Un marché intérieur toujours dominé par la spéculation
Le secteur de l’agriculture est l’une des rares branches de l’économie nationale à enregistrer beaucoup d’avancées. Les contraintes en matière de financement, de statut des terres et de disponibilité des intrants ont été allégées. Mais, il reste d’énormes progrès à réaliser. Deux facteurs déterminants indiquent que des freins subsistent à l’essor du secteur et à l’amélioration de la sécurité alimentaire du pays. Dans un domaine qui correspond à un acte de souveraineté, l’Algérie reste paradoxalement dépendante des importations de semences étrangères.
Cette situation est entretenue par des lobbies de l’importation qui dominent le marché. Résultat : les agriculteurs se plaignent de pénurie et de la mauvaise qualité des semences locales et importées, en dépit des multiples contrôles des instituts spécialisés. Le cas qui illustre le mieux cette situation est l’abandon du projet de centre de biotechnologie de Guellal, à Sétif, qui devait, en partenariat avec les Canadiens, couvrir les besoins locaux en semences de pomme de terre et dégager des excédents à l’exportation.
Seconde limite : les pouvoirs publics n’évaluent pas les performances du secteur sous l’aune de la balance commerciale agricole.
Sur ce plan, le déficit demeure énorme. Les importations agricoles ont atteint plus de sept milliards de dollars au cours des neuf premiers mois de l’année 2011, contre moins de 300 millions de dollars pour les exportations.
La facture alimentaire concernant les céréales, le lait, le sucre et les légumes secs reste très importante. L’intégration de l’industrie agroalimentaire enregistre, en outre, un immense retard. Une exception : la filière lait où des progrès, certes encore insuffisants, ont été réalisés. Dans cette situation de forte dépendance à l’égard des importations, l’initiative privée n’est pas suffisamment libérée. Il faut reconnaître que l’actuel ministre de l’Agriculture tente d’encourager les professionnels à investir dans le secteur.
Mais cela reste en deçà des attentes, d’autant que le morcellement prononcé des terres agricoles du pays ne favorise guère l’émergence d’une agriculture performante. Le secteur est également miné par les détournements de subventions. Une situation qui se dresse contre l’efficacité des actions engagées. Morale de l’histoire : une hirondelle ne fait pas le printemps. En fait, la branche a besoin d’une démarche intersectorielle pour lever de telles contraintes.
En ce sens, le système de régulation bat de l’aile actuellement, faute de maîtrise du marché intérieur.
En effet, le dispositif n’a pas empêché que la pomme de terre atteigne le prix de 60-70 DA le kilogramme. Du coup, l’anarchie dans le commerce de gros et de détail se répercute sur les prix des fruits et légumes, devenus hors de portée d’une grande masse de citoyens, en dépit d’une forte progression de la production maraîchère et l’extension des surfaces réservées à l’arboriculture. Dans bien des cas, la qualité des produits agricoles laisse à désirer en raison de la mauvaise qualité de la semence. Cette situation caractérisée par la généralisation des pratiques spéculatives et une offre de moindre qualité reste aujourd’hui inadmissible. Elle constitue l’un des sérieux motifs de mécontentement des citoyens.
K. R.