Au moment où le gouvernement cherche à mobiliser l’épargne, la finance islamique est négligée.
La finance islamique intrigue, voire inquiète. Comment une religion, l’islam peut – elle promouvoir une finance différente? Quels sont ses fondamentaux? Quelles sont ses règles? En quoi sont-elles différentes de la finance classique? C’est à ces questions qu’ont tenté de répondre, mi-mai, de nombreux experts invités par Finances & Conseil Méditerranée afin d’expliquer ses fondamentaux.
L’un des intervenants fut justement Francis Papazian, président de Finances & Conseil Méditerranée suivi de Kader Merbouh, directeur de l’executive master «Principes et pratiques de la finance islamique» de l’université Paris-Dauphine. «La finance islamique, ses règles de base, son fonctionnement, son intérêt» fut l’intitulé de sa conférence.
Il y a eu aussi Randi Carolyn Deguilhem, historienne, directrice de recherche au Cnrs,, responsable du Groupement de recherche international. Elle s’est exprimée sur le thème: «Waqfs en terre d’islam, l’économie des waqfs ou le statut des biens communs en terre d’islam.» Quant à Bernard Paranque, membre du Codir de FCM, économiste, délégué général à Kedge Business School: «En quoi la finance islamique est-elle une finance plus éthique?» s’est-il interrogé.
Le regard d’un banquier sur cette finance différente a échu à Jean Ticory, secrétaire général de la Caisse d’épargne Provence-Alpes Corse. Il est constaté que la finance islamique est loin de bénéficier de la préférence des populations de la région Afrique du Nord et de certains pays du Moyen-Orient, comme on pourrait le penser. Le phénomène, qui croit de façon très dynamique en Europe, en Asie et dans le Golfe, bute, apparemment, sur une résistance que l’on n’arrive pas pour le moment à expliquer comme c’est le cas en Algérie.
Cette finance peut prendre la forme de «soukouk» ou de «takaful» en assurances. Seules quelques institutions se penchent sur ces créneaux en Algérie comme en Tunisie et au Maroc. Selon les estimations des professionnels du secteur, le «takaful» ne représenterait que 2% du marché de l’assurance en Tunisie. En 2010, une étude du comité général des assurances estimait qu’il atteindrait 10% du marché tunisien en 2018.
Signe de développement: quatre formations se sont spécialisées en finance islamique et enseignent aussi le «takaful» dans le pays: Essec (École supérieure des sciences économiques et commerciales) de Tunis, l’université Zitouna, l’université de Sfax, l’Iset (Institut supérieur des études technologiques) de Radès
A souligner que le Maroc devait promulguer dès la fin de l’année 2014, une loi bancaire qui permettrait le déploiement de la finance islamique. Attiré par la perspective de financements venus du Golfe et de nouveaux dépôts bancaires, le Royaume s’inscrit avec beaucoup de retard dans une tendance mondiale.
Le marché de la finance islamique était réglementé depuis 2007 par une circulaire de la Banque centrale détaillant trois produits financiers de types islamiques commercialisables au Maroc. Il demeure très restreint, largement inférieur à celui développé dans des pays européens à majorité chrétienne. Ce secteur a été largement délaissé par les gouvernements précédents. L’encours des produits bancaires alternatifs est essentiellement représenté par les produits «Mourabaha», équivalents de crédits à la consommation, commercialisés par Dar Assafaâ.