L’expert en économie, Ferhat Aït Ali, parle dans ce court entretien de la dévaluation du dinar et de ses retombées.
La Dépêche de Kabylie : Jusqu’où ira la dévaluation du dinar ?
Ferhat Aït Ali : Le dinar n’a jamais cessé d’être dévalué depuis 1999, année durant laquelle il était de 55 dinars pour un dollar, et cela a été fait pour créer plus de dinars et régler des dépenses et salaires en monnaie locale, sans toucher à la masse en dollars, même quand il n’y a pas eu de rentes suffisantes.
À partir de 2014, le gouverneur a aligné les dinars existants sur la masse en dollars restante, en pensant la sauvegarder en baissant le pouvoir d’achat des Algériens, ce qui a massacré les petites bourses et effrayé le gouvernement sur leur réaction. On a, donc, arrêté la dévaluation en coupant l’accès au port par des mesures bureaucratiques. Nous avons, ainsi, un dinar stable et qui ne permet pas d’importer, mais là aussi c’est un échec.
On envoyait les importateurs au square pour acheter les devises afin d’importer les produits interdits, ce qui n’est pas une perte pour eux parce qu’ils paient la devise plus chère, mais les rentes fiscales, comme les droits de douanes, ne sont pas rentabilisées car il s’agit de l’économie de contrebande et cela a augmenté le prix de l’euro et du dollar.
Pour le dinar, la dévaluation a été ralentie sur ordre politique sinon elle serait plus accentuée que cela, mais elle finira par arriver et en bloc cette fois, moins il y a de dollars et plus il y a de dinars et moins ils valent. La devise flambe quand il y a plus de demande que d’offre. Les produits interdits à l’importation ont été importés par l’entremise du square, ce qui a apporté une demande nouvelle de 1 milliard de dollars vers ce marché, avec une offre limitée par la surfacturation qui est sous surveillance.
Pourquoi les indicateurs économiques ne permettent toujours pas de corriger cette grande disparité Dollar/Dinar ?
L’économie nationale est une économie de rentes en amont et d’intendances en aval. On cherche des dollars pour nourrir et équiper la société et quand il n’y en a pas, on baisse les approvisionnements, c’est une économie de casernement. Une économie ne bloque rien, elle crée de la richesse qui dispense d’importer ce qu’on produit chez soi et qui exporte pour payer ce qu’elle importe et en ce sens, nous ne pouvons pas appeler notre système une économie pour le pouvoir d’achat, il vaut ce que vaut le baril dans un pays branché sur un baril.
Popos recueillis par Kamela Haddoum.