Effarant ! 80% des PME algériennes ne recourent pas aux banques pour financer leurs investissements. Est-ce pour un problème de liquidités ? “Non, absolument pas”, ont répondu hier à l’unisson les participants à une journée parlementaire organisée par l’APN autour de “l’entreprenariat algérien face à la banque : réformes et défis”. “On a des liquidités disponibles au niveau des banques, mais le problème du financement reste entier”, a indiqué Réda Hamiani, président du FCE devant les députés, le ministre de l’Investissement et un représentant du ministre des Finances.
Mais où se situe donc le problème ? “La banque reste dans la culture de la demande de la garantie”, note-t-il tout en précisant : “Si vous n’avez pas un bien immobilier en l’adossant à votre demande, vous n’obtiendrez pas de financement.” Et ce sont les jeunes promoteurs qui sont les plus lésés en la matière, dépourvus de patrimoine, contrairement aux entrepreneurs d’un certain âge. Aux yeux de Hamiani, “il y a un arrangement tacite entre les banques publiques et privées où les banques publiques s’occupent de l’investissement et les banques privées s’occupent de commerce”. “On ferme les banques sous prétexte qu’il y a eu un accident Khalifa”, a-t-il spécifié. Cette situation ne peut pas rester en l’état, estime-t-il, et ce, pour une simple raison : “Pour la croissance d’une entreprise, les financements sont très importants”, tranche Hamiani. Et le déficit en financement est à son tour à l’origine d’un déficit en matière de création d’entreprises, tient-il à préciser pour sensibiliser des représentants d’institutions financières présents à la rencontre. “Nous sommes au tiers de ce que devrait avoir notre pays en termes d’entreprises et nos entreprises n’ont pas la taille des entreprises marocaines ou tunisiennes”, fait-il remarquer tout en déplorant le fait que 95% d’entre elles sont de très petites entreprises (TPE).
La petitesse de la taille des entreprises est directement imputée “au système de financement”, note-t-il. Mais comment en est-on arrivé là ? “Les gouvernements qui se sont succédé ont pourvu l’économie de toutes les institutions financières qui existent de part le monde. Les banques, les caisses de garantie, les fonds d’investissements et les sociétés de leasing”, explique Hamiani, regrettant néanmoins le fait que ce n’est pas pour autant que “le financement a été fouetté”. Et la création en 2009 du Fonds national d’investissement (FNI), qui a pour vocation le soutien des grands fonds d’investissement, n’a servi, selon le patron du FCE, qu’“à acheter des avions Air Algérie, à conforter la politique du médicament vis-à-vis de Saidal, mais vis-à-vis des entreprises privées, rien n’a été engagé”. Et de lancer : “On est largement en decà du potentiel financier de l’entreprise dévolu, car il y a 240 000 entreprises qui se créent et 60 000 disparaissent, et les 140 000 entreprises restantes évoquent le problème du financement en premier lieu.”
Intervenant de son côté, le P-DG de l’Institut international de management (Insim), Abdelhak Lamiri, a estimé que “les banques en Algérie connaissent beaucoup de contraintes qui limitent leurs actions”, parmi lesquelles il citera d’entrée l’absence d’une vision économique d’ensemble qui, à son tour, est impactée sur les banques. Pour se faire convaincre, il fera observer que “nous avons une culture économique collectiviste, les relents de l’économie planifiée n’ont pas disparu”. Il donnera en exemple des experts dans les hauts rouages de l’État qui, dit-il, “pensent que les politiques hyper-centralisées des années 1970 auraient pu donner de bons résultats”.

Selon Lamiri, les politiques économiques du gouvernement sont élaborées en fonction des “pensées socialistes”.
Intervenant, de son côté, le ministre du Développement industriel et de la Promotion de l’investissement, Amara Benyounès, a annoncé l’institution, la semaine prochaine, d’une commission chargée d’étudier la problématique liée au rapport entreprise-banque.
N M