Évalué à près de 4 milliards d’euros, en progression de plus de 10 % par an, d’après une étude du cabinet Xerfi publiée en mars, alors que le cabinet Solis, spécialisé dans le marketing et les « sondages ethniques », estime à 5,5 milliards le chiffre d’affaires 2010 du secteur,
le marché du halal est au centre d’un scandale relevé après la diffusion d’un reportage de la chaîne cryptée française « Canal+ ». Réalisé par Feurat Alani et Florent Chevollau, ce reportage de 52 minutes sur le business du halal et sa face cachée a déjà provoqué la réaction de la communauté musulmane en France et huit élus locaux musulmans ont demandé, lundi dernier, la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire sur le marché du halal pour faire toute la lumière sur certaines pratiques commerciales qui « peuvent s’apparenter à de l’escroquerie publique, faute d’une législation claire et précise », selon un communiqué rendu public par ces derniers. Pourtant, ce dossier traité par « Canal+ » n’est pas nouveau puisqu’en juin dernier, Kamel Chibout, alors président de la fédération régionale Grand-Est de la Grande mosquée de Paris, la GMP, avait publiquement évoqué des « scandales liés au halal », lors d’une réunion à Lille. Une dénonciation qui lui a valu, selon Abdallah Zekri, membre du Conseil français du culte musulman, le CFCM, le dépôt d’une plainte de la part du partenaire de la GMP. Un partenaire mis en cause dans le documentaire, en même temps que les autres organismes certificateurs.
En février dernier, le même Kamel Chibout, natif de Jijel, avait appelé les trois grandes mosquées, celles de Paris, Évry et Lyon, à prendre en main cette question du halal en créant une commission nationale qui travaillerait sur sa certification du halal. C’est dire si le secret sur les dessous du marché halal n’en était déjà plus un. Des secrets ou plutôt des dessous dévoilés lors de ce reportage décortiqué par son réalisateur Feurat Alani lors d’une interview accordée à Al- Kanz, un site communautaire dédié aux consommateurs musulmans.
Ainsi, les musulmans français découvriront avec stupéfaction et indignation un véritable scandale lié au marché halal qui, de l’avis du réalisateur, engage la responsabilité de certains organismes de certification et à la malveillance, volontaire ou accidentelle de certains industriels qui se sont lancés dans le halal. « A vrai dire, il y a une véritable impunité dans le milieu du halal », assènera- t-il. Revenant sur l’historique du documentaire, diffusé dans sa première mouture de 26 minutes, le 11 octobre 2010, il dira qu’à la demande de la chaîne et devant les réactions suscitées, à la fois, au sein de la communauté musulmane de France et en même temps chez les non-musulmans, téléspectateurs de « Canal+ » ou acteurs du marché halal confondus, il a été décidé une nouvelle version du reportage en allant à la rencontre des consommateurs musulmans et de voir leurs réactions et/ou initiatives suite à la controverse que le sujet a suscité. A propos des difficultés rencontrées sur le terrain, il dira avoir recours à la caméra cachée pour obtenir des informations. Ce scandale risque de remettre en cause un label, longtemps garant d’une nourriture aux normes musulmanes en France et du coup semer le doute dans les produits déjà proposés ou achetés pour le ramadhan.