Le fils et la mère condamnés pour attentat à la pudeur sur mineures à Haï Yasmine

Le fils et la mère condamnés pour attentat à la pudeur sur mineures à Haï Yasmine

par M. Nadir

Le fils et la mère condamnés pour attentat à la pudeur sur mineures à Haï Yasmine

H. Omar, sa mère et une voisine ont été condamnés, dimanche par le tribunal criminel d’appel d’Oran, à des peines de trois ans ferme et une année de prison avec sursis pour s’être rendus coupables d’attentat à la pudeur avec violence contre un mineur, pour le premier, et incitation à la débauche et corruption de mineurs pour les deux autres.

Deux adolescentes en fugue

Le 12 février 2016, deux collégiennes habitant à Haï Yasmine se rendent chez une camarade de classe résidant dans le même quartier pour lui demander de les héberger pour la nuit. Pour des raisons qui n’ont pas été déterminées, S. Rania Nour El Houda, 17 ans, et T. Nadjet Maissa, 16 ans, ont quitté le domicile familial et cherché refuge chez leur amie. C’est le frère aîné de celle-ci, Amar, 25 ans, marié et père d’un enfant, qui ouvre la porte aux deux fugueuses. Il est seul à la maison mais, devant la détresse apparente des deux adolescentes, il accepte de les laisser entrer : «Je les connaissais. Il était 22 heures environ, ma sœur n’était pas là. Je leur permis d’entrer parce que je ne pouvais pas les laisser dehors», dira-t-il plus tard.

Le lendemain, les parents des deux adolescentes signalent leur disparition à la police qui apprend très vite qu’elles sont chez H. Omar. Des agents se rendent au domicile du jeune homme mais ont beau frapper à la porte, B. Fadéla, la mère de Omar, refuse d’ouvrir. Une fois la police repartie, elle emmène les deux fugueuses chez une voisine du nom de S. Fatima qui les hébergera pendant quelques heures, avant que la police ne revienne à la charge pour emmener les collégiennes et les rendre à leurs familles. Les parents de Nour El Houda et de Nadjet Maissa finiront par porter plainte contre H. Omar pour attentat à la pudeur.

Corruption de mineures ?

Une enquête est ouverte par la police qui interroge les présumées victimes, B. Fadéla et S. Fatima. Quant à H. Omar, il a disparu de la circulation et est considéré comme étant en état de fuite.

Dans leurs dépositions, les deux adolescentes affirment qu’elles ont passé la nuit dans la chambre d’Omar et que celui-ci a attenté à leur pudeur en usant de violence. D’ailleurs, l’une d’elles présente un hématome au visage provoqué par le coup que le violeur présumé lui aurait donné. Une expertise médico-légale confirme que les deux adolescentes présentent des traces de rapports intimes contre nature, et que la marque au visage résulte effectivement d’un coup de poing. Les deux victimes présumées évoquent également l’existence d’un certain Habibou qui serait venu remettre à Omar des boissons alcoolisées. Ce qui pousse les enquêteurs à envisager la thèse d’un réseau de débauche de mineures.

Interrogée, Fadéla, 45 ans, nie les faits qui lui sont reprochés : non, elle n’a pas séquestré les deux adolescentes et si elle n’a pas voulu ouvrir à la police, c’est en raison de la terreur qu’elles ont manifestée. De son côté, S. Fatima reconnait avoir caché les filles mais rejette les accusations de séquestration ou de corruption de mineure.

H. Omar réapparaît après que le dossier est transmis au juge d’instruction. Il confirmera que les adolescentes ont passé deux nuits chez lui mais niera avoir eu des rapports intimes avec elles, encore moins les avoir violées avec violence.

Condamnations en première instance

Au vu des déclarations des uns et des autres, des résultats de l’expertise médico-légale, de la fuite de Omar et des éléments contenus dans le dossier de l’accusation, le magistrat instructeur décide d’inculper les suspects : Omar sera poursuivi pour attentat à la pudeur avec violences contre mineur de seize ans, selon l’article 335, alinéas 1 et 2, du code pénal ; sa mère et leur voisine seront, elles, inculpées pour avoir favorisé la débauche ou la corruption d’un mineur de moins de 18 ans. Les trois accusés risquent une peine de réclusion à temps de 5 à 10 ans.

Un premier procès se tient en janvier dernier : Omar écope de trois ans de prison ferme tandis que Fadéla est condamnée à 18 mois avec sursis et que Fatima est acquittée. Le parquet fait appel et c’est ainsi que le procès est rejugé ce dimanche 6 mai au tribunal criminel d’appel.

A la barre, Omar jure qu’il n’a jamais eu de rapport consentis ou forcés avec ses accusatrices (absentes à l’audience, Ndr) : «Je reconnais que j’aurais dû les éconduire, leur demander de rentrer chez elles. Mais je ne les ai pas touchées. D’ailleurs, nous n’étions pas dans le même lit, elles ont dormi par terre», soutiendra-t-il revenant sur les déclarations faites devant le juge d’instruction et rappelées par la présidente d’audience, selon lesquelles tous les trois avaient dormi dans le même lit. Concernant Habibou, l’individu évoqué par les adolescentes, l’accusé niera jusqu’à son existence : «Je ne connais aucun Habibou, c’est une invention, comme le viol dont elles m’accusent».

Le ministère public veut des peines de cinq et 10 ans

De son côté, B. Fadéla rejettera les accusations qui pèsent sur ses épaules : «J’avais bien demandé à Omar de faire sortir les fugueuses mais il m’a prié de les héberger parce qu’elles n’avaient pas où aller», racontera-t-elle en revenant sur l’épisode de son refus d’ouvrir la porte à la police : «Elles pleuraient, elles étaient terrifiées, c’est pour cela que je n’ai pas ouvert». L’accusée ne saura toutefois pas que répondre quand le ministère public lui fera remarquer que l’attitude la plus sage aurait été qu’elle avertisse les parents des filles ou qu’elle les contraigne à passer la nuit dans sa chambre à elle, et non celle de son fils.

Dans un réquisitoire moralisateur, le représentant du ministère public mettra en avant le fait qu’Omar savait que les fugueuses étaient mineures en leur offrant l’hospitalité dans sa propre chambre. Il rappellera les résultats de l’expertise médico-légale qui confirme l’attentat à la pudeur avec violence pour requérir la peine de 10 ans de prison contre l’accusé. Concernant Fadéla, il soutiendra que si elle était innocente, elle aurait dû appeler la police pour signaler la présence de fugueuses mineures chez elle. Au lieu de cela, dira-t-il, elle leur permet de passer la nuit dans la chambre de son fils. Pour le magistrat, il ne fait aucun doute que la mère a encouragé la débauche et la corruption des deux mineures ; pour cela, il requerra la peine de cinq ans de prison ferme.

«Des mineures qui n’en ont pas l’attitude»

Si, pour l’avocat de Omar, son client a commis une erreur en accueillant les collégiennes, cela ne veut pas dire qu’il soit coupable de viol. Le défenseur axera sa défense sur l’attitude et la psychologie des deux mineures qui, dira-t-il, n’en sont pas, en réalité : «Quel genre de mineures quitteraient le domicile familiale la nuit ?», s’interrogera-t-il en affirmant qu’elles n’ont pas eu un comportement de mineures. Il ira même jusqu’à suggérer, avec des allusions à peine voilées, qu’elles avaient (déjà) une vie dissolue. L’avocat demandera l’acquittement de son client pour absence de preuves et de témoins des viols présumés, mais prendra soin de réclamer les plus larges circonstances atténuantes si le tribunal aboutissait à un verdict de culpabilité.

En l’absence du défenseur de Fadéla, l’avocat du fils plaidera l’acquittement de l’accusée en soulignant l’absence de preuves à charge : « Le dossier de l’accusation ne comporte aucun élément de preuve soutenant les charges», dira-t-il en substance.

Après délibérations, le tribunal condamnera H. Omar à trois ans de prison ferme et sa mère à une année avec sursis.

Absente de l’audience, S. Fatima écopera de la même peine que Fadéla alors que le ministère public avait requis cinq ans de prison.