Et où sur les façades des vieux palais somptueusement restaurés, on admire une foule de détails qui rappellent l’âge d’or de l’architecture musulmane, les splendeurs d’Orient.
Coup de chapeau au jury du festival, lequel a battu d’abord le pavillon méditerranéen qui a distingué le travail de trois cinéastes arabes : le Syrien Hatem Ali, le Marocain Nourredine Lakhmari et l’Egyptien Magdy Ahmed Ali, respectivement grand prix (Taureau d’or) pour Al laïl al tawil (la longue nuit), meilleur metteur en scène pour Casanegra et mention spéciale pour Khaltet Fawzia.
Le très beau et très courageux Al laïl al tawil dresse le portrait des dissidents syriens, intellectuels et artistes, journalistes et hommes politiques inféodés au pouvoir de Hafez El Assad et de ce fait, tous condamnés à de longues années de prison.
Hatem Ali mène son récit avec esprit, intelligence et émotion. Il est désormais l’auteur d’une œuvre exceptionnellement réussie.
Son film a les rares qualités de ceux de Youcef Chahine et de Mohamed Mallas. Cette beauté dans le cinéma arabe, on la croyait irrévocablement perdue mais elle s’exprime clairement et librement dans cette œuvre syrienne.
Il faut saluer la pléiade d’actrices et d’acteurs syriens qui impriment à ce film sa grande profondeur où passent à la fois la douleur, la souffrance, le regret et la joie.
L’histoire se passe à Damas la nuit où l’on apprend que grâce à des pressions internationales (au passage, le cinéaste rend hommage à l’ex-président français Jacques Chirac qui a fait libérer et accueilli en France des opposants syriens) des prisonniers politiques sont sur le point de sortir du bagne.
Durant cette longue nuit d’hiver, métaphore de l’époque très sombre qu’a connue la Syrie, soudain l’espoir est permis.
On assiste à l’attente anxieuse des familles de voir un être cher libre enfin. Et en même temps, durant cette nuit, tous les non-dits ressortent.
On se dit tout en face, ce qu’on a caché et pas osé dire durant des années. Au sein des mêmes familles, les rapports se disloquent.
On se déchire et on finit par se réconcilier après avoir vidé toute l’angoisse gardée au fond du cœur.
On entend même les traîtres finir par avouer leur traîtrise et dire qu’ils en souffrent. Une vraie tragédie de William Shakespeare dans la nuit syrienne.
On ne dira plus que les malheurs des pays arabes viennent toujours de l’extérieur, puisque Al laïl al tawil montre bien que les pires ennemis de la Syrie sont les Syriens eux-mêmes.
Le succès de Casanegra de Nourredine Lakhmari est aussi hautement mérité. Le regard caustique, carrément furieux et enragé par le déclin de sa ville, a beaucoup impressionné le public italien qui regarde parfois les portraits cinglants que leurs cinéastes font de Naples engloutie sous les ordures.
De même, le film égyptien s’est inscrit au palmarès à cause de la fougue avec laquelle l’actrice Ilhem Shahin (Fawzia dans le film) transforme un coin inquiétant, situé sous les viaducs du Caire, en villégiature très acceptable où défilent ses cinq maris restés ses amis malgré les divorces.
Succès aussi dans la section Au-delà de la Méditerranée du film américain Corso the last beat, de Gustave Reinniger.
Un portrait hilarant du poète Gregory Corso, ami de Kérouac, Ginsberg et Burroughs. Un artiste surdoué, un poète vagabond dont les modèles étaient Oscar wilde et Arthur Rimbaud.