Dubai, ville-Etat sans cinéma, sans studio, sans cinéastes, sans acteurs, en plus au bord de la faillite financière, organise pourtant du 9 au 16 décembre son 6e Festival du film.
Quand on débarque ici, le nom du grand acteur indien Amitabh Bachchan est sur toutes les lèvres. La très large communauté indienne de Dubai patiente, le long d’une longue file, pour voir Big B sur le tapis rouge. Mais le festival de Dubai qui voulait lui rendre hommage a failli lamentablement à sa mission.
Tout a raté a cause de l’incompétence des organisateurs du festival. Big B n’a même pas eu droit à un simple micro lors de sa conférence de presse, et quand il est monté sur scène lors de la séance d’ouverture, cela a duré moins de trente secondes. C’est plus qu’une erreur de la part du festival de Dubai, mais une faute impardonnable ! Le festival lui-même a eu beaucoup de mal à démarrer, retard des projections, système absurde d’octroi des tickets et des invitations pour pouvoir accéder à la salle, service d’ordre hallucinant et brutal… Pendant ce temps, tapis dans leurs bureaux, les organisateurs se congratulent tout en essayant de faire des profits (crise oblige) sur le dos des productions étrangères présentes (campagne publicitaire massive, vente par internet des tickets et peut-être aussi des copies de films piratés).
Bref, comme toute la ville de Dubai, son festival est devenu un vaste bazar. Merzak Allouache et sa sympathique bande d’acteurs ont fait le voyage à Dubai pour présenter Harragas, en compétition dans la section cinéma arabe. Parce que c’est un témoignage puissant et douloureux sur ce qui se passe en Palestine, avec les luttes fratricides de clans palestiniens ennemis, le nouveau film de Michel Khleifi Zindeeq a attiré une salle comble. Saisissant essai-fiction, très personnel, sans discours orthodoxe, Zindeeq est interprété par Mohamed Bakri dans le rôle d’un cinéaste palestinien qui retourne d’Europe à Ramallah et Nazareth, afin de témoigner, caméra au poing, de la vie de son peuple. Un Bakri très crédible, très émouvant, qui ne pardonne pas à ses frères de se faire tant de mal dans leurs querelles internes. Les années passent et malgré toutes les difficultés possibles et imaginables, le cinéma palestinien survit et avance, émigre ailleurs et se développe quand il trouve des aides à la production. Mohamed Bakri a aussi amené à Dubai son nouveau film Zahara, et Rachid Masharawi montre ici le documentaire qu’il a fait sur les enfants de Baghdad intitulé Al Ajniha Assaghira (les petites ailes).
Par Azzedine Mabrouki