Le gaspillage est érigé en règle à Guelma, même chez les familles à moyen et faible revenu. Un constat relevé à l’occasion des fêtes familiales et même dans les cérémonies funéraires d’un parent.
Des dépenses exorbitantes sont faites lors des fêtes de mariages, de réussites aux examens de fin de cycles scolaires…, pour sauver les apparences.
Ces comportements qui prennent de l’ampleur ces dernières années, sont qualifiés d’exhibitions arrogantes et trompeuses. Faut-il rappeler la citation «faut pas jouer les riches quand on a pas le sou». C’est surtout la gent féminine qui cherche à se faire valoir quel que soit le prix.
Certaines familles ont parlé de ce qui se passe derrière ces apparences «remplies de paillettes». Elles ont avoué qu’elles s’étaient endettées jusqu’au cou «pour pouvoir se positionner sur l’échiquier social local» afin de satisfaire l’entourage.
A Guelma, les fêtes familiales donnent de plus en plus des sueurs froides aux organisateurs. «Réservation dans les salles des fêtes, dans les agences de voyages, en passant obligatoirement, pour les mariages, par la sélection des meubles et de l’électroménager, sans compter le séjour dans un hôtel de luxe pendant la lune de miel», s’indigne un jeune couple d’enseignants dans la ville de Guelma. Et d’enchaîner «toutes ces dépenses ne garantissent pas la pérennité du couple, qui entame sa nouvelle vie tout essoufflé sur le plan financier, une situation qui va gâcher le quotidien de la toute nouvelle petite famille, et la suite vous la connaissez !». Même son de cloche pour des citadins conservateurs de la ville de Guelma, qui jugent ces pratiques insensées, et qu’«il faut donc faire revenir ces familles à la raison». «Certes, les fêtes familiales font partie de nos coutumes, mais il faut faire l’essentiel et éviter ce qui est inutile», indique une assistante sociale exerçant dans une structure de santé publique. Avant d’ajouter : «Dans une société dominée par l’esprit de concurrence déloyale, on peut concevoir qu’il y a de multiples raisons qui expliquent la décadence, notamment celle de continuer à gaspiller de cette façon».
Ammi Mahmoud, un ancien cadre d’administration, quant à lui, dénonce les gaspillages dans les cérémonies funéraires. Selon lui, de nos jours, des familles ont perdu la raison, «même dans ces moments de tristesse, elles veulent se faire voir». « C’est absurde de gaspiller dans les cérémonies funéraires, cela est contraire au principe de l’Islam qui rappelle aux fidèles que le décès d’un proche devrait être un moment de prières et de recueillement, donc pourquoi autant de dépenses, avec l’installation des tentes et des chaises ? », s’interroge-t-il. «Finalement, la famille du défunt se trouve obligée d’accueillir les parents, les voisins, les collègues et même les riverains les plus éloignés, et dont la prise en charge devient de plus en plus coûteuse», regrette-t-il. Décidément, même ce moment de recueillement, de tristesse et de douleur se trouve aujourd’hui frappé de plein fouet par des effets de la société actuelle. Il est devenu, par la force des choses, un moment de rencontres conviviales et de distractions, comme en témoignent les mets et les friandises les plus sophistiqués, distribués, notamment le jour du «farg», troisième jour du décès. Certes, les familles de Guelma sont attachées à ces pratiques coutumières, et qui font partie de leur vie, «mais il est regrettable de les voir aujourd’hui malmenées par des changements absurdes et brutaux», estiment des anciens de la cité, dont le rôle devient de plus en plus aléatoire.
Noureddine Guergour