L’Algérie a consolidé sa place de premier fournisseur de gaz naturel de l’Espagne en juillet 2025, tout en voyant ses échanges commerciaux avec Madrid repartir fortement après plus de deux ans de gel quasi total.
Selon les données publiées par l’opérateur espagnol Enagás, l’Algérie a couvert 32,9 % des besoins espagnols en gaz au mois de juillet, soit 10 211 GWh. La quasi-totalité de ce volume (9 330 GWh) a transité par le gazoduc Medgaz, reliant directement Beni Saf (Algérie) à Almería (Espagne), tandis que 881 GWh ont été livrés sous forme de gaz naturel liquéfié (GNL).
En comparaison, les États-Unis ont fourni 20,6 % du gaz consommé par l’Espagne sur la même période, soit 6 389 GWh, en forte hausse (+55 % par rapport à juin). Sur les sept premiers mois de 2025, Alger conserve également sa position dominante avec 32 % de parts de marché, devant Washington (28,9 %) et la Russie.
Commerce : un retour en force après 882 jours de blocage
Cette performance énergétique s’accompagne d’un redémarrage spectaculaire du commerce bilatéral. Entre juin 2022 et novembre 2024, les relations économiques avaient été lourdement affectées par les tensions diplomatiques liées au Sahara occidental. Les exportations espagnoles vers l’Algérie s’étaient effondrées, passant de 2,9 milliards d’euros en 2019 à seulement 332 millions en 2023.
Mais depuis la levée des restrictions bancaires le 6 novembre 2024, les échanges ont repris de plus belle.
Entre janvier et mai 2025, les ventes espagnoles vers l’Algérie ont atteint environ 900 millions d’euros, soit +162 % par rapport à la même période en 2024. Rien qu’en mai, Madrid a expédié 217 millions d’euros de marchandises vers Alger, contre 54,5 millions un an plus tôt.
Le secteur céramique espagnol, concentré dans la région de Castellón, a rapidement regagné le terrain perdu face à la Turquie et à l’Italie. En janvier-février 2025, les exportations de produits céramiques vers l’Algérie ont atteint 17,8 millions d’euros, presque au niveau des ventes vers l’Italie (19 millions) et deux fois supérieures à celles réalisées par la Turquie sur toute l’année 2024.
Des secteurs porteurs malgré un climat politique fragile
La reprise touche également l’agroalimentaire, la chimie, la machinerie, l’équipement électrique et l’automobile.
Pour Djamal Eddine Bouabdallah, président du Cercle de commerce et d’industrie algéro-espagnol, « nous sommes déjà à des niveaux d’avant la crise ». Il estime que la proximité géographique ouvre la voie à une véritable intégration industrielle. Malgré ce redémarrage, la normalisation diplomatique reste timide.
L’ancien ministre et ex-ambassadeur Abdelaziz Rahabi rappelle que, même au plus fort de la crise, le gaz n’a jamais été interrompu : « C’est l’une des leçons de cette crise, même au moment le plus grave, l’Algérie a respecté ses engagements. »
En juin 2025, l’Algérie fournissait encore 26 à 30 % du gaz mensuel de l’Espagne, derrière les États-Unis, mais devant la Russie. Un signe que, malgré les tensions, le lien énergétique et commercial reste un pilier stratégique entre les deux pays.