« Nous, étudiants du département de français de l’université d’Alger 2 (Bouzaréah) et soutenus par nos enseignants, venons par ce communiqué dénoncer les irrégularités qui ont entaché le déroulement des concours de doctorat en socio didactique et en littérature, organisés le 15 décembre 2015.
Nous venons réclamer l’annulation de ces concours et la sanction des responsables de ce scandale sans précédent au département.
Des enseignants suivis ensuite par les étudiants ont alerté dès le premier jour du concours le rectorat puis le ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche scientifique de ce qui va se révéler à l’affichage des résultats, une fraude bien organisée : le 15 décembre, la direction de la post-graduation au ministère de tutelle reçoit un fax ; le 18 décembre, c’est le vice-recteur chargé de la post-graduation à l’université qui reçoit un courrier, puis un rappel le 23 décembre, pour dénoncer les irrégularités et requérir l’annulation du concours.
Le 18 décembre, un groupe d’enseignants et un groupe d’étudiants contestataires ont été reçus par le vice-recteur : à l’issue des entrevues, le responsable s’est engagé à répondre favorablement à l’injonction d’ouvrir une enquête qui lui a été adressée par le ministère suite au courrier d’un enseignant. A cette occasion, le responsable du doctorat « littérature » s’est joint au groupe des contestataires pour dénoncer le déroulement du concours, parce qu’il a été écarté des délibérations et de l’étude des dossiers.
« La fraude devient criarde »
Les listes des lauréats aux concours ont été affichées le 19 décembre 2013, en l’absence du chef de département, en séjour en France depuis le 16 décembre, et de la doyenne. A la lecture des noms des lauréats, la fraude devient criarde : le non-respect des procédures réglementaires de l’organisation des concours de doctorat révèle l’intention du comité de formation doctorale du département de favoriser des candidats recommandés, sans mérite, pour être promus lauréats. A travers le traitement des dossiers de candidature de deux filles de responsables à l’université d’Alger2 et de l’Ufc (Université de la formation continue) d’Alger, les irrégularités en vue de fraude se confirment : absence d’avis dans la presse de la tenue du concours ; dossiers de candidature incomplets (sans relevés de notes en l’absence de délibérations en master) ; incitation des candidats à déposer une décharge signifiant leur renoncement à des notes non rendues par un enseignant ; non respect des procédures d’anonymat ; non respect des procédures d’étude des dossiers de candidature ; absence des responsables des doctorats aux délibérations.
« Le rectorat ouvre l’enquête »
La contestation quittant l’enceinte de l’université pour aller sur la scène médiatique, le rectorat, sous la pression également du ministère, ouvre l’enquête.
La doyenne est convoquée le 26 décembre par le vice-recteur, à qui elle avouera sa méconnaissance des textes réglementaires et par là, son incompétence à contrôler le déroulement du concours. Les organes de presse, à travers plusieurs publications, relaient la contestation et mettent dans l’embarras le rectorat. Le 5 janvier 2014, le recteur signifie à la doyenne son limogeage.
Le staff de cette dernière, en signe de solidarité à son égard et surtout parce qu’il est impliqué dans la gestion catastrophique de la doyenne à des niveaux divers, la suit : chefs de département, vice- doyens, responsables pédagogiques déposent leurs démissions. En effet, au lieu de calmer les ardeurs de la doyenne, son staff a encouragé la surenchère dans l’abus d’autorité à l’égard des enseignants qui critiquent sa gestion : fermeture de formations ; suppression des primes de rendement ; annulation des soutenances des candidats qui travaillent sous leur direction ; refus de signer leurs bilans de recherche ; refus de financer leurs colloques, etc. Par contre, ses soutiens se comptent parmi ceux qui ont bénéficié de ses largesses pour l’aider à installer un système de corruption : bourses pour séjours à l’étranger ; séjours injustifiés dans les grands hôtels ; promotions indues ; heures supplémentaires injustifiées ; couverture d’enseignants amis séjournant à l’étranger et payés en Algérie, etc. Ce sont ces enseignants impliqués dans ces fraudes et affolés après son départ inattendu, qui vont orchestrer, dès le lundi 6 janvier 2014, pour un vain espoir de la maintenir à son poste, des journées de soutien à la doyenne.
« Concours confié à des enseignants instruits pour frauder »
Quand le vice-recteur convoque les membres du comité de formation doctorale du département de français, le 5 janvier, il apprend alors que les responsables des doctorats n’ont pas suivi le déroulement des opérations du concours.
D’autres membres déclarent aussi ne rien savoir sur les conditions dans lesquelles s’est déroulé le concours. Par négligence ou parce qu’ils étaient écartés des opérations, il devient clair que l’organisation du concours a été confiée à des enseignants instruits pour frauder et promouvoir une liste de lauréats préétablie.
Certains signes venant du rectorat et du nouveau doyen nous incitent à la méfiance quant à l’issue qu’ils veulent donner à l’enquête. Nous craignons l’étouffement du scandale.
C’est dans ce sens que nous interprétons : la mobilisation des membres du comité de formation doctorale et la responsable de section syndicale du département pour le maintien de la chef de département démissionnaire et responsable directe de la fraude ; l’incitation des étudiants de 4e année «classique » auxquels la chef de département, démise de ses fonctions, avait promis des délibérations clémentes en fin d’année, à faire circuler une pétition pour son maintien ; la lenteur avec laquelle le rectorat mène l’enquête et ses appels répétés à l’apaisement ; la lenteur avec laquelle le nouveau doyen ne procède pas au remplacement de la chef de département démissionnaire.
« Procéder à l’annulation pure et simple du concours »
Pour nous, de jour en jour et au gré de nouvelles déclarations, la fraude est établie définitivement. Nous sommes plus que jamais déterminés à porter notre plainte auprès de qui de droit. Nous souhaitons que le rectorat puisse avoir la sagesse de ne pas nier les faits de fraude, ni les minimiser, encore moins les étouffer. Nous le sollicitons afin de donner une suite favorable à nos revendications : établir la fraude, déterminer ceux qui en sont responsables, les sanctionner et procéder à l’annulation pure et simple du concours ».
Témoignages recueillis par l’AACC