FLN : forcing médiatico-politique

FLN : forcing médiatico-politique

Formidable machine électorale, l’ex-parti unique fait baver tous les «présidentiables» et «candidats potentiels» qui, sans se découvrir, manœuvrent en coulisse pour tenter d’en prendre le contrôle, synonyme de conquête du Palais d’El-Mouradia, si Bouteflika décide de ne pas briguer un quatrième mandat, au mois d’avril prochain.

Ainsi donc, la guerre et la crise qui secouent présentement ce parti, unique dans les annales, se déroule de course tacite à la conquête de la magistrature suprême du pays. Comme il fallait s’y attendre, et comme l’avait écrit et prédit notre journal, depuis de nombreux jours, le départ de Belkhadem de la tête du FLN n’a non seulement pas permis de régler la crise qui secoue ce parti depuis… 2003, mais contribué au contraire à l’attiser jusqu’à en faire un facteur pouvant en provoquer la disparition pure et simple. Ainsi donc, plus d’un mois après le vote mémorable des membres du comité central (CC), qui avait permis in extremis de dégommer Abdelaziz Belkhadem, le FLN n’en finit plus de s’enfoncer dans une crise, dont il risque de ne jamais sortir, indemne. Celle-ci s’est accentuée à tel point que nous en sommes arrivés aujourd’hui à plusieurs courants et lobbies qui s’affrontent quasiment à couteaux tirés. Pour rappel, la clôture de cette session du 29 janvier passé, qui n’avait d’ordinaire que le nom, s’était faite dans un chaos indescriptible. C’est ainsi que les partisans de Belkhadem, qui gardent pas mal de «mordant» au point où ils ont su garder assez de cohésion pour contrôler près de la moitié des membres du CC, cette instance suprême entre deux congrès, ont décrété que celle-ci a bel et bien été fermée. Mais au lieu de décider que le FLN est désormais sans direction, sachant que les membres du Bureau politique (presque tous affidés au secrétaire général déchu), ils ont au contraire décidé de maintenir opérationnelle cette instance. Or, celle-ci aurait logiquement dû être dissoute immédiatement après le constat de vacance du poste de SG, attendu que c’est celui-ci qui désigne ses membres. Belayat, fin roublard, un des auteurs du coup d’État scientifique de 1996 qui avait permis de déposer Abdelhamid Mehri, a pris d’«autor» le contrôle du parti en décrétant qu’il était le membre le plus âgé du Bureau politique (BP), invoquant au passage un vague texte contenu dans les statuts du parti, et qu’il a réussi à interpréter à sa manière.

Un blocage quasi-absolu…

Cela a suffi, dans un premier temps, à encourager un Belkhadem aux abois, mais qui sait qu’il tient, là, l’ultime chance de sa vie. Celui qui, ces derniers temps éprouvait de plus en plus de mal à cacher ses ambitions présidentielles, a multiplié les contacts pour reprendre son poste de SG du FLN, sachant que celui-ci représente le «sésame» absolu pour accéder sans encombres au Palais d’El-Mouradia. Belkhadem, qui a pris une belle «option» sur l’ensemble de ses concurrents potentiels, pousse ses partisans à imposer le vote à bulletin nul, dans lequel il sait que même s’il n’obtient pas de majorité, ni simple, ni absolue, il n’en sortira pas moins largement devant les autres. Sillonnant très discrètement le territoire national, apprend-on de sources proches de ce parti, il est en passe de solliciter le soutien et l’aide de tout ce qui peut peser, de n’importe quelle manière, y compris les zaouïas.

Face à lui, le mouvement de redressement ne sait plus sur quelle partition danser. Partagé entre les «historiques» (comme Mohamed-Seghir Kara, Rachid Boukerzaza ou bien Abdelkrim Abada) et les «nouveaux débarqués», (comme le sont les ministres FLN en poste, à l’image d’Amar Tou, Tayeb Louh, Abdelaziz Ziari et Abdelkader Messahel), celui-ci n’arrive toujours pas à s’entendre sur un candidat unique. Des sources qui suivent de très près les pérégrinations homériques de ce parti, franchement pas comme les autres, s’aventurent à supposer que si aucun accord n’a pu tomber sur un «candidat consensuel» capable de barrer la route à Belkhadem, c’est qu’aucun signe n’est venu d’en haut. Car, expliquent encore nos sources, «il est de notoriété publique (comme l’avait avoué une fois Boualem Benhamouda, ancien SG de ce parti), que les responsables d’une formation politique comme le FLN ont toujours été désignés d’en haut». C’est ainsi que plusieurs noms sont en circulation, redoublant d’ingéniosité, dans un forcing médiatico-politique sans précédent, pour faire accroire qu’ils sont l’«Élu», la personne désignée d’en haut. Parmi eux, on peut citer Boualem Bessaïeh, président du Conseil constitutionnel, mais qui n’est même pas membre du CC, donc inéligible, Mohamed Boukhalfa, et même le sulfureux Amar Saidani, ancien président de l’APN, que toutes les casseroles qu’il traîne n’ont pas suffi à le dissuader pratiquement du porte-à-porte auprès des membres de cette instance pour tenter de leur faire accroire qu’il aurait reçu le feu vert de la part de «qui de droit».

Il va sans dire que cette mémorable foire d’empoigne se déroule sur fond de précampagne présidentielle. Celle-là même qui explique au passage la persistance de la crise qui secoue un autre parti qui a sa place sur l’échiquier politique, celui de l’ancien Premier ministre, Ahmed Ouyahia.

Wassim Benrabah