Le logement semble être l’un des dossiers les plus brûlants sur lequel le gouvernement Abdelmalek Sellal dit se pencher pour davantage d’efficacité pour tenter d’éradiquer la crise dans ce domaine. La tache sera-t-elle facile ? En effet, il ne s’agit pas seulement de construire, mais veiller plutôt à la bonne marche d’une distribution équitable afin de limiter les détournements.
Le problème de la distribution, la spéculation, le trafic et le rythme inadéquat de la construction par rapport à la demande représentent les principaux obstacles. Ce sont, chaque année, 200 000 dossiers de demande de logements sociaux qui atterrissent au niveau des 1541 assemblées populaires communales (APC) du pays. «Sur les 200 000 dossiers de demande de logements sociaux déposés, annuellement, des milliers de falsifications sont enregistrées (présentation de fausses résidences, fausses fiches de paie…) si l’on se réfère aux enquêtes faites par les forces de sécurité», selon des sources proches du dossier.
Ce sont, selon nos sources, 10% des dossiers de demande de logements déposés au niveau des APC qui sont falsifiés. 10% sur 200 000 dossiers déposés annuellement représentent donc le chiffre effarant de 20 000 dossiers falsifiés. Les sources qui se basent sur des enquêtes menées par la Gendarmerie nationale et la police sur des scandales survenus dans différentes localités du pays ajoutent que «des enquêtes ne sont pas toujours menées pour déceler les fausses pièces administratives contenues dans les dossiers».
Cette faille favorise une déperdition de l’attribution au détriment d’une juste distribution, selon ces sources.
Le constat est alarmant puisque, selon nos interlocuteurs, l’Etat a attribué, depuis 1962, environ 6 millions de logements et lots de terrain à bâtir, alors que l’Algérie compte environ 6 millions de ménages. La crise du logement reste, pourtant, d’une pertinence à décourager plus d’un.
La distribution est remise en cause par des sources proches du ministère de l’Habitat et de l’Urbanisme qui expliquent les raisons de l’échec «appelé à durer tant que le problème n’est pas attaqué à la source».
Le parc immobilier algérien comptait 7,2 millions d’unités en 2010 et sera de 8,2 millions d’unités fin 2014 début 2015, a annoncé le Premier ministre Abdelmalek Sellal lors de la présentation, lundi, du plan d’action de son gouvernement devant l’Assemblée populaire nationale, rappelle-t-on.
En 2010, il n’y avait pas encore, en Algérie, 7,21 millions de ménages, font remarquer des spécialistes en la question, pour argumenter l’idée selon laquelle c’est le problème de la distribution qui perpétue, en grande partie, la crise du logement.
Le chef de l’Exécutif a, d’ailleurs, rappelle-t-on encore, mis l’accent sur la nécessité de «mettre fin à la problématique de la distribution de logements». Ce qui est qualifié de problématique de la distribution de logements s’apparente, pour nos interlocuteurs, à plutôt une «injustice sociale», car malgré les sommes faramineuses dépensées dans la réalisation de nouvelles habitations, celles-ci ne bénéficient pas toujours aux nécessiteux.
1,2 million de demandes de logement en instance
Le gouvernement s’est engagé à «œuvrer à éradiquer l’habitat précaire et satisfaire au maximum la demande en logement». Là, également, nos interlocuteurs font remarquer que 200 000 demandes de logements sociaux sont enregistrées, chaque année, au niveau national, alors que l’Etat produit, annuellement, 200 000 logements,
et que «le pays compte, actuellement, 1,2 million de dossiers de demandes de logement déposés au niveau des collectivités locales». Pour nos sources, «pour éradiquer la crise du logement il faudrait, au rythme de la production actuelle, 6 années sans qu’il n’y ait entre-temps de nouvelles demandes». «Ce qui est impossible puisque d’ici 6 années le nombre de demandes atteindra au moins 1,2 million».
Etudes architecturales dites-vous ?
Les mêmes interlocuteurs attirent l’attention sur un autre aspect, celui lié à la durée des études architecturales pour la réalisation de cités. «Des délais de 10 jours et 15 jours ont, parfois, été fixés à des bureaux d’études d’architecture pour la réalisation de nouvelles cités. Un laps de temps largement insuffisant et pouvant, de ce fait, entraîner «des insuffisances en matière d’équipements et de conception», selon eux. Ce qui a favorisé l’émergence, en Algérie, de «cités dortoirs» qui, au-delà de l’aspect peu esthétique, engendrent la violence urbaine.
Il faut relever également que nombre des cités réalisées en Algérie ne répondent pas aux normes fixant à 200 m2 d’équipements (éducatif, culturel, social…) pour chaque logement bâti. «Ce qui fait qu’il existe encore, aujourd’hui, en Algérie, des régions dans lesquelles un enfant est contraint de parcourir 17 kilomètres à pied pour se rendre à l’école», argumente une source proche du dossier.
Mounir Abi