François Hollande et les excuses pour les crimes commis en Algérie : On ne l’a pas bien compris

François Hollande et les excuses pour les crimes commis en Algérie : On ne l’a pas bien compris

De l’inconvénient de ne pas puiser l’info à la source. L’interview accordée à l’hebdomadaire Jeune Afrique par François Hollande, ancien secrétaire du PS (Parti socialiste) et candidat à l’investiture socialiste pour les élections présidentielles françaises de 2012, a donné lieu à de multiples commentaires dans la presse. Le sujet s’y prête amplement bien. Dans cet entretien titré « François Hollande : Je serai un président normal, pas un président ordinaire », François Hollande y évoque (Jeune Afrique semaine du 7 au 13 août) les relations entre l’Algérie et la France, notamment le passé colonial.

En particulier, il y évoque la fameuse question des excuses que devraient formuler ou non la France à l’Algérie au sujet des crimes commis durant les 130 ans de colonisation.

Toutefois, dans cette interview, M. Hollande a été interrogé sur un autre sujet : l’Algérie et le Printemps arabe.

Mais la presse algérienne n’a retenu que la première question. Faute, sans doute, d’avoir le texte intégral de l’entretien, celle-ci s’est donc contentée de travailler sur le compte rendu fait de cet entretien par l’agence officielle APS en date du mardi 9 août.

« François Hollande souhaite que la France s’excuse pour son passé colonial en Algérie », titre l’APS ce mardi 9 août.

Le lendemain, la dépêche est abondamment commentée.

« Il souhaite que la France s’excuse pour son passé colonial‎ », annonce le quotidien Liberté. « La France doit formuler des excuses », formule le quotidien l’Expression. « La France doit s’excuser auprès de l’Algérie pour son passé colonial », note de son côté Le Temps d’Algérie. « Excuses françaises à l’Algérie : Hollande les fera-t-il ? », s’interroge El Watan.

C’est à l’avenant.

Alors François Hollande a-t-il souhaité que la France formule des excuses à l’Algérie pour les crimes commis durant la colonisation française ? A-t-il dit expressément que la France doit s’excuser à propos de son passé colonial ?

DNA a pu lire l’intégralité de l’entretien de France Hollande paru dans Jeune Afrique. A la lecture, il en ressort deux choses.

Primo : les propos de l’ex-secrétaire général du PS ont été decontextualisés, pour ne pas dire tronqués.

Deuxio, la réponse à la deuxième question posée par Jeune Afrique à François Hollande, celle concernant le « printemps arabe », n’a pas été rapportée dans son intégralité.

Ce qui enlève du sens au propos de M. Hollande.

Le propos ici n’est pas de faire des mises au point aux confrères ou de leurs délivrer des leçons. Il n’est pas non plus de parler au nom du candidat à l’investiture socialiste ou à la place de Jeune Afrique. Chacun fait son métier comme il lui convient.

Toujours est-il qu’il existe un vrai inconvénient à ne pas puiser l’info à la source.

A la source, les propos de François Hollande sont moins tranchés. Moins affirmatifs. Voici donc les deux questions posées à François Hollande.

France Hollande et les excuses pour le passé colonial

Première question des deux journalistes de Jeune Afrique, François Soudan et Laurent de Saint Périer sur l’Algérie : La France doit-elle formuler des excuses pour son passé colonial ?

Réponse de François Hollande : « Je souhaite que les choses soient dites. Nous allons célébrer en 2012 le cinquantième anniversaire de l’indépendance algérienne : ce sera l’occasion de rappeler ce qu’est le passé : l’Histoire et ses douleurs multiples. Il ne faut pas nous figer dans une commémoration qui sera forcément différente dans l’évocation du souvenir en Algérie et en France. Nous devons être dans une relation de confiance mutuelle et dans la construction de projets communs. Tant de liens humains, culturels et économiques nous unissent…»

Ceci pour le passé colonial, la mémoire et les excuses…Passons à la deuxième question.

Deuxième question des deux journalistes : Pourquoi l’Algérie semble-t-elle à l’écart de « printemps arabe » ?

Réponse de François Hollande : « Il y a eu des secousses en ce sens, mais l’Algérie se souvient de la guerre civile. D’ailleurs, il s’y produit encore des actes terroristes. L’idée de la concorde civile demeure. L’Algérie doit pourtant faire un double effort de programme démocratique et de justice économique, par le biais notamment d’un partage de la rente gazière et pétrolière.»

Ce sont donc là, les deux seules questions qui ont été posées à Françoise Hollande concernant l’Algérie. Le reste de l’entretien concerne les ambitions et le programme du candidat aux primaires socialistes, sa vision des rapports de la France avec l’Afrique, le rôle de celle-ci en Libye, etc.

Ainsi, comme on peut le constater à la lecture des réponses intégrales de François Hollande, il n’a nullement exprimé le souhait que la France fasse des excuses à l’Algérie pour les crimes coloniaux. Il n’a pas non plus dit que la France doit formuler des excuses pour ces crimes coloniaux. Il a aussi formulé l’idée que les responsables algériens doivent respecter les droits démocratiques et doivent veiller à la bonne répartition de la rente pétrolière.

Pour paraphraser le général De Gaulle qui lançait en 1958 son fameux « Je vous ai compris » du balcon du gouvernement général d’Alger, François Hollande lui on l’a pas bien compris.