étaient sceptiques, car il n’avait pas en ce temps-là, un CV riche. Désormais, je pense qu’il a accumulé beaucoup d’expérience, notamment après avoir drivé la Côte d’Ivoire. Je pense que cela l’aidera dans sa nouvelle mission à la tête de la sélection algérienne. Je vous souhaite, avec lui, beaucoup de réussite.
En été 1998, il avait quitté le Raja pour rejoindre Lille. Pourquoi ne l’avez-vous pas maintenu au club puisque vous dites qu’il a fait du bon boulot lors de sa première saison ?
Cette année-là, malheureusement, j’avais quitté la présidence du club, sinon je ne l’aurai jamais laissé partir. Les dirigeants de cette époque avaient fait appel par la suite à Oscar Fullone.
Est-ce vrai qu’il a été derrière le transfert de quelques joueurs du Raja vers le club français de Lille ?
Oui, tout à fait. Lorsqu’il a rejoint Lille, Halilhodzic a emmené avec lui, Salaheddine Bassir et Abdalilah Fahmi. Ces deux joueurs ont énormément évolué sous sa coupe.
Les médias ont tendance à qualifier Halilhodzic de «dictateur». En est-il vraiment un, selon vous ?
Vous pouvez le qualifier de ce qui vous voulez, mais pas de dictateur. C’est quelqu’un de sage, avec un grand cœur. Il aime les joueurs qui travaillent d’arrache-pied et ne supporte pas du tout ceux qui ne font aucun effort et qui, après, viennent se plaindre auprès de lui, en se demandant pourquoi il ne les fait pas jouer. Il est très à cheval avec la discipline et c’est ce qui fait sa force.
Vous pensez que c’est l’homme de la situation pour la sélection algérienne ?
Vu que je l’ai beaucoup côtoyé, je pense qu’il peut réussir avec l’Algérie. La fédération algérienne a, en tout cas, choisi un grand entraîneur. Il faut juste lui offrir les moyens de travail et le laisser accomplir son programme en toute sérénité.