La technologie fait ses preuves en raccourcissant les distances et en abrégeant le temps. Cependant, il va falloir encore attendre pour que la technologie vienne au secours de ceux qui perdent des heures et des heures devant les guichets des ApC pour un document qui pourrait se régler en quelques minutes.
Il est de pure et de sacrée coutume que les APC soient le théâtre de tensions, de foules, de longues files et de disputes à chaque rentrée sociale, où le recours à ces endroits enregistre un pic.
Il est connu également que les citoyens peuvent avoir plus de courage pour faire un aller-retour vers le désert qu’à avoir affaire au guichet de l’état civil. La technologie fait ses preuves en raccourcissant les distances et en abrégeant le temps de plusieurs actions mais il va falloir, sans le moindre petit doute, patienter encore pour que la science et la technologie viennent au secours de ceux qui perdent devant les guichets des heures et des heures pour une simple procédure qui pourrait se régler en quelques petites minutes.
Une tournée dans quelques APC algéroises fait constater un important afflux depuis les premières heures, et de longues et pénibles files qui ne s’achèvent pas et qui plus est jouent sur les nerfs. Il y a lieu de souligner que les élèves scolarisés constituent la population la plus forte sur les lieux, et l’encombrement des demandeurs fait d’ores et déjà stresser les administratifs avant même que les livrets de famille fassent leur chaîne sur les guichets. Dans la journée d’avant-hier, l’APC de Beni Messous s’est avérée très exiguë pour contenir le nombre important de citoyens. Les guichets du service de l’état civil ne disposaient que de trois agents pour «servir» les centaines de demandeurs qui attendaient leur tour.
A l’entrée déjà, les chaînes ont été mises de côté pour céder le passage à la foule. Venus pour leur quasi-totalité pour des extraits de naissances, l’ambiance était électrique entre les citoyens qui font la chaîne et entre ces derniers et les administrateurs de l’APC. Face à cette forte demande et à l’étroitesse de la salle par rapport au nombre de citoyens, nous avons demandé aux agents qui se trouvaient au guichet si un quelconque plan de travail spécial ne sera pas mis en place pour maîtriser le nombre de demandes pour faire face aux lenteurs des guichets.
La réponse est négative car selon nos interlocuteurs, «on ne recrute pas de travailleurs temporairement» en plus poursuivent d’autres «ce ne sont pas seulement les citoyens qui vivent le clavaire durant ces jours, nous aussi nous travaillons dans une pression indescriptible et inimaginable durant ces jours, nous avons parfois affaire à des gens violents qui nous menacent puisqu’ils trouvent qu’il est anormal de faire une longue chaîne pour un seul document. Mais pourquoi les citoyens viennent-ils tous en même temps, attendent-ils la dernière minute pour la délivrance de leurs papiers, alors que l’APC était totalement vide durant le ramadhan», s’exclame une jeune fille qui travaille au guichet.
Mais la panne et l’origine du calvaire de la délivrance des papiers ne se limitent pas seulement à ces explications, car les solliciteurs ont d’autres constats à faire. A commencer par la non-intégration des systèmes informatiques dans ces administrations publiques. Le remplissage des documents se fait encore à la main. Pis, la délivrance d’un extrait de naissance prend plus d’une journée. C’est dire que tous les citoyens font d’abord la chaîne pour déposer le livret de famille, avec à l’intérieur un papier qui note les documents demandés et puis reviennent le lendemain pour récupérer leurs documents. Ce qui est jugé
«très pénible» comme procédure puisqu’il est absurde de réserver deux journées de notre temps pour déposer ou récupérer un papier. «Moi j’ai passé la matinée d’hier à faire la chaîne pour déposer mon livret de famille, et je suis revenue aujourd’hui pour récupérer les extraits de naissances de mes enfants et il faudrait que j’attende encore puisqu’ils ne sont pas prêts. Je n’arrive même pas à comprendre quelle logique accepte de gaspiller deux journées pour d’aussi simples papiers», fulmine une femme qui a fini par exprimer sa colère à haute voix.
Elle n’est pas la seule d’ailleurs, car les protestataires et les mécontents sont nombreux : «nous sommes en 2011 et vous travaillez encore avec des stylos», «nous avons demandé des papiers et non la fabrication d’un avion ou d’un bateau», «nous sommes ici et si vous avez des problèmes on peut vous aider» entend-on par ci par là à l’intérieur de l’Apc, comme le reflet de la situation kafkaïenne qui régnait à l’intérieur. D’autres ayant su garder leur bonne humeur applaudissent et félicitent ceux qui ont enfin obtenu leur «visa» ; «il faut bien se défouler ici dans cette chaleur et cette pauvre Apc n’a ni climatiseur ni ordinateur. Comment voulez-vous qu’on soit calmes» répondait un adolescent à l’agent de sécurité qui exigeait le silence dans la salle.
Au cœur de la foule, à l’intérieur d’une quasi-présence des jeunes et adolescents, un vieux n’a trouvé d’autre moyen que de faire éclater sa colère car une adolescente était écrasée dans la file d’attente. Alors que cette dernière n’a même pas fait attention à lui, le vieil homme l’a bien regardée dans ses yeux en lui disant: «tu as l’âge de la fille de ma fille, alors pas la peine de me regarder ainsi…».
Par ailleurs, il y a lieu de souligner que les fautes commises par les préposés dans l’écriture des noms sont récurrentes, le comble c’est qu’il faudrait refaire la chaîne de nouveau, alors que ce n’est pas aux citoyens de payer les erreurs des employés.
Autre problème qui concerne les citoyens qui viennent d’autres wilayas est que même en s’adressant au responsable en lui expliquant qu’on doit rentrer le jour même et en lui présentant la preuve qu’ils habitent ailleurs, il leur demande de passer au guichet et de réexpliquer la situation, mais «le problème c’est que l’accès qui mène vers les guichets est complètement soudé», indique une femme venue du sud pour ses extraits de naissance à Alger.
Par Yasmine Ayadi