S’il y a bien un secteur où l’on ne consomme que du national, c’est bien celui des viandes à l’occasion des fêtes de l’Aïd. C’est sacré. Et le label algérien, surtout celui de Ouled Djellal, est connu et très apprécié.
Sur ce plan-là, pas besoin d’une campagne – qui se précise – pour encourager le produit national. Il y a aussi cette autosuffisance réelle, malheureusement occultée, qui pousse les Algériens à se passer, comme autrefois, des importations. En effet, l’Algérie n’importe plus de moutons, comme elle l’a fait en 1992, de la lointaine Océanie. Son cheptel estimé, selon la saison, par les services du ministère de l’Agriculture, entre 8 et 9 millions de têtes, suffit largement à couvrir ses besoins, notamment en périodes exceptionnelles, durant lesquelles le tiers environ est sacrifié. En réalité, n’était le trafic aux frontières, à l’Est comme à l’Ouest, où il était bradé, le mouton algérien (certains consomment du caprin aussi) suffirait amplement à réguler le marché national. Ce n’est guère une coïncidence si les Tunisiens ont dû recourir, depuis deux ans déjà, à l’importation pour stabiliser leur marché. En 2012, ce sont les éleveurs roumains qui ont comblé, avec 100.000 bêtes importées, le déficit. Cette année encore, le ministère tunisien du Commerce s’est résigné à donner le feu vert pour l’importation de 3.000 têtes, à partir de l’Espagne, pour permettre aux Tunisiens de procéder au sacrifice rituel, à un prix abordable. C’est que les marchés tunisien et libyen ont toujours été approvisionnés par la contrebande d’Algérie. Les responsables de la Gendarmerie nationale ont fait état, récemment, du démantèlement d’un vaste réseau qui sévissait dans les wilayas de l’Est du pays. Ils avaient recensé des plaintes relatives à la « disparition » d’environ 10.000 têtes. L’étau qui se resserre, depuis peu, aux frontières, a permis donc d’endiguer la spéculation et de donner le coup de grâce aux activités des contrebandiers qui prospèrent sur toute la bande frontalière. On ne sait pas, en plus du risque de l’opération, ce que cela rapporte à nos contrebandiers puisque, en Tunisie par exemple, le mouton coûte entre 250 dinars (dinars tunisiens) et 350, selon les régions. En dinars algériens, cela donne entre 18.000 et 25.000. A moins que cette exportation frauduleuse qui frise l’arnaque, ne sert que comme moyen de troc, de blanchiment d’argent ou une fuite de capitaux. A ce rythme, et grâce à ce dispositif, il n’y a pas que le mouton qui sauvera sa tête des mailles des contrebandiers, d’autres produits, plus particulièrement ceux subventionnés, connaîtront, à leur tour, un répit.
K. daghefli