Gestion du dossier de l’immigration clandestine: La polémique enfle!

Gestion du dossier de l’immigration clandestine: La polémique enfle!

Le dossier de l’immigration clandestine est au centre d’une grosse polémique. Régulièrement accusée d’«expulsions massives» par les ONG, Alger a été, tout dernièrement, sévèrement critiquée pour les mêmes raisons par les Nations-Unies alors que des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent de l’intérieur du pays pour réclamer une révision des mesures dont font l’objet les migrants illégaux. Ce week-end, le ministère des Affaires étrangères a répondu par deux communiqués différents à toutes ces accusations.

Abla chérif – Alger (Le Soir) – Le ton se veut ferme, à la mesure des reproches faits au pays contre lequel se mène une «campagne malveillante orchestrée par des organisations non gouvernementales l’accusant de faillir à ses obligations internationales en matière de solidarité, d’accueil et d’hospitalité à l’endroit de migrants subsahariens», répond le MAE. Cette réponse vise directement les ONG qui accusent régulièrement les responsables algériens de procéder au rapatriement des migrants subsahariens «sans discernement».

Amnesty International, Human Rights Watch, la Ligue algérienne des droits de l’homme et d’autres organisations (LADDH) évoquent l’organisation de «rafles» durant lesquelles sont «embarquées de manière systématique toutes les personnes en provenance d’Afrique subsaharienne, y compris celles en possession de permis de travail». Alger avait, quant à elle, déjà répondu à ces critiques en démentant les faits et assurant que les migrants en situation régulière n’étaient pas concernés par les opérations de rapatriement.

Dans le dernier communiqué publié par le MAE (ce jeudi), il est cependant signalé que «la migration clandestine a pris une ampleur inégalée ces dernières années et qu’à l’instar de tous les pays du monde confrontés à ce phénomène à caractère universel, l’Algérie a été amenée à prendre des dispositions en vue d’assurer la sécurité et le bien-être des citoyens algériens et des ressortissants étrangers se trouvant sur le territoire algérien». Tout en se défendant d’avoir porté d’une quelconque manière atteinte aux droits de ces réfugiés, la même source ajoute que des mesures de reconduite à la frontière d’un certain nombre de migrants illégaux ont ainsi été décidées et mises en œuvre en veillant au strict respect de la dignité et des droits humains des personnes concernées et en étroite concertation avec les Etats dont ils sont ressortissants».

Il y a quelques jours, la présidente du Croissant-Rouge algérien (CRA), organisme qui prend part aux opérations de rapatriement, avait également réagi en affirmant que les migrants illégaux étaient reconduits à la frontière et remis aux autorités compétentes préalablement averties. Durant la semaine écoulée, le gouvernement nigérien a alerté son homologue algérien et attiré son attention sur la présence de nombreuses personnes de nationalités différentes parmi les expulsés.

D’autres voix sont venues, par la suite, s’ajouter à la polémique en cours. Elles proviennent d’Algérie cette fois puisque plusieurs personnalités du monde associatif, militants des droits de l’Homme, artistes et autres ont initié une pétition intitulée «Nous sommes tous des migrants» pour que cessent les «expulsions massives»… La critique la plus sévère qui ait été enregistrée ces derniers jours émane cependant de l’ONU.

Le Haut Commissariat des Nations-Unies pour les droits de l’Homme se dit alarmé face à «l’expulsion collective des migrants, sans évaluation individuelle ou de garanties de procédure». La même source ajoute que cette situation est «contraire aux obligations de l’Algérie en vertu du droit international des droits de l’Homme, notamment la convention que le pays a ratifiée sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille».

Le HCDH affirme avoir mené des enquêtes sur le terrain et interrogé les concernés. Il conclut : «Selon les conventions internationales de droits de l’Homme, les migrants ne doivent pas être arrêtés ou détenus arbitrairement et, en cas d’arrestation, de détention et d’expulsion, des garanties de procédure, y compris le droit à l’assistance et au conseil juridique, le droit à l’information et le droit à un recours doivent être respectés.»

Le ministère algérien des Affaires étrangères appelle à une solution en profondeur du phénomène. «C’est en traitant avec diligence les causes qui sont à l’origine de l’exil de centaines de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants, et en luttant avec détermination contre les réseaux de passeurs qui exploitent la détresse humaine de ces migrants et s’adonnent à la traite des personnes, que le phénomène de la migration irrégulière pourra être efficacement jugulé. A cet égard, il est attendu des ONG d’accompagner et de s’inscrire résolument dans cette démarche», note ce même texte.

Alger répond à l’ONU

Hier, vendredi, le MAE a publié un nouveau communiqué pour répondre aux accusations de l’ONU cette fois. Le représentant permanent de l’Algérie à Genève a été instruit d’exprimer la «vive réprobation de l’Algérie» qui qualifie les propos du HDCH d’inacceptables et demande «des clarifications sur les raisons l’ayant conduite à faire avec une aussi insoutenable légèreté un tel procès d’intention au pays».

Il est ajouté que ces «propos fondés sur de simples allégations parcellaires approximatives et non vérifiées, rapportées au conditionnel, constituent une grave entorse à la vérité et un manquement à l’obligation de rigueur de prudence et d’objectivité auxquels doit s’astreindre en toutes circonstances le Bureau des droits de l’Homme, en particulier lorsqu’il s’agit de sujets aussi sensibles et complexes».

Le MAE appelle enfin à s’attaquer «aux véritables causes de ce phénomène» et à «des efforts soutenus de la part de la communauté internationale pour apporter des solutions aux problèmes à l’origine de l’exode de centaines de milliers de personnes vers le Nord et éliminer les réseaux criminels qui exploitent leur détresse car la seule rhétorique accusatrice ne peut en aucun cas constituer une réponse à un phénomène aussi complexe que la migration clandestine».

A. C.