France, 50.000 maghrébins naturalisés en 2008

France, 50.000 maghrébins naturalisés en 2008

Pour avoir la nationalité française, la décision reviendra à partir de 2010 à la centaine de préfectures que compte l’Hexagone et non plus à l’administration centrale. C’est la principale disposition d’une réforme présentée lundi à Rezé, près de Nantes, où sont instruits les dossiers, par le ministre de l’Immigration, Eric Besson.

La réforme, déjà largement tracée par son prédécesseur Brice Hortefeux, a été conçue au 1er semestre 2008 dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP) pour parvenir à une « déconcentration » de la procédure de naturalisation par décret. En France, la naturalisation peut être acquise soit par décret après 5 ans de résidence, et à un certain nombre de conditions, soit par mariage après 4 ans de vie commune avec un partenaire ayant la nationalité de ce pays par le droit du sang ou le droit du sol.

« À quoi sert d’avoir une double instruction ? » a lancé Eric Besson en expliquant que, « jusqu’à présent, un étranger qui estime avoir les conditions requises pour accéder à la nationalité voit son dossier traité deux fois : sur place – au niveau préfectoral – et au niveau national », à la sous-direction à l’accès à la nationalité française, installée à Rezé. « Ce qui va changer, a-t-il poursuivi, c’est qu’il y aura dorénavant séparation de l’instruction faite par les préfets, et de la mission de contrôle, de pilotage et d’harmonisation qui va relever de l’administration centrale de mon ministère. » Les décisions de naturalisation resteront toujours prises par décret du Premier ministre. Eric Besson a souligné que le but était à la fois une « réduction des délais » pour les usagers et une économie pour l’État. Il a assuré que cette réforme n’attentait en rien à « notre volonté d’intégrer par la naturalisation ».

Selon les services de Rezé, il y a eu en 2008 quelque 91 000 naturalisations par décrets et 16 000 par mariage. Environ la moitié des naturalisés sont originaires d’un pays du Maghreb, 13% d’Afrique, 13% d’Asie, 6% de pays de l’UE, 7,2% d’autres pays européens et 5% d’Amérique. Le transfert de compétences vers les préfectures sera précédé par une période d’expérimentation dans 20 préfectures qui débutera le 1er janvier 2010. Les délégués CGT et CFDT de la sous-direction ont protesté contre cette réforme. « On va rompre l’égalité de traitement en confiant aux préfets les décisions d’octroi ou de refus », a déclaré devant le ministre Marc Bonnefis, secrétaire CGT de la sous-direction. « Au lieu d’un endroit unique où on peut harmoniser pour une égalité de traitement, il va y avoir un éclatement en 101 lieux de décisions ».

L’historien Patrick Weil, spécialiste reconnu de l’immigration, a estimé que la réforme « représente une atteinte au principe d’égalité. Un tel pouvoir régalien délégué aux préfets comporte naturellement un risque d’abus et de favoritisme politique. C’est pour cette raison que tous les grands pays démocratiques ont centralisé leurs procédures de naturalisation qui sont des procédures très complexes », a-t-il déclaré dimanche à l’AFP. Pour être naturalisé par décret, il y a des conditions légales à remplir : avoir une résidence stable et régulière en France depuis au moins 5 ans, remplir la condition de « bonnes vie et mœurs », justifier de son assimilation à la communauté française au niveau linguistique et culturel, ne pas avoir eu de condamnations pénales ni n’avoir fait l’objet de mesure d’éloignement ou d’interdiction du territoire. Même si ces conditions sont remplies, la naturalisation n’est pas automatique. Il peut y avoir acquisition de la nationalité par décret pour des situations particulières, par exemple pour des réfugiés, des anciens combattants, des étudiants de très haut niveau, des personnes âgées ou handicapées ayant une longue résidence en France.

Jusqu’à présent, les préfectures enregistrent, instruisent les demandes et émettent un avis. Pour équilibrer les écarts d’appréciation entre les différentes préfectures, les décisions finales sont prises par un service centralisé et spécialisé, la sous-direction de l’accès à la nationalité française à Nantes. L’acquisition de la nationalité peut se faire aussi par mariage avec un Français ou une Française dans les conditions suivantes : 4 ans de communauté de vie affective et matérielle après le mariage, le mariage célébré à l’étranger doit avoir été transcrit dans l’état civil français, enfin, l’étranger doit avoir une connaissance suffisante de la langue française. Les Algériens nés sous la colonisation peuvent s’ils résident en France demander une « réintégration » qui n’est pas obtenue automatiquement. D’autres peuvent aussi la demander parce que leurs aïeuls avaient la citoyenneté française par décret pendant la colonisation.