«Il a perdu le sens de l’action politique»
Le chef du gouvernement marocain a qualifié les dirigeants historiques du Polisario de groupe d’étudiants manipulés par El Gueddafi et adoptés par l’Algérie.
Abdelilah Benkirane est incorrigible. Il est en train de se forger une réputation de récidiviste notoire. Méritée à juste titre. 24 février 2013- 4mars 2013. A peine huit jours après qu’il ait déclaré que l’Algérie détient les clés de la solution du conflit qui oppose le Maroc au Front Polisario, il est revenu à la charge.
La question du Sahara est sans fondement, et «les héros de ce différend (les dirigeants historiques du Front Polisario, Ndlr) étaient un groupe d’étudiants trompés» a indiqué le chef du gouvernement marocain dans une interview publiée le 4 mars 2013 par le quotidien libanais Al Akhbar. Par qui auraient-ils été manipulés? «C’est l’ex-dirigeant libyen, Mouammar El Gueddafi, qui a joué le rôle du «séditieux» auprès de ces jeunes, et… l’Algérie les avait adoptés par la suite», confie-t-il, cité par la presse marocaine. Puis, comme à son habitude, emporté par sa verve incontrôlable, il fera l’amalgame entre la fermeture de la frontière terrestre algéro-marocaine et le conflit du Sahara occidental. «Il n’y a pas de différend entre les peuples marocain et algérien. Si les frontières sont ouvertes, tout le monde se rendra compte que c’était un différend artificiel. Nous espérons que ce jour-là ne soit pas lointain», a estimé le chef de l’Exécutif marocain.
Le porte-parole du ministère algérien des Affaires étrangères a tenté pourtant, de lui éclairer la lanterne en lui rappelant que le conflit sahraoui relevait de la responsabilité des Nations unies. Sans succès apparemment. C’était à l’occasion d’une interview de près de 50 minutes que le chef du gouvernement marocain avait accordée à des journalistes de TV5 Monde, de Radio France Internationale et du quotidien Le Monde.
«Tout le monde sait que le Sahara est marocain et que, dans le cadre de l’autonomie, on pourrait trouver une solution. Et si l’Algérie décide de régler ce problème, en une journée ce sera réglé», avait déclaré le 24 février 2012, Abdelilah Benkirane. Il s’agit d’une «problématique que l’Algérie a considéré devoir entretenir, avait-il cru bon d’ajouter. Réponse du berger à la bergère. «S’agissant de la question du Sahara occidental, et quitte à le répéter indéfiniment, cette question n’a pas de dimension bilatérale et elle ne relève d’aucune soi-disant ancienne logique. Elle relève de la seule responsabilité des Nations unies et tout le monde sait, et nos frères marocains les premiers, que la question du Sahara occidental est inscrite depuis fort longtemps sur les tablettes de l’ONU au titre des 16 territoires non autonomes dont le processus de décolonisation est suivi par le Comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples colonisés», lui avait rétorqué Amar Belani. Ce n’est pas la première fois que le chef du gouvernement marocain se fait prendre la «main dans le sac» lorsqu’il s’agit des relations algéro-marocaines.
«L’affaire du Sahara, ce n’est pas entre nous et le Polisario, mais entre nous et l’Algérie», avait effrontément affirmé, au mois de juin 2012, Abdelilah Benkirane à son homologue turc, Recep Tayyip Erdogan, en marge de la conférence des Nations unies sur le développement durable «Rio+20» qui s’est tenue à Rio de Janeiro, au Brésil, du 20 au 22 juin 2012. Ce n’est pas la première fois que la langue du chef du gouvernement marocain a fourché. Dérapage ou maladresse? «Je considère qu’Abdelilah Benkirane se livre à une sorte de bricolage permanent dans la conduite des affaires de l’État et qu’il a perdu le sens même de l’action politique», a déclaré Driss Lachgar, le nouveau Premier secrétaire de l’Union socialiste des forces populaires (Usfp) dans un entretien publié le 4 mars par le magazine Jeune Afrique…