Le secteur de l’informel a bel et bien imposé sa loi
Le ministère du Commerce a implicitement reconnu qu’une partie des prix des produits de large consommation échappait à son contrôle.
Mission impossible. Les pouvoirs publics ne viendront pas à bout des spéculateurs. Ni manipulation. Ni mensonges. Les Algériens ne sont pas des gogos! Comment peut-on, en effet, dans un pays où l’économie est dominée à 40% par l’informel, se permettre d’affirmer que les pouvoirs publics «contrôlent» une grande majorité des produits de large consommation (sans préciser lesquels, Ndlr) écoulés sur le marché national? En voulant rassurer les Algériens sur la hausse des prix, les services du département du commerce chargés de veiller à leur équilibre, n’ont fait, en réalité, que s’enfoncer.
«La majorité des produits écoulés sur le marché national, notamment ceux de large consommation, sont soumis au contrôle de nos services», a indiqué à l’APS le directeur du contrôle de la qualité et de la répression de la fraude au ministère, Noureddine Laoua, à la veille du mois de Ramadhan. Concernant les produits de consommation qui échappent au contrôle des services du ministère, il s’agit essentiellement des «marchandises écoulées sur le marché informel», a-t-il ajouté. M. Laoua veut-il minimiser le poids de cette «mafia» qui contrôle, entre autres, pas moins de 65% du marché des fruits et légumes? C’est le coeur même du problème. C’est l’origine de cette flambée des prix qui gangrène le pouvoir d’achat des Algériens et qui a fait que plus de huit millions d’entre eux seront contraints d’avoir recours au «couffin du Ramadhan» pour «atténuer» leurs souffrances et laisser de côté leur dignité.
Le responsable du ministère du Commerce ne pipe pas mot sur l’autre partie (de ces produits de consommation de base, Ndlr) aussi infime soit-elle, qui échappe au contrôle de ses services. Serait-elle sous la coupe des spéculateurs? Nous n’en saurons pas plus. C’est l’histoire de la bouteille à moitié pleine ou à moitié vide.
La situation est présentée comme cela arrange. Sans doute pour ne pas avouer son impuissance. Il est donc nécessaire de clarifier les choses. Quels sont ces produits sur lesquels se ruent les Algériens? Les plus largement consommés pendant le Ramadhan sont les viandes (rouge et blanche, les légumes frais et secs…).
Vraisemblablement, il y a un flou qui est entretenu sur ce point. Le marché est seul juge, le seul arbitre à trancher dans ce type de débat qui n’en cache pas moins un paradoxe. Que dit-il? Le kilogramme de viande ovine est cédé à pas moins de 1200 dinars, le poulet à 350 dinars alors que les pois chiches dont on avait annoncé l’importation de 9000 tonnes pour faire baisser son prix, se négocient autour des 300 dinars. Ceux de la courgette et de la carotte sont passés tout simplement du simple au double en espérant qu’ils ne franchissent un autre palier. Le directeur du contrôle de la qualité et de la répression de la fraude du ministère du Commerce a sans doute parlé trop vite comme l’a fait son patron.
Le successeur d’El Hachemi Djaâboub avait assuré que «toutes les conditions sont réunies pour assurer une disponibilité des différents produits durant ce mois sacré, qu’il s’agisse des céréales, de la semoule, de la farine, des légumes secs, du lait et de ses dérivés, des viandes, des fruits et des légumes frais». Affirmant que «les marchés enregistreront une abondance des produits à des prix abordables pour le consommateur».
Les produits sont certes disponibles, mais à quels prix? Le secteur de l’informel a bel et bien imposé sa loi. En plus d’avoir conseillé aux Algériens de se serrer la ceinture pendant le mois sacré, le ministère du Commerce veut leur faire avaler des couleuvres…