“Paroles, paroles, paroles” comme dans la chanson !
Drame existentialiste qui tente de réfléchir sur l’acteur mais qui passe par plusieurs moments difficiles et ne va pas au bout de son propos. Le sujet tombe en désuétude et le propos n’apporte rien de nouveau.
Houria était aimée, adulée et très sollicitée. Trente-cinq ans après, la gloire n’est qu’un lointain et douloureux souvenir. Vieille et seule, Houria n’a que l’amertume pour compagnie.
Un soir, alors au summum de la déception, elle ouvre la valise qui contient ses costumes de scène et se remémore son glorieux passé. Elle se souvient de son premier rôle, sa légèreté et son insouciance. Elle partage ses réminiscences avec Chérif, un autre artiste déchu et abandonné par ses amis.
Quarante-cinq minutes durant, les deux comédiens se remémorent leur douloureux passé et tentent de trouver un sens à leur situation et au sacrifice qu’ils ont fait, par amour pour la profession de comédien. Intitulée Kalam, cette pièce mise en scène par Amel Menighad et adaptée par Haïder Benhoussine d’après l’œuvre Le Chant du cygne, d’Anton Tchékhov, est un drame existentialiste qui cherche des réponses à des questionnements abstraits.
Le métier d’acteur est complexe : il est à la fois ingrat et prenant. Lorsque quelqu’un choisit d’être comédien, il s’abandonne totalement à ce métier, qui rapporte la gloire et l’amour des autres… jusqu’à ce qu’un autre acteur ou une autre actrice vienne et prenne sa place.
Cependant, la pièce a été traversée par quelques moments difficiles et quelques incohérences, qui font du spectacle une œuvre incomplète dans la réflexion et dans la représentation, qui ne va pas au bout de ses questionnements. En plus d’un sujet éculé, l’adaptation n’est pas forte, elle se caractérise par sa mollesse. Car l’adaptation n’apporte rien de nouveau au théâtre, et l’auteur ne nous a pas épargné le cliché du clown malheureux, qui fait rire tout le monde alors que c’est lui le plus grand malheureux.
On croirait presque que le clown porte le fardeau de l’humanité et la croix du genre humain. C’est quand même un peu exagéré comme caractérisation. Les comédiens, Adila Bendimerad et Slimane Ben Ouari, ont certes maîtrisé leur rôle, mais ont sans doute été mal dirigés vu qu’ils ont eu quelques problèmes de souffle et d’articulation.
De plus, la comédienne n’a malheureusement pas une voix qui porte ; et d’ailleurs, les spectateurs assis au balcon, ne comprenaient pas toujours ce qu’elle disait.
Le rythme des comédiens était très rapide, voire même expéditif, mais la réception pour le spectateur n’a pas été oppressante ou intense parce que le propos n’est pas fort. En outre, si un seul mot pouvait définir la mise en scène, ce serait “manque”, surtout d’efficacité et d’une véritable problématique théâtrale et artistique. Le premier manque a été enregistré dans la gestion des comédiens et dans leur direction.
Ensuite, le début de la pièce est un peu raté car la metteur en scène a voulu créer un effet de distanciation, en faisant entrer la comédienne par la salle. Ceci n’a eu aucun effet sur la salle puisqu’il n’y a pas eu d’échanges.
Le public n’existait pas pour la comédienne alors que la faire entrer par la grande porte était une manière de l’impliquer. Les expériences qu’a tenté de faire Amel Menighad dans son spectacle n’ont rien apporté et n’ont eu aucun effet, et d’ailleurs laisser dans le noir les comédiens près d’un quart d’heure n’est pas réellement approprié et n’obéit à aucune règle. C’est comme si le public était exclu du spectacle.
En fait, Kalam ressemble plus à un exercice d’école qu’à une pièce de théâtre destinée à un large public. Mais ce n’est que la première expérience d’Amel Menighad et le meilleur reste à venir… sans doute ! En tout cas, quarante-cinq minutes durant, nous avons eu l’impression de nous retrouver dans la chanson Paroles, de Dalida avec Alain Delon ; et la phrase “Paroles et encore des paroles que tu sèmes au vent” n’arrêtait pas de se répéter.
Sara Kharfi