Les huit millions d’enfants scolarisés à travers le pays sont en vacances depuis une semaine. Un ouf de soulagement pour ces bambins après un trimestre assez long et assez lourd mais une source d’angoisse pour de nombreuses mères travailleuses qui voient leur programme, de la journée et de la semaine, complètement chamboulé.
Les crèches ne s’ouvrent pas pendant les vacances scolaires, un sérieux problème pour les parents d’enfants en bas âge notamment. Ces derniers, en l’absence de familles proches pour s’occuper des enfants, se voient obligés de prendre (un des parents ou les deux) un congé. C’est aussi un
problème pour les élèves du moyen et du secondaire qui, mis à part la télévision et les jeux sur Internet quand il y a connexion, ne trouvent pas d’espaces où s’amuser et passer du temps autre que la rue. Les infrastructures sportives et de loisirs, les terrains de foot, les salles de jeux sont rares et peu commodes, alors que les cybercafés ne cessent de connaître de sérieux problèmes de connexion. C’est confirmé, l’école pour de nombreux parents est plus une garderie qu’un lieu de savoir. Cette tension qui accompagne
l’annonce de la fin de chaque trimestre en est bien la preuve. «Au moins quand ils sont à l’école, on est sûrs qu’ils ne vont pas ailleurs», dit une femme, la quarantaine, mère d’une fille d’une dizaine d’années. Il y a aussi le problème de la restauration. «Quand ils sont à l’école, on ne s’inquiète pas pour leur restauration. Maintenant qu’ils sont en vacances, ça pose un sérieux problème. Il ne suffit pas de leur préparer à manger et leur dire de le réchauffer au moment du déjeuner.
On ne peut pas faire confiance à une enfant de dix ans. Et il ne s’agit pas que de cela. En réalité, on n’est jamais tranquille quand on laisse son enfant seul à la maison. On voit bien les chiffres de la Protection civile sur les accidents domestiques, ajoutés à cela les risques sur le plan sécuritaire», poursuit la même dame. Elle parle des kidnappings et des agressions à l’intérieur même des domiciles.
Des personnes regrettent la structure familiale telle qu’elle était autrefois. La grande famille a ses grands avantages, c’est dans ces situations qu’on le voit clairement. Tant pis pour les couples qui se pressent de couper les ponts avec les beaux- parents, les beaux-frères et les belles- sœurs, relève une autre femme, indignée par le fait qu’elle ne trouve pas de crèche pour ses deux enfants.
«Autrefois fois, il y avait la tante, la belle-sœur, la grand-mère et même la voisine pour s’occuper de l’enfant pendant notre absence. Ce n’est plus le cas aujourd’hui», réplique une autre femme, la soixantaine. Et celle-ci de dire son refus de s’occuper de son propre petit-fils : «Je n’ai ni le temps ni la force de m’occuper des enfants. J’aurai aimé entendre la voix de mon fils au téléphone pour demander de mes nouvelles et non pas me charger de m’occuper de son fils.» Des mots durs qui révèlent une grande détresse née des différends
familiaux qui vont jusqu’à séparer l’homme de sa mère, de sa propre famille. C’est le résultat fatal de l’éclatement déguisé de la famille traditionnelle pour des raisons d’ordre social, économique et autre.
Les APC ne s’occupent guère de ce problème de crèche notamment. A peine, elles arrivent à prendre note des doléances des citoyens -en ne les satisfaisant qu’en de rares cas- portant sur l’hygiène dans les quartiers, l’aménagement des espaces urbains, l’état des routes…etc. Et la société civile est pratiquement absente.
Le peu d’associations qui se distinguent sont celles dites proches du pouvoir et qui ne se manifestent que pour des intérêts personnels. S’attarder sur les questions en relation avec l’absence de crèches dans le quartier, d’espaces de jeux et de détente, ne les tente pas. C’est plus une perte de temps. Les problèmes de circulation routière ajoutent à la galère des parents. Des heures entières perdues dans les embouteillages. Pas moyen de rentrer à midi chez soi, donner à manger à son enfant et retourner au travail. Pas le temps de l’accompagner à la piscine qui s’ouvre dans le quartier voisin.
Même les bibliothèques communales tendent à disparaître. Pire, la lecture n’intéresse pas les enfants et les adolescents. Voilà comment ils tombent dans l’oisiveté, dans le vide pour devenir une proie facile à ceux, nombreux, qui les guettent dans le milieu dans la toxicomanie, les filles autant que les garçons. Des enquêtes et des études révèlent et confirment que la drogue est bien installée dans les quartiers, les établissements universitaires et scolaires, mais les autorités habilitées traînent encore pour faire face efficacement au problème.
Pendant ces vacances scolaires, des établissements laissent ouvertes leurs portes mais uniquement pour les élèves des classes de terminale et seulement durant la première semaine. Là encore, la réalité sur le terrain montre que les responsables de ces établissements ne font pas leur travail convenablement et encore plus les enseignants qui s’y présentent un jour et s’absentent un autre. Anarchie et irrégularité poussent les élèves à agir de même.
Au niveau du ministère de l’Education nationale, cette question de créer des espaces où accueillir les enfants pendant les vacances scolaires n’a jamais été posée. La raison en est claire, c’est qu’ils considèrent que cela ne relève pas de leurs prérogatives. Aux autres départements ministériels de se pencher sur le problème.
Côté syndicats, les questions d’ordre socioprofessionnel prime sur tout. A noter, à ce propos, que ces mêmes syndicats créent la même situation d’angoisse et de tension chez les parents les jours où ils décident de faire grève. Les enseignants grévistes, et avant eux l’administration, renvoient les enfants chez eux au lieu de les garder en classe. Les temps sont bien durs pour les parents qui, chaque jour qui passe, s’inquiètent davantage pour leur progéniture. Des lendemains incertains et des menaces certaines qui proviennent de toutes parts.
K. M