Pour Abdelmadjid Tebboune, fini le monopole des Chinois dans le BTPH. Place aux entrepreneurs nationaux d’abord, et aux Européens ensuite, notamment dans le cadre du projet AADL qui sera relancé prochainement.
Le temps presse, mais pour avoir dirigé le secteur durant les années 2000, le ministre de l’Habitat et de l’Urbanisme, Abdelmadjid Tebboune, n’évolue pas sur un terrain inconnu. Bien au fait des rouages du bâtiment, il décide de secouer le cocotier, en s’adressant à l’acteur principal: les entrepreneurs. «Montrez-moi de quoi vous êtes capables», a-t-il asséné avant-hier lors d’une rencontre avec les représentants des entreprises nationales de construction, organisée à l’hôtel Mazafran à Alger.
«Ceux qui ont confiance en l’avenir de leur pays investissent», a-t-il estimé, ajoutant que l’accès des jeunes entrepreneurs aux marchés reste «une priorité pour les pouvoirs publics». M.Tebboune a exhorté les entrepreneurs algériens à investir dans le secteur, à s’équiper de matériel performant, à s’approprier les innovations dans le secteur du Btph et surtout à être plus audacieux. Car, a-t-il souligné, «la priorité sera désormais donnée aux entrepreneurs nationaux». Avec un franc-parler qui a surpris les participants à cette rencontre, le ministre de l’habitat a estimé que «la construction en Algérie est toujours artisanale».
Une déclaration qui tranche avec le discours triomphaliste des autorités. Il a précisé, dans ce contexte, que les entreprises nationales publiques et privées dotées de moyens humains et matériels considérables ne constituaient qu’une minorité, déplorant, d’autre part, le fait que certaines firmes utilisent encore des outils artisanaux pour réaliser des projets importants. «Il est regrettable que hormis la capitale et quelques rares wilayas, on ne trouve pas de centrale à béton de grande capacité», a déploré M.Tebboune.
Pour pallier à toutes ces difficultés, il a promis une batterie de mesures incitatives à même de booster le secteur et d’encourager les entrepreneurs. Le ministre a également promis de régler le problème des payements. En effet, l’une des principales difficultés dont se plaignent les opérateurs tient à cette difficulté d’encaisser leur argent au milieu des projets pour pouvoir achever leurs travaux. Cela d’une part. De l’autre, il a suggéré aux entrepreneurs «de se regrouper, ce qui permettra aussi de mieux vous encadrer», a-t-il souligné. «En vous regroupant, vous allez pouvoir améliorer vos parts de marché et vos capacités de réalisation», a encore ajouté le ministre.
Des textes à parfaire…
Mieux encore, le ministre de l’Habitat va plus loin puisqu’il a annoncé la création d’une direction au niveau de son ministère exclusivement réservée aux entrepreneurs et qui prendra en charge leurs doléances. Dans ce sens, le ministre a annoncé la tenue d’une réunion qui regroupera dans un mois, le ministre et les représentants des organisations patronales pour passer en revue l’actuelle réglementation régissant la construction en Algérie et examiner les préoccupations des entrepreneurs. Davantage encore, le ministre a promis la révision des textes exécutifs ainsi que des cahiers des charges.Cela sans compter que désormais le partenaire étranger ne sera qu’accessoire. M.Tebboune ouvre une nouvelle page. Fini donc le monopole des chinois dans le Btph. Place aux entrepreneurs nationaux d’abord et aux européens ensuite, notamment dans le cadre du projet Aadl qui sera relancé prochainement. M.Tebboune a précisé que le choix des entreprises chargées de la réalisation de ces programmes est en cours.
L’Aadl pour ressusciter l’espoir
Concernant la participation étrangère dans la réalisation des programmes Aadl, il a fait savoir que des délégations notamment espagnoles, portugaises, françaises et italiennes viendront prochainement en Algérie pour examiner avec les pouvoirs publics les voies et moyens de développer des partenariats mutuellement bénéfiques dans le domaine de l’habitat. Etant l’initiateur de ce programme Aadl qui a suscité un très grand espoir au sein des populations durant les années 2000, M.Tebboune compte le relancer de plus belle sous la même forme mais avec une révision à la hausse des prix, a-t-il annoncé.
«Les programmes Aadl seront relancés sous la même forme avec une actualisation car leur élaboration initiale remonte à une dizaine d’années et les données ont changé depuis notamment en matière de prix», a-t-il expliqué lors de la même rencontre avec les entrepreneurs. «Les négociations avec le ministère des Finances ont pris fin mercredi dernier et il a été décidé d’augmenter le prix du logement Aadl. Mais cela ne va pas affecter le bénéficiaire», a-t-il ajouté. Interrogé sur l’échéance du lancement de ces programmes qui intéressent notamment les gens ayant des revenus moyens, le ministre a répondu: «Pas encore. Nous sommes en train d’assainir ce qui reste des premiers programmes (lancés au début des années 2000)».
Pour le ministre, le prix du logement Aadl «avoisinerait 3,5 millions de DA et certainement inférieur à 4 millions de DA». Abordant l’épineuse question de la distribution des logements, le ministre de l’Habitat a reconnu les défaillances qui marquent cette opération. C’est pour cette raison qu’il a insisté sur la mise en place d’un système «transparent» et «équitable» de distribution pour faire bénéficier les véritables nécessiteux.
«Lorsqu’on verra une distribution de logements qui ne provoque plus de routes barrées ou de pneus brûlés et lorsque la demande reculera au rythme souhaité par les pouvoirs publics, cela veut dire que nous sommes sur la bonne voie», a souligné le ministre. Mais à voir le degré profond de la crise du logement en Algérie, il faut croire que le chantier est vaste… très vaste.