Encore une fois, le voyageur se retrouve victime d’une grève sauvage.
Une pénurie menace le marché si les conteneurs ne sortent qu’au compte-gouttes des ports.
Le transport ferroviaire est continuellement perturbé tandis que de multiples tracas agitent le transport terrestre, maritime et aérien.
Depuis deux jours, les trains électriques ou autorails desservant les banlieues de la capitale et les wilayas limitrophes sont immobilisés. C’est la quatrième fois consécutive que les cheminots débrayent en l’espace de quelques mois. Après la dernière grève des conducteurs, un conflit a pris naissance entre les chefs de train et les mécaniciens. 200 chefs de train croisent le fer avec les 250 mécaniciens à propos d’une histoire d’occupation de cabines. C’est suffisant pour paralyser le trafic ferroviaire des autorails de et vers la capitale.
Selon des témoignages recueillis à la gare Agha d’Alger, les chefs de train refusent de remettre les clés des cabines aux mécaniciens, comme stipulé par une décision prise dans ce sens par la direction régionale de la Sntf. Seuls les deux départs et retours de trains classiques à traction allant vers Lakhdaria et Tizi Ouzou ont été maintenus pour la journée d’hier. Les 8 départs et retours des trains longs trajets vers Oran, Constantine et Béjaïa ne sont pas concernés par cette grève illimitée. Environ 400.000 usagers du train des banlieues algéroises et régions voisines seront ainsi pris en otage par cet énième débrayage hautement pénalisant.
Les aéroports de l’Ouest en grève?
Le transport aérien n’est pas épargné par cette vague de turbulence sociale. Le personnel des 11 aéroports de l’ouest du pays entreront en grève cyclique dès demain. Des sit-in hebdomadaires sont annoncés par les contestataires. Ces travailleurs de l’Entreprise de gestion des services des aéroports de l’Ouest (Egsao) observeront ainsi des arrêts de travail pour réclamer le versement de leurs parts des bénéfices de l’exercice 2008, une meilleure gestion de carrière et l’instauration de la gestion rationnelle des ressources humaines. Les protestataires menacent, par ailleurs, de recourir à une action plus musclée si la direction fait la sourde oreille. Qu’en est-il de la genèse de la colère des travailleurs? Selon ces derniers, il y aurait l’attribution sélective des bénéfices financiers. Les promotions et les recrutements s’effectueraient dans l’opacité.
Dans ce contexte de contestations tous azimuts, le nouveau président-directeur général d’Air Algérie tiendra demain une conférence de pesse à l’Hôtel Mercure à Alger.
A l’occasion de sa première sortie médiatique, le P-DG évoquera certainement des sujets relatifs au fonctionnement de la compagnie, notamment la réponse aux revendications socioprofessionnelles du personnel navigant commercial.
Pour rappel, une douzaine de sections syndicales ont menacé d’une grève générale si la direction persiste à refuser le droit d’élire les organes représentatifs et à poursuivre le plan de restructuration sans concertation.
Les syndicalistes n’excluent pas un autre mouvement de grève si rien n’est fait. Le transport terrestre n’est pas en reste. Le bras de fer entre les transporteurs de voyageurs et la direction des transports de la wilaya de Tizi Ouzou risque de se durcir davantage. Une semaine après la délocalisation de la gare routière du chef-lieu de wilaya vers la gare multimodale sise à Bouhinoun, les usagers, qui sont légion, vivent un calvaire.
Une conférence de presse sera tenue, demain, au niveau de la gare routière du Caroubier, à Alger, où l’Union nationale algérienne des transporteurs (Unat) exprimera son soutien aux grévistes. Les citoyens, pris dans cette spirale, font les frais de cette politique de transport invraisemblable. Seuls les transporteurs clandestins trouvent leur compte dans cette tourmente qui a pris en otages les usagers et exigent des tarifs aberrants. Ceci étant, il faut dire que depuis quelques années, une crise s’est installée notamment au port d’Alger. Pour preuve, plus de 25.000 conteneurs dorment dans cette enceinte portuaire, selon une source sûre. «Le déficit en moyens de manutention, notamment en matière de levage, chargement et de déchargement de la marchandise, ainsi que la gestion approximative, sont les principales causes de cette situation», affirment plusieurs intervenants au port.
Le manque d’espace est tel que «les conteneurs sont superposés sur 4, voire 5 rangées», ajoute-t-on. Une disposition du reste contraire à la réglementation. Les conséquences désastreuses de cet état des lieux seront davantage ressenties durant le mois de Ramadhan, déjà à nos portes.
Les dockers menacent
Sachant que 55% des importations transitent par le port d’Alger, la tension risque de s’accentuer à l’approche de cette période où la consommation de produits de tous genres enregistre des pics. Comme un malheur en appelle souvent un autre, les agents douaniers exerçant au niveau des ports secs, en colère contre la suspension abusive de leurs collègues, menacent de paralyser l’ensemble des ports sous-douane de l’est de la capitale. Ces derniers ont été empêchés récemment, de tenir leur assemblée générale pour renouveler la composante de leur section syndicale. Il est attendu que les rangs de ces protestataires grosissent avec l’adhésion des autres agents douaniers exerçant dans les différents ports et aéroports.
En outre, les dockers et d’autres catégories des personnels de l’Epal (Entreprise du port d’Alger), qui refusent d’attendre jusqu’à la prochaine tripartite, menacent de leur côté de débrayer dans les prochains jours. Les mesures prises par le gouvernement pour décongestionner le port d’Alger n’ont, semble-t-il, pas amélioré la situation du terminal à conteneurs, le port d’Alger faisant face à une congestion indescriptible. Le temps d’escale moyen était de 12 jours en mars 2010. Quelques compagnies ont enregistré une escale record de 37 jours à Alger. Cette situation a pour conséquence directe, l’allongement des temps de transit à Alger. D’autres conséquences pèsent sur certains conteneurs transportant des denrées périssables.
Nonobstant le fait que diverses marchandises non conteneurisées ne sont plus autorisées à être déchargées au port d’Alger, aucune amélioration n’en a été ressentie. Cette attente en mer coûte entre 1500 et 2500 dollars US-jour. Le traitement des conteneurs se fait dans un délai très long, vu l’exiguïté du terminal. Cela retarde le déchargement des autres conteneurs. Cette obsession de vouloir décharger au port d’Alger pénalise l’économie algérienne. Ce handicap fait perdre à l’Algérie près de 2 milliards de dollars chaque année.
Le décor est davantage assombri par le projet du métro d’Alger, en chantier depuis trois décennies. La capitale étouffe à cause des embouteillages. Néanmoins, avec près de deux ans de retard, le premier tronçon du tramway d’Alger dont les travaux ont été lancés en 2007, n’a été mis en service que depuis le 8 mai dernier.
Ainsi, rien ne va plus dans le secteur des transports. La grogne s’empare de tous les segments de ce département.