Le rapport de conjoncture économique et sociale du 1er semestre 2015 du Conseil économique et social vaut son pesant d’or. Il a abordé de manière très détaillée et chiffrée la situation économique et sociale du pays, en relevant particulièrement les changements intervenus durant cette période caractérisée par la chute vertigineuse des prix du pétrole.
Parmi les observateurs les plus avertis, certains se demandent pourquoi une telle évaluation intervient-elle avec tant de retard. A cette question, somme toute légitime, le ministre de l’Industrie et des Mines, qui a assisté lundi à la présentation de la synthèse du rapport du Cnes, a fourni une réponse qui mérite d’être citée. Il a estimé, en effet, que la restitution de toutes ces statistiques et données sur l’économie algérienne et la politique gouvernementale est une «performance qu’il faudrait encourager». Ancien membre de cette institution, Abdesselam Bouchouareb sait de quoi il parle. Il connaît parfaitement les tares du système algérien d’information et les limites de l’ONS (Office national des statistiques). Le Cnes a accompli donc un travail titanesque en fournissant aux autorités publiques, aux experts, aux différentes institutions, ainsi qu’aux médias, un document fort d’une centaine de pages, structuré en huit chapitres essentiels.Le Temps d’Algérie qui s’est procuré en exclusivité une copie du rapport vous en dévoile les principaux points abordés. Il s’agit, entre autres, de la situation financière, du commerce extérieur, de l’état de l’économie réelle, du pouvoir d’achat et du climat social du pays. Loin de mettre le feu aux poudres, le Cnes dresse un état des lieux catastrophique de la gestion des finances publiques, s’interrogeant sur le recul des revenus du Fonds de régulation des recettes (FRR) et le déficit alarmant de la balance des paiements qui pourra atteindre, d’ici fin décembre 2015, 30 milliards de dollars, sous l’effet des transferts des bénéfices des entreprises étrangères en activité en Algérie.
Le rapport du Cnes interpelle également le gouvernement sur l’érosion du pouvoir d’achat des Algériens, d’autant plus que près de 50% du revenu des ménages est consacré à la couverture des besoins alimentaires. Exit les frais médicaux, les charges de loyer, d’effets vestimentaires, la scolarité des enfants et les frais de transport ou d’entretien de la voiture. La situation est vraiment préoccupante, surtout avec l’annonce des augmentations des taxes sur les prix des carburants et de l’électricité dans le cadre de la loi de finances 2016. La diversification de l’économie algérienne devient dans ce contexte une nécessité absolue, selon le Cnes. L’Exécutif est appelé donc à revoir carrément sa politique en introduisant des réformes structurelles à même d’atténuer le choc extérieur, s’annonçant durable et préjudiciable.
Il devient urgent, souligne par ailleurs le Cnes, d’engager une réflexion pour procéder à l’élaboration d’un plan d’émergence à l’horizon 2035 et de disposer d’une structure de prévision, d’évaluation et d’analyse. Autrement dit, le Cnes s’attend plutôt à un changement décisif de la politique économique pour rompre définitivement avec cette perpétuelle crainte des fluctuations du marché pétrolier.
