Fin du vote dans les casernes, urnes transparentes et instance indépendante, Les chemins escarpés de la démocratie

Fin du vote dans les casernes, urnes transparentes et instance indépendante,  Les chemins escarpés de la démocratie

2014-vote_68_953697774.jpgLes prochaines élections n’en seront que plus transparentes

Allons-nous assister à des élections sans fraude? C’est un test aussi bien pour le pouvoir que pour l’opposition dont on connaîtra enfin l’exact poids dans la société.

Comment changer d’époque en douceur? Difficile challenge pour l’Algérie qui entame sa mue dans un environnement international et régional hostiles. Il fallait d’abord changer de ton et de tonalité envers l’opposition. L’impliquer dans cette tâche ardue dans une conjoncture de crise aggravée par la baisse des prix du pétrole. En révélant son projet de constitutionnalisation d’un mécanisme indépendant de contrôle et surveillance des élections, le président Bouteflika vient de tendre la main à cette opposition à la veille de la célébration du 61e anniversaire du déclenchement de la guerre de libération.

Le chef de l’Etat vient par cette action, surprenante, accéder à l’une des principales revendications des partis d’opposition. Plus encore, le chef de l’Etat attribue à cette même opposition un rôle actif, dont la saisine du Conseil constitutionnel. C’est ainsi que le président Bouteflika entend, «parachever» les «réformes politiques et de gouvernance», avec pour finalité de parvenir à une pratique démocratique ´´apaisée dans tous les domaines´´ à travers des garanties constitutionnelles, de recours et pratiques nouvelles de nature à instaurer la confiance nécessaire dans le processus électoral. C’est à ce prix que la Constitution révisée assortie de pratiques et droits nouveaux pourrait contribuer à ´´l’affirmation d’une démocratie plus apaisée dans tous les domaines, ainsi qu’à davantage d’épanouissement des énergies des acteurs politiques économiques et sociaux du pays au service de notre peuple, le peuple qui est la source exclusive de la démocratie et de la légitimité et le seul arbitre souverain de l’alternance au pouvoir». Hier, les réactions de cette même opposition étaient mitigées. Des partis «foncièrement» opposés au pouvoir comme le MSP de Abderrazak Makri et Jil Jadid de Sofiane Djilali, expriment un acquiescement, même timide, à cette instance.

Cette nouvelle donne auguret-elle d’une volonté sincère de dialogue politique avec l’opposition? Il faut attendre que soit rendu public le projet de la révision constitutionnelle.

Il ne s’agit pas de dévitaliser l’opposition par cette offre, mais d’avancer sur ces sentiers escarpés d’une démocratie arrachée au prix des luttes qui ont commencé dès les premiers jours de l’Indépendance: le Printemps amazigh d’avril 1980, les manifestations populaires à Constantine en 1986, ensuite à Oran, aux événements d’Octobre 1988 et à la guerre contre l’extrémisme islamiste durant toute une décennie. Le président Bouteflika semble emprunter cette méthode d’opérer à doses homéopathiques en vue d’assouvir une aspiration démocratique de la société. Il fallait «détricoter», une situation très complexe sur fond de confusion du politique, de défense des privilèges liés à la rente pétrolière et à la corruption, il fallait un travail d’orfèvre pour aboutir à une situation normalisée. L’un des premiers actes de cette démarche remonte en fait à janvier 2004 lors de la suppression des bureaux spéciaux, dans le cadre des propositions d’amendement de la loi électorale qui a été votée à l’APN. Il y a eu en 2006, l’adoption des urnes en verre. Un symbole physique que l’urne n’est pas bourrée et un effet psychologique sur les votants que l’élection est transparente. S’ensuit la batterie des mesures prises depuis avril 2011, à savoir la réforme de la loi électorale, la loi sur les partis, les Codes de wilaya et communal jusqu’aux changements profonds opérés dans le corps des services de renseignement pour aboutir à l’annonce de la création de ce mécanisme indépendant de surveillance des élections.

La décision permettra de lever les équivoques et la suspicion entretenue face à la crédibilité des élections dont les résultats n’ont jamais été approuvés par l’opposition et depuis l’ouverture démocratique. S’il y a rengaine du trucage des élections et le bourrage des urnes c’est parce que la pratique existait. Est-ce la fin de cette suspicion? Allons-nous assister à des élections sans fraude? C’est un test aussi bien pour le pouvoir que pour l’opposition dont on connaîtra enfin l’exact poids dans la société.