Canicule, vague de chaleur, feux de forêts, de larges surfaces de broussailles et d’arbres détruites. C’est le topo qui a marqué la wilaya de Tizi Ouzou au début du mois de septembre. Si cette région du pays dont plus d’un tiers de la superficie totale est constituée de massifs forestiers et couvert végétal, a connu une première partie de l’été 2014 plutôt clémente et sans fumées noires, elle n’a pas échappé, par contre, au syndrome des flammes réduisant en cendres des pans entiers de sa végétation aussitôt le mois de septembre arrivé.
Ainsi, il est devenu quasi coutumier que la région de Tizi Ouzou soit en proie à ces vagues d’incendies tardifs après le record de 5 000 hectares ravagés par le feu en 2012 et l’épisode infernal de la saison dernière lorsque la région a connu un déluge de feux entre le mois de septembre et octobre 2013 trahissant la satisfaction de la population locale qui croyait avoir échappé aux incendies avec l’arrivée de l’automne. A cette époque, plusieurs centaines d’hectares d’arbres fruitiers, principalement des oliviers, et de forêts ont été détruits. S’en est suivie aussi une polémique sur l’origine et la simultanéité de ces incendies alors que la saison des grandes chaleurs tire à sa fin.
Les doutes se dirigeront davantage vers la nature criminelle de ces incendies à partir du moment où les zones ciblées sont les massifs constituant la richesse végétale de la région comme les forêts de Yakourene et Mizrana. Ces deux massifs présentent des potentialités énormes en termes de productions forestières et jouent un rôle important au plan écologique. Néanmoins, la Conservation des forêts, elle-même, a maintes fois pointé du doigt des réseaux de braconniers qui convoitaient ces forêts pour des desseins pour leur exploitation illicite. Ces éléments viennent ainsi renforcer, voire privilégier, la piste criminelle dans le déclenchement de ces feux de forêts.
Pour cette année, la région se dirige-t-elle aussi vers la réédition du scénario de l’année précédente ? Loin d’avancer une hypothèse ou une autre mais un élément nécessite d’être relevé, à savoir, ce sont les forêts de Yakourene et Mizrana qui sont à nouveau les cibles privilégiées des récents feux de forêts qui se sont déclenchés durant cette première semaine de mois de septembre. En guise de bilan provisoire livré par la direction de la Conservation des forêts de la wilaya de Tizi Ouzou, il en ressort pas moins de 1 360 hectares de couvert végétal, toutes catégories confondues, qui ont été ravagés par les incendies à travers le territoire de la wilaya dans le sillage de cette nouvelle vague incendiaire. Au total, 176 foyers de feux de forêts ont été enregistrés. La répartition de ces incendies dans le temps donne lieu à une moyenne de 8 hectares/jour qui sont détruits dans la wilaya de Tizi Ouzou. Dans le détail, le bilan des dégâts fourni par l’instance de wilaya dénombre 194 hectares de forêts, 368 hectares de maquis, 36 hectares de broussailles et 369 hectares d’arbres fruitiers avec une forte prépondérance d’oliviers et de figuiers tels. Les pertes engendrées successivement par les feux de forêts vont au-delà de l’aspect écologique et pèsent lourdement sur l’économie locale. Pour cette saison, la Conservation des forêts vient de recenser aussi la destruction de 15 000 arbres fruitiers, 76 ruches pleines de production de miel. Pas moins de 7 bâtiments d’élevage avicole en activité ont été également en proie aux flammes avec la mort de plus de 3 000 poulets et une soixantaine de dindes.
Au rythme qu’observe la recrudescence des incendies de forêts, le risque de voir le potentiel végétal de la région réduit à néant n’est pas à négliger. Le patrimoine forestier de Tizi Ouzou, convient-il de rappeler, s’étale sur quelque 112 000 hectares, dont 48 000 hectares de forêt, principalement le chêne-liège (23 000 ha). Avec de telles superficies, la wilaya est l’une des principales régions forestières du pays à l’instar de Jijel et Béjaïa.
Mourad Allal (L’Eco n°96, du 16 au 30 septembre 2014)