François Hollande reconnaît « l’impact »des essais nucléaires en Polynésie, quid de l’Algérie ?

François Hollande reconnaît « l’impact »des essais nucléaires en Polynésie, quid de l’Algérie ?
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En visite en Polynésie, François Hollande a promis hier de revoir les indemnisations des victimes des essais nucléaires effectués par la France entre 1966 et 1996. Il a reconnu ce lundi 22 février l’impact de ces essaies sur la santé, assurant que « le traitement des demandes d’indemnisation des [en Polynésie] sera revu », rapporte l’AFP.

Quid des victimes algériennes dans le Sahara algérien entre 1960 et 1966 ?

Plus de 50 ans après, la question reste d’actualité puisque la législation française n’inclut toujours pas les victimes algériennes des essais nucléaires de la France. Dans la loi , adoptée en janvier 2010 qui ouvre la voie à une indemnisation pour les irradiés des essais nucléaires, rien n’a changé pour les Algériens. Le texte concernait exclusivement les victimes de la Polynésie française et les personnes touchées entre le 7 novembre 1961 et le 31 décembre 1967 dans le « Centre saharien d’expérimentations militaires des oasis » et les zones périphériques à cet établissement.

Le ministre français de la défense de l’époque, Hervé Morin, avait même laissé entendre que la population algérienne touchée était « pratiquement égale à zéro » puisque, avait-il argué, les tirs et les essais ont eu lieu « dans le désert ».

LG Algérie

La visite, fin janvier 2016, du ministre des Moudjahidine Tayeb Zitouni en France, la première du genre depuis l’indépendance, n’est aucunement le premier rappel de la part de la partie algérienne sur le problème. « Il est grand temps que l’Algérie et la France se penchent sur les dossiers en suspens, notamment ceux relatifs (…) aux indemnisations des victimes algériennes des essais nucléaires effectués à Reggane », avait souligné Tayeb Zitouni.

Pour ce ministre, ces dossiers passent avant la demande de repentance et les excuses sur le passé colonial exigé par l’Algérie. « Le règlement des dossiers en suspens passe avant, ensuite on pourra parler d’excuses », avait-il alors déclaré.

Un crime contre l’humanité

Des associations locales dans la région de Tamanrasset et des spécialistes des questions nucléaires soulignaient encore fin 2015 la nécessité de décontaminer la région In-Ecker, touchée depuis plus de 50 ans par la radioactivité engendrée des essais nucléaire de la France coloniale dans le Sahara algérien.

L’association Taourirt, qui active depuis 2012 dans la région de Tamanrasset, démontrait le caractère urgent de cette question, notamment du problème du nettoyage et de la prise en charge des victimes. Cette association s’emploie à faire aboutir une série d’objectifs visant à mettre en évidence les séquelles des essais nucléaires français dans la région In-Ecker.

Elle appelle à considérer ces essais comme des crimes contre l’humanité sur la population locale.

Taourirt notait alors les répercussions de ces opérations, dont les effets de radiations ionisantes affectent jusqu’à maintenant les populations riveraines, à travers de graves maladies perceptibles sur la santé humaine, animale et même végétale.

En 2014, c’était le chercheur et expert irakien en nucléaire Abdul Kadhum Al Aboudi qui avait invité les associations algériennes à se constituer en collectif national et établir une feuille de route à même de dépoussiérer ce dossier. M. Al Aboudi avait surtout noté le caractère urgent de la décontamination des sites touchés.

Au stade de la reconnaissance politique

L’avocate Fatima Zohra Benbraham indiquait à la mi-janvier 2016, lors d’une conférence à Oran, que le dossiers des essais nucléaires « est au stade de la reconnaissance politique ». Elle a expliqué que ce dossier, « lourd, pas facile à traiter, évolue doucement ».

Elle a toutefois révélé qu’il a atteint un « stade de reconnaissance politique après celle scientifique, technique et juridique ». Maître Benbraham avait affirmé, lors d’une rencontre dans le cadre du forum du quotidien « El Djoumhouria » à Oran, que cette reconnaissance est un pas vers la régularisation de ce dossier.

Elle a ajouté que la commission mixte chargée du dossier des essais nucléaires français « est en mesure d’accéder au secret politico-militaire et d’aboutir à des résultats » pour faire toute la lumière sur cette tragédie, tant pour la santé humaine que pour l’environnement.

« L’aboutissement à une reconnaissance politique des essais nucléaires du colonisateur français dans le Sud algérien est le fruit de nombreuses années d’un travail colossal entrepris avec plusieurs parties, dont les victimes de ces explosions et des juristes français », a déclaré l’avocate Benbraham.

Néanmoins, la position française et son amnésie sur la question entrave toujours cette « régularisation » du dossier.

« Tôt ou tard, la France devra reconnaître les crimes de guerre et contre l’humanité qu’elle a commis en Algérie pendant 132 ans… », avait affirmé le ministre des Moujahidine, Tayeb Zitouni.

Etre 1960 et 1996, la France coloniale a mené 210 essais nucléaires. 17 ont été réalisés dans le Sahara algérien.13 tirs étaient souterrains et 4 essais n’ont pas été suffisamment confinés. Lors de l’essai Béryl, le 1e mai 1962, un nuage radioactif d’une fréquence de 5 % et 10 % s’est échappée et provoqué une retombée radioactive sur une bande de 150 kilomètres.