Après une soirée festive entre Tulle, son fief de Corrèze, et la place de la Bastille, le nouveau président s’est mis au travail. Trois défis prioritaires l’attendent : préparer des rendez-vous internationaux, composer le gouvernement et remporter les législatives.
François Hollande, samedi sur un marché de Tulle, hasardait : « Lundi matin, c’est un autre temps, soit le repos, mais pas éternel, soit les responsabilités immédiates. » Élu président de la République française dimanche soir, c’est donc une croix sur l’option « repos » que trace le socialiste.
Bonjour les responsabilités. Après une courte nuit parisienne – il est rentré de son fief de Tulle à minuit pour s’exprimer place de la Bastille -, il arrive tôt à son QG de campagne, transformé en théâtre de la transition, pour se mettre au travail. Des défis immédiats et lourds l’attendent. Au chapitre calendrier, il faut arrêter la date de la passation de pouvoir avec Nicolas Sarkozy. C’est chose vite faite : ce sera le 15 mai. Mais ils seront côte à côte dès le 8 mai, car le chef de l’État en exercice a invité le président élu.
Et, depuis son élection, François Hollande a passé beaucoup, beaucoup de temps au téléphone. À 16 heures lundi, son ancien directeur de campagne, Pierre Moscovici, égrène lors d’une conférence de presse « la litanie » des représentants qui ont appelé le nouveau chef de l’État français : la chancelière allemande, Angela Merkel, le président américain, Barack Obama, le Premier ministre anglais, David Cameron, le Premier ministre espagnol, Mariano Rajoy, le Premier ministre belge, le Premier ministre canadien, le Premier ministre japonais, mais aussi le président polonais, le président du Pérou… Les ambassadeurs de Chine et de Russie ont fait porter des messages de leur dirigeant, et Hollande a eu aussi Herman Van Rompuy, président du Conseil européen, José Manuel Barroso, président de la Commission européenne, et Martin Schulz, président du Parlement européen.
Tournée internationale
De quoi commencer à rattraper cette image un peu faible sur la scène internationale, puisque aucun dirigeant européen n’avait voulu le recevoir durant sa campagne. Maintenant, Merkel assure qu’elle l’accueillera « à bras ouverts »… Sauf que l’entretien risque d’être musclé, Hollande souhaitant renégocier le pacte budgétaire voulu par Sarkozy et la chancelière allemande en mars dernier.
Ce sera son premier déplacement international, probablement le 16 mai, après la passation de pouvoir, donc. Ensuite, Hollande s’envolera pour Camp David et une réunion du G8 les 18 et 19 mai, avant Chicago et le sommet de l’Otan, les 20 et 21 mai. Il y annoncera qu’il retirera les troupes françaises d’Afghanistan avant la fin de 2012.
Mais il a aussi d’autres considérations à son ordre du jour. Au programme de cette semaine, le casse-tête de la composition du gouvernement. Le socialiste n’a cessé de dire qu’il attendait de connaître le résultat et le contexte dans lequel se trouve le pays pour se décider, et deux noms se détachent. Celui de son ami le président du groupe PS à l’Assemblée nationale, Jean-Marc Ayrault, qui semble avoir sa préférence, et celui de la patronne du PS, Martine Aubry, préférée de l’opinion.
« Un gouvernement d’urgence républicaine »
Pour le reste, lundi matin, c’est encore silence radio dans les rangs socialistes. Il est trop tôt pour évoquer la composition d’un premier gouvernement que Hollande a déjà dit vouloir paritaire. Delphine Batho, ancienne porte-parole du candidat, confie tout de même qu’ »il faut un gouvernement d’urgence républicaine pour prendre en compte la dimension immédiate de l’enjeu, de ce qui va se passer en Europe. Un gouvernement qui soit offensif contre la crise et capable de mener la bataille législative ».
Quelques choix semblent évidents, tant ces personnalités se sont imposées dans la campagne dans leur spécialité. Ainsi on devrait retrouver Marisol Touraine aux Affaires sociales, Vincent Peillon à l’Éducation nationale ou Jean-Yves Le Drian à la Défense nationale.
Ensuite, tous évoquent dès lundi matin l’importance de se jeter tête baissée dans la bataille des législatives. Dès lundi, Jean-François Copé a annoncé la couleur, les thèmes sur lesquels l’UMP fera campagne : refus de Hollande d’inscrire la règle d’or dans la Constitution, droit de vote des étrangers aux élections municipales, retour à la retraite à 60 ans ou encore fermeture de centrale nucléaire.
« Une cohabitation serait un facteur de désordre »
Alors, au PS, on commence à prévenir contre les risques d’une cohabitation. « Une nouvelle bataille électorale nous attend, les législatives. Les gens ont élu Hollande pour le changement, la réforme fiscale, la justice sociale, le redressement des comptes publics. Une cohabitation serait un facteur d’instabilité, de désordre », confie Delphine Batho.
Bernard Cazeneuve aussi martèle qu’il « faut éviter une cohabitation ». « Une élection est toujours perdable. Avoir une cohabitation à la tête de la République, donc un gouvernement qui ne permet pas à un président légitime de mener son projet, serait très difficile. »
Le patron des Radicaux de gauche, Jean-Michel Baylet, résume la mission du prochain gouvernement, dont il compte bien faire partie : « Il faut redresser la France et réconcilier les Français. » Bref, le repos, ce n’est pas maintenant.