Le calvaire des voyageurs d’Air Algérie devrait prendre fin dans les jours à venir, suite à l’arrêt de la grève du personnel navigant commercial, décidé dans la soirée de jeudi.
Aussi paradoxal que cela puisse paraître, c’est le patron de la Centrale syndicale, Sidi-Saïd, flanqué de Djenouhat, qui est allé à la rencontre du syndicat autonome, en tant que représentant de l’État ! Cette manière de faire intrigue énormément, d’autant plus que le patron de la Centrale syndicale, tout comme le représentant du PNC affirment avoir négocié directement avec le Premier ministre, Ahmed Ouyahia.
Le P-DG d’Air Algérie, fraîchement installé s’est, pourtant, dit ouvert au dialogue. En tout état de cause, la reprise du travail, comme exigée par la direction générale d’Air Algérie était le préalable à l’ouverture du dialogue, y compris pour ce qui concerne le cas des personnes licenciées.
Il reste à savoir jusqu’où ira la direction générale dans la satisfaction des revendications du PNC. Ce dernier demande pas moins de 106% d’augmentation de salaires et un statut semblable à celui des pilotes. Des exigences difficilement réalisables, d’autant plus que cela risque de mettre le feu aux poudres chez les autres corps de métier d’Air Algérie qui ne vont certainement pas se taire et demander, eux aussi, des augmentations, sinon semblables, du moins conséquentes. La suspension de la grève, qui en était à son quatrième jour, mettra fin au calvaire des milliers de passagers bloqués depuis lundi dans les aéroports en Algérie et à l’étranger.
Par ailleurs, Air Algérie a eu recours “aux compagnies étrangères pour transporter ses passagers sans conditions, avec acceptation de la levée des pénalités tarifaires”. Une “location d’appareils avec un équipage complet auprès de compagnies de frètement” a été également décidée par la compagnie qui a donné “des instructions à ses escales à l’étranger pour la prise en charge des passagers”.
Jeudi matin, le gouvernement a appelé à “l’ouverture d’un dialogue avec les travailleurs dans le cadre du respect strict de la loi”, estimant qu’il n’y a pas lieu de prendre l’État et les citoyens en otage.
Le Premier ministre, M. Ahmed Ouyahia, a déclaré jeudi à Alger que le gouvernement avait donné des instructions pour “l’affrètement d’un plus grand nombre d’avions” afin de faire face aux perturbations résultant de la grève du personnel navigant commercial (PNC) de la compagnie Air Algérie.
Dans une déclaration à la presse en marge de la clôture de la session de printemps du Conseil de la nation, le Premier ministre a souligné que le gouvernement “avait accompli son devoir en donnant d’abord les instructions nécessaires à l’affrètement par Air Algérie du maximum d’avions et l’autorisation aux compagnies étrangères, dans la mesure de leurs moyens, d’assurer le transport des voyageurs algériens par des vols supplémentaires”.
Le gouvernement appelle également à “l’ouverture d’un dialogue avec les travailleurs dans le cadre du respect strict de la loi”, soulignant qu’“il n’y a pas lieu de prendre l’État et les citoyens en otage”. Mais cette crise a été notamment marquée par l’effacement du ministre des Transports qui aura attendu la journée de mercredi pour faire une déclaration à partir de M’sila, alors que son homologue français avait déjà fait deux déclarations et un déplacement à l’aéroport d’Orly sur un sujet qui concerne, de prime abord, les responsables algériens.
Comme quoi, le sous-développement n’est pas seulement une question de technologie et de moyens matériels, mais aussi une question de culture.
Des négociations qui n’ont pas satisfait tout le monde
Sidi-Saïd et Djenouhat, arrivés jeudi aux alentours de 17h à l’aéroport international Houari-Boumediene, ont eu toutes les peines du monde pour trouver des interlocuteurs valables. Les grévistes étaient à bout de nerfs, épuisés par quatre jours de grève durant lesquels ils étaient obligés de rester à l’intérieur de l’enceinte aéroportuaire au risque de se voir retirer leur badge. Le responsable du collectif du PNC, Yassine Hamamouche, a présenté Sidi-Saïd comme représentant de l’État. Deux personnes ont été désignées pour négocier avec le patron de la Centrale syndicale. Au bout d’une heure de conclave, il a été décidé de reprendre le travail et d’entamer les négociations à partir de dimanche. Cette décision a provoqué un tollé chez le PNC qui s’est laissé aller à des insultes et autres accusations, “on s’est fatigué pendant quatre jours, pour revenir bredouille”, entend-on sur toutes les lèvres.
Mais la colère n’était pas seulement du côté du PNC, les syndicalistes affiliés à l’UGTA ne cachent pas leur colère contre leur secrétaire général “pourquoi a-t-il attendu jusqu’à jeudi pour se déplacer ? Pourquoi a-t-il ignoré les sections syndicales affiliées à l’UGTA et pourquoi est-il venu au secours d’un syndicat autonome ?” se demande Achour Beldjilali, du syndicat du fret.
Pour lui, “on a voulu casser Air Algérie” et il citera le cas du responsable de la Fédération des transports, maintenu, malgré son âge avancé (64 ans) par Sidi-Saïd et promu par Wahid Bouabdallah au rang de directeur central alors qu’il ne travaillait plus depuis des années. Tout en estimant qu’il est du droit du PNC de réclamer des augmentations de salaires, le syndicaliste affirme que les syndicats affiliés à l’UGTA avaient lancé un appel à la sagesse, en vue de préserver la compagnie et ont demandé la levée immédiate des sanctions qui pèsent sur les grévistes.
Il est vrai que la grève a énormément profité aux compagnies concurrentes, dont certaines ont réalisé ce qu’elles ne peuvent pas faire en deux ans d’activité ordinaire.
Pour le syndicaliste, il existe une volonté de casser Air Algérie et des gens qui agissent en dehors de la compagnie au profit des concurrents,“qu’on arrête de gérer Air Algérie à partir du Club-des-Pins et des hauteurs d’Alger. Qu’on arrête de jouer avec l’avenir de la compagnie nationale au profit d’intérêts personnels”.