Gas Naturel–Sonatrach et perspectives de la stratégie gazière en Algérie

Gas Naturel–Sonatrach et perspectives de la stratégie gazière en Algérie

Le Tribunal International d’arbitrage a statué le 27 novembre 2009 concernant le différent Respol/Gas Ntural et Sonatrach : quelle lecture en faites vous ?

AM- Sonatrach a signé dans du cadre du partage de la production un important contrat avec les sociétés Repsol et Gas Naturel sociétés espagnoles en 2004 pour un investissement d’environ 2,3 milliards de dollars prévoyant le forge de 52 puits et la reprise de 16 forages existants devant aller vers 22 millions de mètres cubes de gaz par jour , la construction de canalisations d’environ 6,5 milliards de mètres cubes an et la construction d’un usine de liquéfaction d’une capacité de 4 millions de tonnes/an, ce projet devait entrer en fonctionnement en 2009 . Ce contrat a été résilié par Sonatrach dès septembre 2007 invoquant la raison de retards les délais pour la partie espagnole. Suite à cela, et comme il n’y a pas eu d’ententes à l’amiable, les deux parties ont porté le litige au niveau du tribunal international. Repsol réclamait à Sonatrach des dommages et intérêts pour un montant d’environ 2,3 à 2,4 milliards de dollars , selon la fluctuation moyenne du dollar par rapport à l’euro ces dernières années, plus précisément 1,6 milliard d’euros et la société Gas Naturel environ 800 millions de dollars (537 millions d’euros) du fait qu’elle aurait engagé des investissements de l’ordre de 150 millions de dollars pour Repsol et 100 millions de dollars pour Gas naturel. Quant à Sonatrach , elle a réclamé pour préjudices subis environ 800 millions de dollars.

Le tribunal d’arbitrage a déclaré terminé le contrat en question conformément à ses clauses, sans obliger aucune des parties à indemniser l’autre comme conséquence de la fin de ce contrat et le verdict stipule que Sonatrach achète aux compagnies espagnoles leurs participations dans la société-mixte chargée du processus de liquéfaction dans le mégaprojet de Gassi Touil. Concernant les investissements effectués dans ce projet par Repsol et Gas Natural, le Tribunal ne prévoit pas leur restitution. Ainsi, la décision du tribunal international en annulant le contrat et en ne donnant aucune compensation aux deux parties a postulé le statut quo, ni gagnant, ni perdant. Sonatrach satisfaite, a décidé de ne pas faire appel mais attendons la partie espagnole qui ne s’est pas encore prononcée. Sonatrach s’en sort relativement mieux puisque le montant réclamé ne représente qu’environ 1/3 du montant réclamé par la partie espagnole, encore que la partie algérienne a fortement été lésée du fait de l‘important retard.

Sonatrach va réaliser ce projet seul, est-ce possible ?

Il faudra que Sonatrach mobilise management à la fois technologique et surtout ses ressources humaines, certainement devant sous traiter certains segments notamment dans la liquéfaction puisque pour le transport cela ne devrait pas poser de problèmes. IL lui faudra également un autofinancement plus important que prévu, le projet devant subir certainement une réévaluation.

Par ailleurs il faut mentionner que le contentieux gaz naturel Sonatracxh sur le prix de cession du gaz n’est pas toujours réglé du fait que nous assistons depuis plus de 8 mois à une baisse du prix du gaz d’environ 40% sur le marché spot (marché libre soumis aux fluctuations boursières) notamment aux USA et les raisons de cette baise des prix sur le marché américain ont été longuement expliquées par le Docteur Chakib Khelil notre Ministre de l’Energie récemment, essentiellement de nouveaux procédés technologiques de recyclage du gaz L’Europe et donc l’Espagne devraient à l’avenir, fonction de l’offre et de la demande, faire jouer la concurrence entre les pays producteurs pour avoir un bas prix et la visite récente de Mr Poutine chef de gouvernement russe en Espagne pour d’importants contrats l’atteste, le prix actuel sur le marché spot, combiné à la crise mondiale baisse de la demande, étant en leur faveur . Durera t-il ? Tout dépendra d’une entente entre les pays producteurs, une OPEP du gaz dans la situation gazière mondiale actuelle étant une utopie, ne pouvant se réaliser du fait de la prépondérance des canalisations donc un marché segmenté ( plus de 70% du marché mondial). Tout dépendra de l’extension des GNL (mais avec ces bas prix cela n’est pas rentable) GNLs qui seuls peuvent répondre aux fondamentaux du marché boursier comme le pétrole. Pour l’Algérie heureusement qu’elle a réalisé la plupart de ses contrats à moyen terme ce qui fait qu’elle n’est pas touchée directement du moins à court terme.

Sonatrach n’est-il pas un acteur important pour l’approvisionnement de l‘Europe ?

Vous savez s’il n’y avait pas eu les retards signalés, il était prévu horizon 2012/2013 que la part de marché de Sonatrach, après la Russie et l‘Europe devait tourner autour de 12,5% des parts de marché et 14% horizon 2015 avec une exportation de 85 milliards de mètres cubes gazeux. Avec ce retard et certainement pour d’autres raisons techniques, le projet de Medgaz verra une année de retard devant entrer en fonctionnement fin 2010 au lieu de début 2009. Le problème qui se pose du fait d’une concurrence féroce, est que le temps c’est de l’argent et tout retard peut occasionner des pertes de part de marché. Cependant je pense que l’Algérie du fait qu’elle est proche géographiquement et que l’Europe ne voulant pas dépendre d’un ou de deux fournisseurs, reste un acteur important pour l’approvisionnement de l’Europe.

Il y a donc des opportunités en matière de gaz pour l’Algérie ?

Vous savez que les opportunités d’affaires dépendent dans tout projet et cela n’est pas propre à la sphère énergétique encore qu’elle est une sphère spécifique, de deux facteurs fondamentaux : le vecteur prix du marché et le vecteur coût et Sonatrach devra améliorer sa gestion par la baisse des coûts e prévoyant pour chaque section des comptabilités analytiques précises car un bilan consolidé a peu de signification.

Dans ce contexte, il faut préciser que le prix du gaz étant indexé sur celui du pétrole , que le coût est extrêmement élevé ( investissement hautement capitalistique et maturation lente ) et la marge réduite , le prix actuel trop bas pouvant freiner l’investissement dans ce secteur. Il serait souhaitable une entente entre les pays consommateurs et les pays producteurs pour un partenariat gagnant/gagnant pour les deux parties. Si le prix du pétrole va vers 90/100 dollars avec un cours du dollar d’environ 1,30 un euro, les opportunités s’accroissent. Si le prix varie ente 70/75 dollars ou moins pour un euro 1,50 dollar, sinon plus avec le dérapage actuel du dollar, les opportunités diminuent. Car les différentes sources d’énergie , charbon, hydrocarbures, solaire , nucléaire , éolienne , biomasse, ect sont en concurrence et l’investissement dans une énergie donnée est fonction de sa substituabilité qui dépend fondamentalement du prix de ses concurrents.

L’abandon partiel du charbon au profit des hydrocarbures le siècle passé et peut être l’abandon des hydrocarbures pour une autre source d’énergie vers 2025/2030, siècle, car faisons confiance au génie humain, ce n’est pas parce qu’il n’y avait pas de charbon mais que le prix du pétrole était concurrentiel par rapport au charbon permis grâce aux nouvelles technologies produites à grande échelle, ayant permis de réduire substantiellement les coûts et cela pourra se faire pour d’autres sources d’énergie à l’avenir. Pour preuve , selon les statistiques internationales, en 2009 les réserves prouvées d’hydrocarbures dans le cas du scénario le plus optimiste est de 40/50 ans alors que les réserves de charbon sont pour plus de 200 ans .

Quelles perspectives pour le gaz ?

L’Algérie n’est pas seule sur le marché mondial en rappelant que pour le gaz la Russie (plus de 35% ) l’Iran ( 15%) et le Qatar ( 10%) représentent pour ces trois pays plus de 60% des réserves mondiales avec des coûts compétitifs car on peut découvrir des milliers de gisements mais non rentables financièrement, l’Algérie ayant des réserves d‘environ 4500 milliards de mètres cubes gazeux et devant tenir compte de la consommation intérieure qui représentera selon le Ministère de l’Energie horizon 2015, si tous les projets se réalisent environ 75 milliards de mètres cubes gazeux avec les 85 milliards de mètres cubes exportables , soit une production dépassant horizon 2014 160 milliards de mètres cubes gazeux par an. Comme 10 à 15% des gisements marginaux ne sont pas rentables vous voyez la durée de vie renvoyant au lancinant problème de l’urgence d’une production et exportation hors hydrocarbures pour les générations futures. Bien plus, nous assistons à l’entrée de nouveaux acteurs notamment en Afrique et Amérique Latine, ces pays pouvant admettre un bas prix à cause des problèmes de financement rendus plus acerbes avec la crise mondiale actuelle.

Par ailleurs, il faut tenir compte des nouveaux projets gaziers européens qui viennent d’être lancés pour contourner le conflit entre la Russie , l’Ukraine et la Géorgie en mer caspienne et le principal concurrent de Sonatrach est la société russe Gazprom qui aune stratégie internationalisée et surtout les compétences et qui a su profiter, pour le pétrole, de la baisse des quotas OPEP étant devenu depuis juillet 2009 le premier exportateur mondial avant l’Arabie Saoudite. Comme il y aura lieu de tenir compte des enjeux futurs avec le réchauffement climatique de la fonte des glaciers en Mer Arctique, espace recelant d’importantes réserves de pétrole et de gaz sous réserve que les pays frontaliers s’entendent sur la future délimitation du territoire. Et surtout enfin de la nouvelle stratégie énergétique mondiale dont celle des USA qui sera déterminante, tenant compte du nouveau défi écologique et donc il faut être attentif à la prochaine réunion de Copenhague.

Il semble bien que l’on s’oriente vers ce nouveau modèle de consommation énergétique horizon 2015/2020, surtout si à cette réunion l’on vient avec des objectifs chiffrés de réduction des effets de serre notamment des USA et de la Chine principaux pays pollueurs, sans oublier l’Inde avec forcément le développement des énergies renouvelables dont le solaire. Les pays tant développés qu’émergents de préparent à cette nouvelle échéance qu entraînera des bouleversements géo stratégiques et économiques. L’Algérie a donc intérêt à être attentive à ces nouvelles mutations énergétiques qui conditionneront le développement futur du monde.