«Comme chaque année, une telle quantité de déchets doublera dans les tout prochains jours, notamment durant la saison estivale», a-t-on expliqué.
La maxime du chimiste-philosophe et économiste français, Antoine Laurent Lavoisier, ne trouve pas et ne peut trouver un terrain d’application de sitôt dans une ville que l’on a transformée en un grand dépotoir donnant d’elle une image hideuse sans juger utile de faire preuve d’un petit effort pour la nettoyer, proprement dit.
«Les dires des responsables locaux, se déchaînant dans des déclarations, souvent destinées à la consommation locale», déplore-t-on. La gestion des déchets, ménagers ou autres, est jusqu’à preuve du contraire renvoyée aux calendes grecques.
«A Oran, tout se perd.» C’est comme l’un des épisodes des films imaginaires dépeignant une cité construite sur un terrain meuble, alors que ses soubassements sont à la fois fragiles et soumis à longueur de journée à l’épouvantable épreuve la dénaturant par l’effet boule de neige provoqué par l’entassement continu de ses rejets quotidiens. Cela se passe dans une société aux esprits ravagés par la parlote, dominée journellement par les prix de la patate, de la carotte et les déchets lambda laissant de côté l’esthétique d’une ville que l’on veut promouvoir en tant que capitale touristique par excellence.
C’est ce que l’on peut conclure du fait que la wilaya d’Oran soit devenue une des plus grandes cités productrices de déchets ménagers, notamment durant cette période des grandes consommations, le mois de Ramadhan, la période des fortes chaleurs et la saison estivale. Un constat ahurissant est à relever dans la commune abritant la plus grande station balnéaire du pays, Aïn El Turck.
1800 tonnes relevées chaque jour
Cette localité, située comme capitale de la corniche touristique oranaise, est, selon ses responsables, à pied d’oeuvre dans ses préparatifs pour la saison estivale. Elle est toutefois devenue «collectionneuse» des déchets ménagers en relevant quotidiennement une moyenne de 30 tonnes chaque jour. Un tel chiffre est à revoir inéluctablement à la hausse dans moins de deux semaines vu le grand flux des touristes attendus. «Une telle quantité de déchets va doubler dans les tout prochains jours», a-t-on expliqué ajoutant que «à l’effet de ces prévisions, l’APC a pris toutes ses dispositions dans le but de faire face à toutes les situations». Dans un bilan élaboré antérieurement, l’on fait état de pas moins de 1 800 tonnes de déchets ménagers «procréés» quotidiennement par la ville d’Oran.
Une telle situation n’est pas sans incidences directes sur les finances en acculant les responsables locaux à faire preuve de trouvailles, afin de mieux gérer la cité en la nettoyant avant d’entreposer ses rejets dans un lieu «sûr», sinon tout au moins assujettis à une meilleure prise en charge reposant essentiellement sur le tri et pourquoi pas le recyclage, un tel mode de traitement est tellement vanté que sa mise en application tarde à venir. «Basculer la situation n’est pour le moment que paroles en l’air», regrette-t-on malgré la mise en place des centres d’enfouissement technique.
Dans le sillage de la recrudescence sans préalable des rejets ménagers, les responsables du centre d’enfouissement technique de Hassi Bounif ont dû recourir à une troisième fosse d’entreposage avec 300 millions de dinars. La prise d’une telle mesure n’est pas venue suite à un simple fait du hasard.
Elle a été imposée par plusieurs aléas incontournables comme le mois de Ramadhan, mois durant lequel les déchets sont en hausse significative. Il est toutefois utile de souligner que les deux fosses du centre d’enfouissement technique ouvert tout récemment sont arrivées à saturation. Ledit centre, conçu en conformité avec les standards modernes, prend en charge les déchets de 13 communes du centre et de l’est de la wilaya. Les responsables, gérant ledit centre d’enfouissement, soulignent que la capacité de traitement est estimée à 1500 tonnes par jour. A elle seule, la ville d’Oran produit près de 2000 tonnes chaque jour! A en croire la même source, cette fosse se particularise par l’adoption de systèmes de tri des déchets en fonction de leur qualité avant de passer à l’enfouissement.
La même source ajoute que «le centre d’enfouissement est équipé de tous les outillages technologiques de pointe». Hélas! La théorie de Lavoisier est battue en brèche à Oran. Autrement dit «tout se perd et rien ne se transforme». «Le taux de recyclage des déchets est dérisoire ne dépassant pas le seuil de 1% des déchets traités», a-t-on indiqué. Dans les pays où la récupération constitue un secteur alimentant l’industrie et plusieurs autres créneaux, le recyclage de plusieurs matières dépasse 20%. Le CET de Hassi Bounif, implanté dans la partie est d’Oran, est à juste titre mis en place à cet effet. Cela a nécessité plus de deux ans de travaux et la mobilisation d’un pactole budgétaire de 300 millions de dinars. Il s’étale sur une surface de pas moins de 85 hectares.
Mais qui paye la sauce?
Il n’est un secret pour personne. La gestion des déchets ménagers est devenue un véritable casse-tête de tous les responsables locaux. C’est du moins ce qu’avancent ces derniers alors que la réalité est tout autre: la ville est, dans ses entrailles, coins et ses recoins, envahie par toutes les formes d’ordures s’entassant à longueur de journée et générant des odeurs fétides faisant fuir les moins sensibles aux relents de putréfaction. Force est de constater que cet état de fait soit généralisé un peu partout dans les quartiers dont le nettoiement ne serait pas parmi les priorités à prendre en compte. D’autant que l’entreposage des déchets dans des centres d’enfouissement technique n’est plus gratuit.
Les 26 communes, composant la wilaya d’Oran, sont toutes génératrices de déchets de toutes les formes. Une quantité avoisinant 2000 tonnes/jour est relevée. Y a-t-il anguille sous roche ou encore s’agit-il d’une mauvaise gestion? Rien n’est précisé en dehors de l’absence totale d’une vision futuriste quant à la rentabilisation de ces centres d’enfouissement. Localement, la réflexion engagée fait état de l’appartenance des Cet à toutes les municipalités. Le cas évident est tout autre. Ces infrastructures sont commerciales devant capitaliser d’importants dividendes. Autrement dit, les dépositaires des déchets sont appelés à casquer sans rechigner. Or, le contraire se produit. Le financement des centres d’enfouissement techniques d’Oran est géré à la traditionnelle en étant tributaire des subventions de l’Etat.
850 millions de dinars impayés
«Rien d’officiel ne dure hormis le provisoire qui s’inscrit dans la durée dans une wilaya que l’on souhaite transformer en métropole méditerranéenne sans faire preuve d’ingéniosité, et de mise en place des moyens devant rentabiliser le plus petit espace, soit-il, accordé à une quelconque entreprise», déplore-t-on. «Les communes ne paient pas» cette prestation», regrette un cadre de l’Epic-CET d’Oran.
Plus grave encore, d’importantes créances sont impayées. Elles sont estimées à la colossale facture de 850 millions dinars. La commune d’Oran vient en tête de liste en s’adjugeant la facture salée dépassant la coquette somme de pas moins de 440 millions de dinars impayés.
Elle est suivie par la commune de Bir El Djir redevable de pas moins de 170 millions de dinars. Les communes de Sidi Chahmi, El Kerma et Es-Senia sont, elles aussi, redevables, de factures oscillant entre 50 et 60 millions de dinars. La tarification appliquée n’est toutefois pas budgétivore. Elle est arrêtée à la modique somme de 800 dinars/ la tonne. Explication faite: «Les créances cumulent les redevances depuis le lancement des trois centres, implantés à Hassi Bounif, Arzew et El Ançor.» Toute une problématique est posée alors qu’aucune solution ne pointe à l’horizon malgré les différents rapports verbaux qui ont été faits aux «échotiers des déchets». D’autant que la gestion des centres d’enfouissement a été concédée à des Epic devant au préalable assurer leur survie tout en assurant leur propre financement et se libérer, ne serait-ce qu’un tant soit peut de la gestion centralisée subventionnée par l’Etat. Cela étant, ces Epic sont dans l’obligation d’assumer leur équilibre financier.
Là encore, le contraire se produit. Ces structures, toujours étatiques malgré le statut d’Epic qui leur a été collé, n’arrivent souvent pas à se mettre au diapason avec les nouvelles mutations que connaît le secteur. Plus que jamais, les verrous cadenassant une telle problématique sont à faire sauter.
La gestion des secteurs entreprenants est à revoir, le but est la capitalisation des recettes éparpillées un peu partout dans les coins et recoins des villes. Ne dit-on pas qu’«on ne doit pas jeter l’argent pas la fenêtre»? Que nenni. La crise économique, aux incidences sans aucun doute multidimensionnelle, est aux… aguets. Quand osera-t-on donc? La réponse n’est sûrement pas pour demain. En attendant, la gestion archaïque et classique domine les esprits des responsables locaux.