«Face à la Slovénie, je n’ai pas mesuré la gravité de mon geste»
C’est dans un luxueux hôtel à quelques kilomètres de la frontière autrichienne où sa nouvelle équipe a pris ses quartiers pour la préparation d’intersaison que Abdelkader Ghezzal a accueilli l’envoyé spécial du Buteur. Au cours de ce long entretien, l’attaquant des Verts a parlé de tout et n’a éludé aucune question, y compris les plus embarrassantes. Appréciez !
Comment va Abdelkader depuis qu’il a rejoint Bari ?
En signant pour Bari assez tôt, j’étais libéré. C’est ce qui m’a permis de réaliser une excellente préparation et de me sentir aujourd’hui en pleine forme.
Comment s’est faite l’adaptation au sein de votre nouveau club ?
Pour vous dire la vérité, je ne m’attendais pas à ce que je m’adapte aussi vite dans mon nouveau club. Mes rapports sont excellents avec tout le monde, joueurs, staff technique et même dirigeants.
La preuve, pour votre premier match avec Bari, vous avez inscrit trois buts…
Oui et j’ai comme l’impression que je vais marquer beaucoup de buts cette saison. Malgré le niveau de l’adversaire, cette rencontre a été très utile en prévision du début de saison.
Pourquoi vous avez choisi Bari ?
Pour plusieurs raisons. Bari est un club qui draine la grande foule à chacun de ses matchs, il est également connu pour développer un jeu offensif qui cadre avec mes prétentions de marquer des buts en ma qualité d’attaquant. Enfin et contrairement à Sienne dont l’objectif est de se maintenir en Serie A, Bari a d’autres ambitions, cela me poussera à fournir beaucoup d’efforts pour être à la hauteur des espoirs placés en moi.
Pourquoi ne pas avoir choisi la Roma qui était aussi intéressée par vos services ?
Je préfère ne pas parler du passé, mais si vous voulez tout savoir, la seule proposition of0ficielle était celle de Bari dont les dirigeants étaient insistants et voulaient vraiment m’avoir dans leur équipe. Je suis content d’avoir choisi Bari.
Beaucoup de vos supporters attendent avec impatience le derby face à Lecce. Il vous arrive d’y penser ?
Bien sûr et pas seulement parce que c’est le derby local, c’est surtout parce qu’il y aura un ami et un coéquipier en face, Djamel Mesbah. Ça va sans doute chambrer lors du stage de l’Equipe nationale.
Il vous arrive de penser à la Coupe du monde ?
Oui bien sûr. Tout footballeur digne de ce nom rêve de jouer un jour une Coupe du monde et moi j’ai eu la chance de le faire. Ce fut une belle expérience, j’ai vécu ces moments avec beaucoup d’intensité.
Quel est le plus beau souvenir que vous avez gardé du Mondial sud-africain ?
Lors de notre arrivée en Afrique du Sud et au moment de l’hymne national face à la Slovénie. Durant ces deux moments, j’ai revu tout le film des éliminatoires et tous les obstacles qui se sont dressés sur notre chemin, mais qui ne nous ont pas empêchés d’être là.
Mais après l’hymne national, il n’y a pas eu que de belles choses…
Je sais de quoi vous voulez parler. Mon geste n’a pas été volontaire et je n’ai mesuré sa gravité qu’après l’expulsion qui a suivi. J’étais le premier déçu car je suis entré sur le terrain pour aider mes coéquipiers, pas pour les laisser terminer le match à dix, devant un adversaire qui n’était pas faible certes, mais qui n’était pas non plus un foudre de guerre. Je regrette encore ce geste.
Après l’expulsion écopée contre la Slovénie, quelle a été la réaction de vos camarades ?
Ils m’ont tous affirmé leur solidarité. Comme vous devez le savoir, en Equipe nationale, on vit tous comme une seule famille. En ce qui concerne mon expulsion, je dirai que ce sont des choses qui arrivent en football. J’ajouterai que mon ami, le Marocain Kherdja, qui évoluait avec moi à Sienne, m’a envoyé un SMS pour me soutenir et me remonter le moral
Dans quel état psychologique étiez-vous lorsque vous avez été expulsé ?
Cette expulsion a été difficile à vivre pour moi et pour toute l’équipe. Seulement, après coup, je me suis dirigé à l’entraînement avec une détermination sans faille et une idée fixe : me ressaisir afin d’être utile pour la troisième rencontre de mon pays. Il fallait bien relever la tête et oublier ce carton rouge. Je me suis dit que ça ne servait à rien de vivre avec cette expulsion…
Mais, finalement, cette expulsion vous a privé du match face aux Anglais…
Il est clair qu’affronter l’Angleterre est le vœu de tout joueur. Faire l’impasse sur cette rencontre, contre le géant anglais, n’était pas facile à digérer surtout que j’étais très motivé pour jouer ce duel.
Parlez-nous de l’état d’esprit du groupe, avant et après les rencontres de l’EN…
Il régnait un bon état d’esprit, le groupe s’entraînait dans une ambiance fraternelle. On était solidaires et chacun de nous était concentré pour donner le meilleur de lui-même. La concurrence qui existait entre nous n’a pas affecté notre relation.
Les critiques vous ont-elles déstabilisé ?
Vous savez, lorsque les critiques visent mon rendement sur le terrain, je les accepte, qu’elles viennent des supporters ou des journalistes, cela ne m’a pas gêné du tout. Seulement, ce que je ne tolère pas, ce sont les rumeurs publiées par certains et qui touchent à ma réputation surtout qu’elles sont infondées. Franchement, ça me touche beaucoup
Comme par exemple…
Je ne veux pas polémiquer mais il y a beaucoup de choses qui ont été dites à mon sujet, et qui ne sont pas vraies. On m’a même attribué des déclarations que je n’ai jamais faites. Je cite comme exemple cette histoire de défi que j’aurais soi-disant lancé à Mourinho lors du match Sienne-Inter de Milan ou cette rumeur qui parlait de mon transfert à la Roma, et j’en passe…
Comment jugez-vous le parcours de l’EN dans cette Coupe du monde 2010 ?
C’est vrai que nous nous sommes contentés d’un seul petit point en trois matches mais j’estime qu’on a réalisé des prestations honorables. On a défendu à fond les couleurs de l’Algérie et on n’a pas ménagé nos efforts.
Vous ne croyez pas que l’Algérie possédait les moyens de passer au second tour?
On avait cette ambition, et la volonté de passer au deuxième tour. Moi personnellement j’étais très motivé par cet objectif mais le football réserve des surprises et je voudrais ajouter quelque chose…
Oui, allez-y…
Je vais continuer à travailler sans relâche pour donner le meilleur de moi-même en Equipe nationale. Les couleurs du pays sont la chose la plus chère au monde pour moi.
Le public algérien est aussi tout pour moi. Je n’oublierai jamais son soutien lors des moments difficiles et, rien que pour ça, je ferai tout pour le rendre heureux. Lors de cette initiative effectuée par l’Association des émigrés algériens vivant en Italie, qui m’a récompensé, je me suis aperçu qu’il y avait des fans venus de partout, juste pour m’encourager, cela est une preuve que les supporters sont tout simplement magnifiques. Ça m’a fait chaud au cœur surtout que cela s’est passé devant mes dirigeants et supporters à Bari…
Vous étiez ému lorsque vous avez vu l’emblème national…
C’est vrai, le drapeau algérien me rappelle mon pays et l’Equipe nationale. Je ne peux pas oublier ces deux matches disputés contre l’Egypte. Pour vous dire à quel point l’emblème de mon pays est synonyme de tous ces beaux souvenirs vécus avec l’Algérie…
En parlant de Bari, Yahia aurait-il pu vous rejoindre dans cette équipe ?
Oui, j’en ai entendu parler et je ne vous cache pas que j’aurais souhaité le voir venir ici à Bari, parce que c’est une bonne équipe pour lui. Seulement, je n’entends plus parler de cette éventualité ces derniers temps. Yahia reste un grand joueur, c’est lui qui a marqué le but d’Oum Dourmane, il ne faut pas l’oublier
Que pensez-vous du départ de Belhadj au Qatar ?
Belhadj est un très bon joueur. Il peut jouer dans n’importe quel club européen. Maintenant, il a choisi de jouer au Qatar… C’est son choix, il faut le respecter
Meghni a laissé un grand vide, n’est-ce pas ?
C’est clair, Meghni est un joueur doué. Il a de très grandes qualités techniques. L’Equipe nationale aurait certainement pu tirer profit de son talent lors du dernier Mondial. Cela dit, Meghni aura d’autres chances à l’avenir pour servir l’Algérie, ça c’est certain. Le plus important est qu’il prenne soin de lui et qu’il revienne vite à la compétition.
Que pensez-vous de la reconduction de Saâdane ?
Saâdane est un entraîneur qui connaît tous les joueurs. Il nous a conduits en phase finale de la Coupe d’Afrique et il a qualifié l’Algérie au Mondial après plusieurs années d’absence donc, même si, en ma qualité de joueur, je m’interdis d’évaluer le travail du coach, je pense qu’il va continuer à diriger la sélection avec la même compétence.
Comment voyez-vous le niveau de l’Equipe nationale algérienne maintenant ?
On possède un très bon groupe. Les dernières phases finales de Coupe d’Afrique et de Coupe du monde nous ont beaucoup servi. On est en nette amélioration sur le plan de la cohésion. Je suis persuadé qu’on va enregistrer d’autres bons résultats à l’avenir
Les éliminatoires de la CAN débuteront bientôt, un commentaire ?
On va tout faire pour assurer notre qualification. On a acquis une très bonne expérience qui va nous permettre de bien aborder ces éliminatoires. Notre participation au dernier Mondial fait de nous un favori du groupe… A nous de défendre ce statut. Maintenant, chaque adversaire de l’Algérie fera tout pour nous faire tomber, à nous de bien nous préparer pour éviter que cela se produise
Comment voyez-vous le prochain match contre le Gabon ?
Je suis en train de préparer la nouvelle saison avec Bari et, bien sûr, les prochaines rencontres de l’Equipe nationale. Je travaille d’arrache-pied pour assumer mon rôle comme il se doit avec la sélection, à commencer par cette rencontre du Gabon.
Je précise que c’est avec un énorme plaisir que je vais retrouver le public algérien. Je suis même très heureux que cette rencontre se joue à Alger devant nos merveilleux fans qui ne lésinent jamais sur les moyens pour se déplacer en nombre nous soutenir partout. Je profite de cette occasion offerte par Le Buteur pour saluer le public algérien qui m’est très cher.
