Le réalisateur a saisi l’occasion de la présence de nombreux journalistes étrangers pour critiquer le ministère de la Culture qui avait refusé de lui accorder une aide.
«Il y a toujours eu manipulation en Algérie, notamment lors dernières législatives où l’élection a été préparée et offerte sur un plateau.»
Ces propos ne sont pas d’un homme politique, mais bien d’un réalisateur algérien, Merzak Allouache, qui présentait son film Le Repenti lors de la Quinzaine des réalisateurs. Après la polémique sur son film Normal, le réalisateur algérien risque, une nouvelle fois, de soulever un tollé en Algérie suite à ces déclarations très graves sur la situation politique et culturelle en Algérie.
Le réalisateur a également saisi cette occasion, la présence de nombreux journalistes étrangers et de quatre journalistes algériens, pour critiquer le ministère de la Culture qui avait refusé de lui accorder une aide pour produire ce film, oubliant de dire au passage, que le ministère lui avait accordé une autorisation de tournage pour réaliser son film dans une zone à risques à l’intérieur du pays.
Et pourtant, tout avait bien commencé par la présentation à la Croisette, avec néanmoins une demi-heure de retard et un film assez bien fait et un scénario original, basé comme d’habitude sur l’article d’un journal que Merzak Allouache scrute quotidiennement sur Internet. Le film commence avec un décor magnifique d’un Grand Sud couvert d’une légère couche blanche de neige.
Le réalisateur avait la chance de tourner durant la grande période de froid qui avait touché l’Algérie en février. Mais le film Taiib ou Le Repenti (Le titre original était Le temps de la concorde). Rachid, un jeune jihadiste (magistralement interprété par Nabil Asli) quitte la montagne et regagne son village, profitant de la loi de la concorde civile, il doit se rendre à la police et restituer son arme. Il bénéficie alors d’une amnistie et devient «repenti».
Mais la loi ne peut effacer les crimes et pour Rachid, s’engage un voyage sans issue où s’enchevêtrent la violence, le secret, la manipulation. Merzak Allouache l’a avoué: il tire son histoire d’un Algérien qui avait été contacté par un repenti lui demandant un marché macabre: lui donner 100.000 DA en échange, il lui montre la tombe de sa fille enlevée et assassinée par les terroristes. Pour le réalisateur, l’histoire l’avait tellement hanté, qu’il décida d’en faire un film, montrant une Algérie d’aujourd’hui amnésique.
Pour Allouache, il a essayé, selon lui, d’imaginer ce que sera l’avenir de la politique de la concorde civile après tant de haine. Une haine que Allouache sait bien filmer et exprimer à travers sa caméra, puisqu’il décrit un couple déchiré par cette tragédie. Le couple Khaled Benaïssa et Adila Bendimerad, qui était éclatante dans son rôle de veuve inconsolable. Le réalisateur qui a tourné durant une vingtaine de jours a réalisé, comme de coutume, un film dans l’urgence, sans musique, des lenteurs et surtout des faux raccords qui restent impardonnables pour un réalisateur aussi expérimenté.
Le plus édifiant demeure le pistolet italien Berreta de Khaled Benaïssa qui se transforme à la fin, en pistolet Makarov russe. A cela s’ajoutent des clichés anti-algériens toujours présents dans les films de Allouache pour afficher son opposition à la société algérienne. Merzak Allouache a offert un film audacieux, salué par les spectateurs français présents dans la salle hier à Cannes, mais qui risque de lui coûter son lot de critiques et de polémiques.
Adel Mehdi