Outre le volet spirituel du mois de ramadhan, les discussions portant sur la cuisine et la nourriture se taillent la part du lion et font le quotidien des jeûneurs. «Tu as mangé quoi hier, que cuisineras-tu aujourd’hui ou encore je ne sais pas encore ce que je préparai pour ce soir, je n’en ai aucune idée …» sont le genre de phrases qu’échangent les femmes ayant le souci de trouver des idées pour leurs plats. Ainsi, et comme par contradiction, le mois du jeûne est en définitive le mois de la consommation par excellence, les femmes doivent s’y mettre au rythme de longues heures à l’intérieur de la cuisine. Pour la famille c’est toujours une joie et un plaisir de se réunir autour de la table au moment de la rupture du jeûne. Trente jours durant lesquels les femmes pensent et repensent quotidiennement au menu du jour. Alors que la quasi-totalité des jeûneurs sont «programmés» à attendre les repas d’el iftar, les mamans, filles et petites-filles se mobilisent pour que la table soit bien garnie et que les plats soient réussis. Pour ce faire, il n’est plus question de compter uniquement sur son génie ou d’appeler sa voisine pour dénicher une nouvelle recette. Pour avoir des idées, il suffit de jeter un d’œil sur ses livres de recettes, ou de se brancher sur les programmes culinaires que proposent les nombreuses chaînes télévisées spécialement pour le mois du carême. Les programmes télés sont d’un grand secours pour les femmes généralement et pour celles qui font leurs débuts dans la cuisine et qui manquent d’expérience. Les émissions culinaires sont à cet effet unanimes à proposer des recettes légères qui vont avec cette saison des grandes chaleurs. Par ailleurs, ce ne sont pas seulement les stars du cinéma et de la comédie qui captent l’attention durant ce mois mais aussi les chefs cuisiniers de ces programmes télé. Pour preuve, il y a des noms qui sont aussi célèbres que des figures de la chanson ou du septième art. À titre d’exemple, la célébrité de l’animatrice marocaine des émissions culinaires, Choumicha, ne se limite pas au Maroc mais elle réalise un grand succès dans tous les pays du Maghreb. Autre célébrité de la cuisine, le chef Oussama qui anime depuis des années déjà son émission culinaire «Maa Oussama atyab» (c’est plus délicieux avec Oussama). En plus de ses recettes et astuces pour des menus équilibrés de ftor, les téléspectatrices peuvent le contacter en direct par appels téléphoniques et solliciter des recettes et des conseils. Néanmoins, ce ne sont pas seulement les idées qui posent problème mais les ingrédients qui y vont avec. Puisque ce ne sont pas tous les ménages qui peuvent se permettre les recettes proposées par les programmes télés. Dans ce cas, les femmes ont recours aux recettes peu coûteuses qui sont à base de légumes et fromage au lieu de celles des viandes. Quoi qu’il en soit, les mères de famille se débrouillent pour que la chorba, les plats de résistance, les gâteaux au miel et les desserts soient présents sur les tables ramadhanesques. Amina, 28 ans, jeune mariée, passe son premier ramadhan avec son mari et ses beaux-parents ; elle raconte qu’elle a eu du mal à s’adapter avec les traditions culinaires de sa nouvelle famille.
«Je passe la moitié de la journée à la cuisine pour préparer de ce que mes beaux-parents exigent. J’ai été étonnée du nombre de repas qu’on me demande de faire quotidiennement. Heureusement que je suis en congé, autrement, je ne trouverai aucun équilibre entre ma vie professionnelle et familiale. Non seulement je suis dépassée et stressée par cette frénésie, mais je reçois souvent les mauvaises notes de ma belle-mère», fulmine-t-elle et de préciser qu’elle ne vit pas le ramadhan spirituellement, tellement elle est fatiguée et stressée par toutes ces histoires de cuisine qui ne s’achèvent pas…
Y. A.