Fin du congrès international féminin, Le statut de la femme à l’aune de l’évolution politique de l’Algérie

Fin du congrès international féminin,  Le statut de la femme à l’aune de l’évolution politique de l’Algérie

le Congrès international féminin, se déroulant au Centre des conventions d’Oran depuis le 28 octobre, a clôturé ses travaux par deux journées bien distinctes pour les congressistes, ayant été invités, vendredi, à une visite au cœur de la confrérie Alawiya à Mostaganem suivie d’un parcours touristique à Oran.

La veille, la journée avait été consacrée à la poursuite des travaux et des échanges ayant pour points communs la question du statut de la femme, de sa situation au cœur des conflits et donc de la construction d’une paix durable qui ne pourrait se faire sans la prendre en compte.

Alors que dans les travées du CCO, les adeptes des confréries invités au congrès ont laissé planer une atmosphère particulière faite de dévotion et de baisemains envers les chefs des confréries, le débat a pris une autre tournure avec la parole des féministes.

En effet, si Bentounès, le chef de la confrérie Alawiya, coorganisatrice du congrès féminin, avait à l’ouverture tenté d’éviter le volet politique de ce rendez-vous, pour se concentrer sur son message de paix et du vivre ensemble, “La parole de femme”, titre générique du congrès, c’est faite politique avec les féministes invitées.

LG Algérie

C’est certes seulement au sein d’ateliers et non en plénière que les débats sur le statut et droits de la femme ont eu lieu, comme avec Wassyla Tamzali, militante et ancienne directrice du droit des femmes à l’Unesco. Celle-ci, aux côtés d’Iqbal Gharbi, docteure à l’université Zeïtouna (Tunisie), lancera la réflexion autour de “la condition de la femme musulmane et plus particulièrement algérienne”, sous le prisme de “l’évolution politique du pays”.

L’ancienne directrice de l’Unesco qui avait, pour Liberté, expliqué les raisons qui l’ont poussée à participer à un congrès organisé par une confrérie soufiste, le dira sans ambages : “Je suis de celles qui disent que tout est politique, et pour expliquer la condition de la femme en Algérie il ne faut pas lire le Coran, il faut se rapporter à l’histoire de l’Algérie.” Évoquant alors la place de la femme durant la révolution et l’après-révolution où “comme il était devenu plus difficile d’expliquer aux femmes ce que l’on attendait d’elle, on a eu recours à la religion et elles ont baissé les bras”.

Ce recours à la religion a été également évoqué par la docteure Iqbal Gharbi, qui décortiquera bien des versets et des sourate du Coran, montrant à titre d’exemple que l’islam a aboli la dilapidation, que le tutorat et la polygamie ne sont pas musulmans, que le droit de divorcer est acquis aux femmes et de conclure l’une de ses prises de parole par “le texte (le Coran, ndlr) ne parle pas, ce sont les personnes, les hommes qui le font parler”. Au cours de cet atelier, bien des participants ne manqueront pas de mettre en relief ce paradoxe : “Alors que l’on a des sociétés de plus en plus islamisées où l’évocation de Dieu est partout, on arrive à des situations de déshumanisation de la femme et de comportement en contradiction totale avec le Coran et une régression très grande dans les 4 écoles après la révélation.” Wassyla Tamzali aura encore les justes mots pour d’une part se défendre d’avoir un discours agressif avec cette analyse en forme d’autocritique. “Je pense que nous, les laïques, nous n’avons pas la légitimité reconnue pour influencer les opinions publiques, la seule chose que nous pouvons faire c’est exiger du pouvoir des lois laïques, des lois civiles reconnaissant l’égalité homme-femme.”

Précédemment, c’est une autre voix de femme algérienne, qui s’est particulièrement fait entendre en plénière, sur la question de la paix durable, de la culture de la paix. En effet, Leila Zerrougui, représentante spéciale du Secrétaire général des Nations unies pour les enfants, a évoqué, non sans engagement et émotion, les situations de conflits et de guerres avec leurs impacts sur les femmes et les enfants : “Sur 23 situations de conflits recensés dans le monde, 80% affectent des sociétés et des populations musulmanes. Les pays africains et arabes représentent les deux tiers des 23 pays.”

La femme qui représente la moitié de l’humanité ne peut être épargnée et, au contraire, est particulièrement ciblée du fait de la nature des conflits, guerres internes où la religion, où l’ethnie sont manipulés à des fins politiques pour des objectifs économiques. L’intervenante dira encore dans ce contexte qu’il faut impliquer les femmes lorsqu’on travaille sur la paix durable : “Pour un processus de paix et de sécurité dans le monde, les gens qui travaillent sur les conflits ont compris qu’ils ne peuvent pas mettre fin aux conflits si on ignore cette dimension-là.” Avec ainsi comme un écho au dernier message de Bentounès de la Tariqa Alawiya insistant sur ce “vivre ensemble” qui sonne comme un nouveau slogan qu’il compte porter à l’international et qui y inclut les femmes.

D L